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Quand McCartney rêvait de Nirvana : la rencontre explosive

Publié le 12 octobre 2025 par John Lenmac @yellowsubnet

Paul McCartney a surpris en révélant que s’il devait rejoindre un groupe des années 1990, ce serait Nirvana. Ce choix témoigne d’une affinité profonde avec l’énergie brute et mélodique du groupe grunge, en résonance avec l’approche musicale des Beatles. Leur collaboration sur « Cut Me Some Slack » illustre une vraie fusion artistique entre deux époques du rock, marquée par des performances inoubliables et une reconnaissance aux Grammy Awards.


Il y a des aveux qui en disent long, moins sur l’objet du désir que sur celui qui parle. Lorsqu’on a demandé à Paul McCartney quel groupe des années 1990 il aurait aimé rejoindre, l’ancien Beatle n’a pas cité une formation britpop, ni un héritier direct de la pop mélodique qu’il a contribué à inventer. Il a répondu « It would’ve been Nirvana, but no longer » – autrement dit : Nirvana, mais ce n’est plus possible. Une formule à la fois simple et lourde de sens, qui relie deux époques et deux façons de bousculer le rock : les années 1960 des Beatles, et la vague grunge au tournant des années 1990.

Que McCartney cite Nirvana ne relève pas du clin d’œil. Derrière la punchline, il y a une intuition : les deux groupes ont en commun d’avoir su convertir une poésie instinctive en chansons massives, capables de traverser les frontières et les décennies. Des mélodies qui restent la journée dans la tête et des arrangements qui, sur scène, cognent au plexus. Les Beatles ont transfiguré la culture pop avec l’audace du studio et l’invention formelle ; Nirvana a, en un éclair, réinventé la rugosité et la sincérité du rock alternatif pour un public de masse. Entre ces deux pôles, McCartney repère une parenté : l’appel du risque, la quête d’une émotion immédiate.

Et il y a une autre raison, plus intime : McCartney a toujours aimé confronter sa mélodie au bruit, faire se frotter l’orfèvrerie harmonique et la pulsation brute. Des titres comme Helter Skelter ou I’m Down ne sont pas des accidents dans son œuvre ; ils disent un plaisir à pousser les amplis, à exploiter le grain de la voix, à jouer avec la distorsion. À ce titre, Nirvana n’est pas un contre‑emploi ; c’est un miroir qui renvoie à McCartney une part souvent minorée de lui‑même.

Sommaire

  • Des racines à l’ambition
  • « It would’ve been Nirvana » : ce que McCartney dit… et ne dit pas
  • Pourquoi Nirvana ?
  • La rencontre Sound City : une jam qui bascule dans l’histoire
  • 12‑12‑12, Madison Square Garden : une phrase, une première : une phrase, une première
  • De Cut Me Some Slack aux Grammy : la consécration d’un pont
  • Seattle, 2013 : « Sirvana » à domicile
  • Après Nirvana : la complicité McCartney / Foo Fighters : la complicité McCartney / Foo Fighters
  • « The penny finally dropped » : une phrase, une méthode
  • Nirvana et les Beatles : parentés et différences
  • Les années 1990 vues par McCartney : l’écho d’une décennie
  • Ce que ce choix dit de McCartney en 2025
  • Un héritage partagé, sans nostalgie
  • Conclusion : une évidence tardive, un fil tendu : une évidence tardive, un fil tendu

Des racines à l’ambition

Avant d’être l’auteur de Yesterday, Hey Jude ou Band on the Run, McCartney est un adolescent de Liverpool qui pianote seul, puis un jeune guitariste intégré à The Quarrymen, la bande de John Lennon. Les répétitions de quartier deviennent un laboratoire d’écriture. À mesure que la notoriété grimpe, McCartney s’impose comme une force mélodique, mais aussi comme un artisan inlassable : harmonies peaufinées, ponts trouvés à la dernière minute, basse Höfner au phrasé chantant, gaieté et mélancolie entremêlées.

