L’histoire des Beatles est jalonnée de reprises, de réinterprétations et d’expérimentations musicales qui illustrent leur capacité à absorber les influences et à les transformer à leur manière. Parmi les titres enregistrés lors de leur fameuse audition chez Decca en janvier 1962 figure The Sheik Of Araby, un standard de vaudeville de 1922. Ce choix, qui peut surprendre au premier abord, témoigne non seulement de la richesse du répertoire scénique du groupe, mais aussi de l’empreinte du rock ‘n’ roll britannique sur la formation de leurs premières années.
Sommaire
- Une chanson d’un autre temps
- L’influence de Joe Brown et la version des Beatles
- Une audition historique et une déception marquante
- Une redécouverte grâce à Anthology 1
- Héritage et impact
Une chanson d’un autre temps
The Sheik Of Araby a vu le jour dans les années 1920, époque où la culture populaire occidentale était fascinée par l’Orientalisme. Écrite par Harry B. Smith, Francis Wheeler et Ted Snyder, la chanson s’inspirait du succès retentissant du film The Sheik (1921), mettant en vedette Rudolph Valentino. Ce long-métrage romantique et exotique avait suscité un engouement tel que de nombreuses œuvres musicales furent composées sur le même thème.
Le morceau devint un standard de la musique populaire américaine, repris notamment par Fats Waller, Louis Prima et bien d’autres artistes de jazz et de swing. Toutefois, c’est sous une forme modernisée qu’il atterrit dans le répertoire des Beatles, sous l’influence d’un certain Joe Brown.
L’influence de Joe Brown et la version des Beatles
Joe Brown, chanteur et guitariste britannique, avait enregistré une version rock ‘n’ roll de The Sheik Of Araby en 1961. Véritable vedette au Royaume-Uni grâce à des émissions comme Six-Five Special et Oh Boy!, il comptait parmi ses admirateurs un certain George Harrison. Séduit par son approche dynamique et sa capacité à donner un nouveau souffle aux vieux standards, Harrison proposa d’intégrer la chanson au répertoire des Beatles. Lors de leur audition chez Decca, il prit le lead vocal sur ce titre, accompagné par John Lennon et Paul McCartney aux chœurs, Pete Best à la batterie et lui-même à la guitare solo.
Cette version des Beatles conserve l’esprit enjoué de l’originale, tout en y injectant une énergie propre aux groupes de rock ‘n’ roll naissants. La rythmique est plus entraînante, et l’interprétation vocale, teintée d’humour, rappelle leur maîtrise des performances scéniques acquises à Hambourg et à Liverpool. Cependant, en studio, le morceau peine à retranscrire l’énergie communicative du groupe sur scène.
Une audition historique et une déception marquante
L’audition du 1er janvier 1962 chez Decca demeure l’un des moments les plus emblématiques du début de carrière des Beatles. Sous l’impulsion de leur manager Brian Epstein, le groupe enregistre une quinzaine de morceaux censés démontrer leur polyvalence musicale. Epstein avait sélectionné des titres issus de leur répertoire de scène, qu’il jugeait capables de séduire les producteurs.
Malheureusement, malgré la diversité et la qualité des titres interprétés, Decca choisit de ne pas signer les Beatles, au profit d’un autre groupe, Brian Poole and The Tremeloes. Cet échec, bien que cuisant, fut un mal pour un bien, puisqu’il incita Epstein à frapper à la porte d’autres labels, jusqu’à décrocher un contrat avec Parlophone sous la houlette de George Martin.
Une redécouverte grâce à Anthology 1
Longtemps restée dans l’ombre, cette version de The Sheik Of Araby a refait surface en 1995 avec la sortie de Anthology 1, compilation regroupant de nombreux enregistrements inédits des Beatles. Ce disque, qui explore les premières années du groupe, permet d’apprécier leur évolution artistique et leur attachement aux racines du rock ‘n’ roll.
Écouter aujourd’hui The Sheik Of Araby par les Beatles, c’est se replonger dans une époque où le groupe n’était encore qu’un jeune espoir du rock britannique, avide de prouver son talent. La fraîcheur de l’interprétation, l’enthousiasme palpable et la touche humoristique de George Harrison rappellent que, bien avant de révolutionner la musique, les Beatles étaient avant tout un groupe de scène, nourri par les standards d’hier et tourné vers l’avenir.
Héritage et impact
Si The Sheik Of Araby n’est qu’une curiosité dans le vaste catalogue des Beatles, elle illustre néanmoins leur démarche artistique : puiser dans l’histoire musicale pour mieux la réinventer. Ce titre témoigne également de l’influence qu’exerçaient des artistes comme Joe Brown sur la scène rock britannique naissante.
Avec le recul, cet enregistrement est une pierre angulaire du parcours des Beatles, révélatrice de leur dynamisme et de leur passion pour la musique sous toutes ses formes. C’est une pièce d’histoire qui rappelle que même les plus grands ont commencé en revisitant les classiques, avant de devenir, à leur tour, une référence incontournable.
Jeu de briques
Snake
Pacman
Bubble