En 1987, George Harrison, cet artiste qui n’a jamais cessé d’explorer et de se renouveler, offre au monde un morceau curieux, mais éminemment charmant, baptisé « Zig Zag ». Loin des paysages sonores que l’on lui associe traditionnellement, ce titre se glisse dans les eaux d’un jazz des années 1930, tout en mêlant une touche d’expérimentation sonore propre à l’esprit d’Harrison. « Zig Zag » n’est pas un morceau qui s’impose par sa longueur ou sa structure complexe. Pourtant, il incarne toute la singularité d’un artiste en constante quête de renouvellement, entre tradition et innovation. Retour sur ce titre qui fait écho aux années folles et aux expérimentations sonores qui marquent la fin des années 80.
Sommaire
- Le Contexte de « Zig Zag » : De Shanghai Surprise à Cloud Nine
- « Zig Zag » : Un Pastiche de Jazz et une Évasion Sonore
- Une Collaboration avec Jeff Lynne : Un Partenariat Créatif
- Le Single « When We Was Fab » : Le Retour en Grâce de Harrison
- Le Pastiche Jazz et la Simplicité des Années 30
- L’Héritage de « Zig Zag » et de Cloud Nine
Le Contexte de « Zig Zag » : De Shanghai Surprise à Cloud Nine
L’histoire de « Zig Zag » commence dans un contexte plutôt cinématographique. En 1986, George Harrison était bien plus qu’un musicien en solo : il était également producteur de cinéma avec sa société HandMade Films, un projet qui fut un moyen pour lui de donner une forme aux œuvres artistiques qui l’inspiraient. En 1986, l’une des productions les plus notables de cette maison de production était Shanghai Surprise, un film de Jim Goddard mettant en vedette Sean Penn et Madonna. Si ce film ne fut pas particulièrement bien accueilli par la critique, il servit néanmoins de terrain fertile pour l’élaboration de la musique de Harrison.
« Zig Zag » naît de la nécessité de composer pour une scène de club dans ce film. Le cadre de cette scène était celui d’un nightclub des années 1930, un décor qui inspire Harrison à se lancer dans l’écriture d’un morceau à la fois décalé et rétro. Ainsi, « Zig Zag » prend racine dans un pastiche de l’ère du jazz des années 30. Mais au-delà de la simple reproduction d’une époque révolue, Harrison, avec son complice de longue date Jeff Lynne, parvient à insuffler une touche unique à ce morceau instrumental.
« Zig Zag » : Un Pastiche de Jazz et une Évasion Sonore
La première chose qui frappe à l’écoute de « Zig Zag » est son caractère étrange et envoûtant. La composition semble à la fois familière et décalée, comme un hommage aux années de gloire du jazz tout en étant en avance sur son temps. L’absence de paroles, la prédominance des solos de saxophone et de cornet, et la présence inhabituelle de la banjo de Harrison créent une atmosphère qui transporte instantanément l’auditeur dans une autre époque, tout en maintenant cette touche Harrisonienne, inimitable et pleine de nuances.
George Harrison explique lui-même que « Zig Zag » était en fait une réponse à un besoin cinématographique précis. Une fois la scène de nightclub posée dans le film Shanghai Surprise, il fallait une musique qui incarne à la fois la période des années 30 et l’ambiance particulière de cette scène. En plus de sa mélodie légère, « Zig Zag » se distingue par son absence de complexité lyrique, un choix délibéré qui renforce l’aspect instrumentale et atmosphérique du morceau. Le morceau est plutôt une aventure sonore, où chaque soliste, de l’instrument à vent à la guitare, semble naviguer à son propre rythme au sein du flot général.
Une Collaboration avec Jeff Lynne : Un Partenariat Créatif
Si « Zig Zag » est essentiellement un morceau instrumental, sa naissance est cependant le fruit d’une collaboration fructueuse entre George Harrison et Jeff Lynne, le producteur et compositeur qui allait plus tard jouer un rôle central dans l’album Cloud Nine. Cette synergie entre les deux artistes, qui avaient déjà travaillé ensemble sur le projet Traveling Wilburys, va au-delà de la simple composition musicale.