On le sait : la signature Lennon–McCartney recouvre des pratiques d’écriture souvent séparées, mises en commun au moment de l’arrangement final. McCartney, lui, n’a jamais cessé de travailler seul, d’enregistrer parfois la quasi‑totalité des instruments, puis d’ouvrir la porte aux collaborations. Ce tropisme explique sa curiosité pour des partenaires inattendus : un duo avec George Michael au milieu des années 2000, des sessions avec Kanye West et Rihanna au milieu des années 2010, et, surtout, cette rencontre fulgurante avec les survivants de Nirvana au début des années 2010.

« It would’ve been Nirvana » : ce que McCartney dit… et ne dit pas

La petite phrase, lâchée lors d’un entretien radio avec l’animateur Chris Evans, a beaucoup circulé parce qu’elle condense une préférence et une honnêteté. Elle dit l’admiration pour un groupe qui a changé la donne au début des années 1990, mais aussi la lucidité : Nirvana n’existe plus en tant que tel, et la magie de cette triangulationCobain, Novoselic, Grohl – ne se reconstitue pas. Elle ne prétend pas réécrire l’histoire. Elle balise un imaginaire : si une fenêtre s’était ouverte, c’est là que McCartney aurait voulu se glisser.

Cette réponse éclaire aussi la manière dont McCartney se situe dans la cartographie des années 1990. Plutôt que de choisir un courant très britannique (la britpop), il salue un séisme américain. Pas un simple goût personnel : un diagnostic esthétique. C’est bien Nirvana qui, au cœur d’une décennie saturée d’images, a rappelé que le rock pouvait tout reprendre à zéro avec peu de choses : un riff, une batterie, une voix.

Pourquoi Nirvana ?

Si McCartney pointe Nirvana, ce n’est pas pour le mythe de Kurt Cobain seul, ni par goût de la provocation. C’est parce que le groupe de Seattle a réussi la greffe rare entre l’accroche mélodique – parfois d’une pureté presque pop – et la rudesse sonore qui défie les radios. Smells Like Teen Spirit, Come as You Are, Lithium : chaque titre joue ce grand écart entre la comptine mémorisable et la déflagration électrique. C’est précisément le type de tension que McCartney traque depuis les Beatles : faire tenir l’expérimentation dans un format populaire, et l’inverse.

Il y a aussi, chez Nirvana, un goût de l’évidence immédiate – ces refrains qu’on reconnaît dès la première écoute – et une manière d’oser des ruptures sans perdre le fil. Tout cela parle au compositeur de Penny Lane comme à l’auteur de Helter Skelter. En filigrane, c’est une certaine idée de la chanson qui se joue : une structure claire, une intensité franche, une émotion brute.

La rencontre Sound City : une jam qui bascule dans l’histoire

L’étincelle, on la connaît : au printemps 2012, Dave Grohl invite Paul McCartney à passer au Studio 606 pour une session filmée dans le cadre de son documentaire Sound City. Le film rend hommage au mythique Sound City Studios de Van Nuys, à son légendaire console Neve 8028, et à la philosophie analogique qui a façonné tant de disques – dont Nevermind de Nirvana. Grohl y convoque des musiciens de générations différentes pour écrire et enregistrer, face caméra, des chansons originales.

Ce jour‑là, à la basse, Krist Novoselic. À la guitare, Pat Smear. À la batterie, Grohl. Butch Vig à la production. McCartney attrape une cigar box guitar, lance un motif, les autres s’agrippent : en trois heures, une ébauche solide devient une chanson complète, Cut Me Some Slack. Le morceau n’est ni pastiche des Beatles, ni imitation de Nirvana : c’est un riff primal, une voix qui grésille sur la limite, une rythmique qui écrase et relance, une énergie frontale où la mélodie – réflexe maccartnien – trouve tout de même la fente pour passer.

Dans les minutes qui suivent, tout le monde comprend que quelque chose a pris. Novoselic parle en riant de « Sirvana » pour nommer ce drôle d’hybride. McCartney, lui, dira plus tard qu’il a eu la sensation physique de voir la pièce tomber : le moment où l’expérience cesse d’être une simple rencontre de prestige pour devenir un groupe – provisoire, mais réel – en train d’écrire un titre.

