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« Le Bleu du ciel » de Georges Bataille

Par Etcetera
Bleu ciel Georges Bataille

L’écrivain, poète, éditeur et blogueur Etienne Ruhaud a créé le défi de lecture « Un classique par mois« , et j’essaye tant bien que mal de m’y tenir. Il s’agit de découvrir chaque mois un écrivain classique que l’on n’a encore jamais lu. Voici le lien vers son blog Page Paysage.
C’est l’occasion de vous révéler cette lacune : je n’avais encore jamais lu Georges Bataille (1897-1962). Ce n’était pas faute d’en entendre parler, pourtant !
Ecrivain très réputé, membre un peu marginal du groupe surréaliste, il a inspiré beaucoup d’auteurs après lui…

Note pratique sur le livre

Editeur : Gallimard (coll. L’Imaginaire)
Année de parution : 1957
Année d’écriture : 1935
Nombre de pages : 215

Brève présentation de l’histoire

Ca se passe vers le milieu des années 30 à Barcelone. Peu avant la guerre civile, qui est justement en préparation. On évoque une possible révolution. Le héros, Tropmann, est un Français qui va d’errance en errance, fréquentant les bars, les boites, les dancings. Son esprit est souvent occupé par trois femmes : Dirty, Lazare, Xénie. Elles vont et viennent dans sa vie. Il y a aussi sa femme Edith, dont il est séparé. Les relations de notre héros avec ces quatre femmes ne sont pas satisfaisantes. (…)

Mon avis

Rarement je me suis autant ennuyée à la lecture d’un livre. Nous assistons aux incessantes tergiversations et aux angoisses sans motifs d’un héros qui ne se sent pas bien. Les manifestations physiologiques de son mal être nous sont relatées avec abondance : il vomit, il va aux toilettes, il transpire, il pleure, il rit, il est ivre, il a de temps en temps des hallucinations, il a sommeil, il est malade, on ne sort quasiment jamais de ses petites humeurs corporelles et c’est fatigant !
Les émotions de ce héros hésitant ne sont jamais très nettes non plus. Il navigue plus ou moins entre quatre femmes, ou plus exactement ce sont elles qui gravitent autour de lui. On se demande ce qu’elles lui trouvent, d’autant plus qu’il est toujours partagé entre la froideur et le dégoût à leur égard – quand ce n’est pas la brutalité et la haine, pour faire bonne mesure. 
A un moment, sa femme lui parle dans une lettre de son envie de se suicider mais, bien sûr, ça ne va pas plus loin que ça. Et c’est à l’image de tous les personnages : ils essayent des postures, ils se donnent des genres vaguement décadents, invariablement dégoutés, affichant un communisme peu convaincant (encore une posture, il semble), tout ça est sûrement très chic à leurs yeux… mais bon.
Le héros s’appelle Tropmann, ce qui est le nom d’un assassin célèbre du 19e siècle, cité par Rimbaud dans l’album Zutique – et, en effet, il a un rapport à la mort tout à fait spécial puisqu’il est nécrophile. On se dit que Georges Bataille avait décidément très envie de scandaliser le bourgeois de son époque.
J’ai lu que le personnage (féminin) de Lazare était inspiré par la philosophe Simone Weil et, en effet, elle parait plus consistante et plus profonde que les autres, qui semblent au contraire des coquilles vides. Malheureusement, elle n’apparaît pas très souvent et Tropmann passe même beaucoup de temps à craindre qu’elle n’arrive… alors que le lecteur espère vainement qu’elle viendra le sauver de son ennui !
Je sais que ce roman est très réputé mais je n’ai pas du tout adhéré au propos et, sur la forme, le style, sans être désagréable, ne m’a pas enthousiasmée non plus.
Contente tout de même d’avoir enfin découvert Georges Bataille et de m’être fait un avis à son sujet, je ne pense pas maintenant me précipiter en librairie pour acquérir ses œuvres complètes – loin de là !

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Un Extrait page 50

Je m’expliquai :
– Ce n’est pas difficile à comprendre. Je me mettais en sueur. Le temps passait en efforts inutiles. A la fin, j’étais dans un état d’extrême épuisement physique, mais l’épuisement moral était pire. Aussi bien pour elle que pour moi. Elle m’aimait et pourtant, à la fin, elle me regardait bêtement, avec un sourire fuyant, même fielleux. Elle s’excitait avec moi et je m’excitais avec elle, mais nous n’arrivions qu’à nous écœurer. Vous comprenez : on devient dégoûtant… Tout était impossible. Je me sentais perdu et, à ce moment-là, je ne pensais plus qu’à me jeter sous un train…
Je m’arrêtai un moment. Je dis encore :
– Il y avait toujours un arrière-goût de cadavre.
– Qu’est-ce que vous voulez dire ?
– Surtout à Londres… Quand j’ai été à Prüm la retrouver, il était convenu qu’il n’arriverait plus rien du même genre, mais à quoi bon… Vous ne pouvez pas imaginer à quel degré d’aberration il est possible d’arriver. Je me demandais pourquoi j’étais impuissant avec elle, et pas avec les autres. (…)

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