Lynne, avec sa maîtrise du son et sa capacité à tordre les styles musicaux pour les amener à de nouveaux horizons, ajoute sa touche à « Zig Zag ». Cette collaboration aboutit à une atmosphère sonore proche de l’hybridation entre le jazz classique et un certain style d’expérimentation qui marquera l’album Cloud Nine en 1987. Harrison, fidèle à son rôle d’explorateur, ne se contente pas d’imiter les sons d’une époque révolue. Il y injecte sa propre sensibilité, sa propre vision d’une époque musicale qu’il chérit et qu’il souhaite recréer à sa manière.
Le Single « When We Was Fab » : Le Retour en Grâce de Harrison
Sorti en novembre 1987, « When We Was Fab » est le single qui précède la sortie de Cloud Nine, un album qui marquera un tournant dans la carrière de Harrison. C’est aussi avec ce single que l’on retrouve « Zig Zag » en face B, une relation qui, bien que discrète, illustre les multiples facettes de l’artiste. « When We Was Fab » renvoie aux années Beatles et à la nostalgie des années 1960, tandis que « Zig Zag » s’évade vers un univers totalement différent, celui d’un jazz rétro et joyeux. Cette juxtaposition d’ambiances, de styles et de références est représentative de l’artiste dans toute sa diversité et sa volonté de ne jamais se laisser enfermer dans un genre musical particulier.
À l’époque, Harrison, après avoir traversé des périodes musicales plus introspectives avec des albums comme Somewhere in England (1981) et Gone Troppo (1982), revient en force avec Cloud Nine. Cet album, porté par la collaboration avec Jeff Lynne, rencontre un succès commercial et critique. Mais « Zig Zag » représente une petite incartade au sein de cet album, un clin d’œil aux influences multiples et à l’éclectisme caractéristique de Harrison.
Le Pastiche Jazz et la Simplicité des Années 30
Le charme de « Zig Zag » réside avant tout dans sa simplicité. Harrison, avec son équipe, ne cherche pas à offrir une reconstitution fidèle du jazz des années 30. Au contraire, il s’empare des éléments fondamentaux de ce genre pour les déformer et les tordre à sa manière. L’utilisation de la banjo, un instrument qui a toujours occupé une place particulière dans la musique folk et country, et le choix d’un orchestre jazz minimaliste, contrastent avec le son plus produit et électronique de Cloud Nine. Le morceau se veut ainsi un témoignage de la capacité de Harrison à naviguer entre les genres, tout en conservant sa propre signature sonore.
Dans le monde de Harrison, chaque chanson, chaque morceau possède une histoire et une intention. « Zig Zag » n’échappe pas à cette règle. Même si, en surface, il peut sembler léger, presque frivole, le morceau témoigne d’une quête permanente d’identité et de liberté créative. Il est, à bien des égards, une exploration de la nostalgie musicale, un moyen pour l’artiste de s’évader dans un passé lointain, tout en y apportant une touche de modernité.
L’Héritage de « Zig Zag » et de Cloud Nine
« Zig Zag » ne se contenta pas de figurer en face B d’un single. Sa création, sa gestation dans l’univers de Shanghai Surprise, et son inclusion dans l’album Cloud Nine, font de ce morceau une pierre angulaire dans la carrière de Harrison à la fin des années 80. Il illustre son désir de continuer à se renouveler, d’explorer de nouveaux genres et de renouer avec ses racines musicales, tout en explorant des terrains encore inédits pour lui. Si le monde du jazz des années 30 semble loin du rock psychédélique des années 60, Harrison parvient à combiner ces influences pour créer un mélange unique, qui est le fruit de sa propre vision artistique.
« Zig Zag », en dépit de son statut de b-side, incarne à la perfection l’esprit d’un artiste qui, tout au long de sa carrière, n’a jamais cessé de chercher, de questionner et de réinventer la musique. C’est là toute la magie de George Harrison, un musicien dont la carrière, aussi diverse soit-elle, continue d’inspirer et de toucher les générations futures.