12‑12‑12, Madison Square Garden : une phrase, une première : une phrase, une première

Le 12 décembre 2012, la scène du Madison Square Garden à New York accueille le Concert for Sandy Relief. McCartney y joue un set généreux, entouré d’un plateau vertigineux. Au milieu, il appelle Grohl, Novoselic et Smear. Avant de lancer la musique, il raconte leur jam récente et lâche cette phrase devenue célèbre : « The penny finally dropped, I finally understood I was in the middle of a Nirvana reunion ». Puis Cut Me Some Slack éclate devant des millions de spectateurs. Ce n’est pas Nirvana – l’absence de Cobain est irréductible – mais c’est un choc : le grain de voix de McCartney sur une charpente grunge, la densité de la section rythmique, la rage tenue des guitares.

Deux jours plus tard, le quatuor rejoue la pièce sur Saturday Night Live. Le titre est mis en ligne, puis intégré à la bande originale du film Sound City : Real to Reel. La presse découvre un McCartney qui rugit au lieu de cajoler, et l’osmose inattendue avec le noyau Nirvana. Le public entérine. En quelques semaines, Cut Me Some Slack quitte le statut d’expérience pour devenir un jalon.

De Cut Me Some Slack aux Grammy : la consécration d’un pont

Le morceau poursuit sa vie en 2013 et 2014. La reconnaissance formelle ne tarde pas : Best Rock Song aux Grammy Awards de 2014 pour McCartney, Grohl, Novoselic et Smear. Le symbole est fort.

D’un côté, un compositeur venu de la matrice Beatles, architecte de ballades immortelles autant que d’hymnes musclés. De l’autre, trois musiciens porteurs d’un héritage grunge qui a reconfiguré les années 1990. Ensemble, ils forment un pont entre les continents du rock. Cut Me Some Slack n’est pas seulement un titre réussi ; c’est une démonstration : les codes esthétiques peuvent se frôler, s’emmêler, sans se neutraliser.

Seattle, 2013 : « Sirvana » à domicile

Le 19 juillet 2013, au Safeco Field de Seattle, McCartney fait monter Grohl, Novoselic et Smear pour un long final. Cut Me Some Slack sert de sas avant un enchaînement de classiques : Get Back, Long Tall Sally, Helter Skelter, puis la séquence Golden Slumbers / Carry That Weight / The End. Le clin d’œil est lourd d’histoire : dans la ville de Nirvana, les trois anciens compagnons de Cobain épaulent un Beatle sur son terrain. Là encore, la greffe prend parce que personne ne joue contre sa nature : McCartney reste un mélodiste qui attaque, Grohl un batteur façonné par la tension, Novoselic un bassiste vaste et profond, Smear un guitariste qui densifie sans bavarder.

Quelques mois plus tôt, le quatuor a fait une halte par Saturday Night Live pour donner une seconde vie télévisée à Cut Me Some Slack. À chaque fois, la dynamique reste la même : une écriture sommaire volontairement, un son massif, et cette ligne de chant de McCartney qui mord dans la tonalité grave.

Après Nirvana : la complicité McCartney / Foo Fighters : la complicité McCartney / Foo Fighters

Le courant ne s’est pas tari après Sound City. En 2017, McCartney passe en studio avec les Foo Fighters. Il ne vient pas avec une basse, mais avec un instinct : il s’assoit derrière une batterie et pose, en deux prises, la pulsation de Sunday Rain, titre figurant sur Concrete and Gold. La chanson est chantée par Taylor Hawkins, et McCartney y bâtit une marche souple, presque beatlesienne par ses appuis, qui laisse respirer les guitares et la voix. L’anecdote est devenue célèbre : Grohl lui montre rapidement le morceau à l’acoustique, McCartney en saisit l’ossature et enregistre sans filet, avec ce sens du tempo chantant qui a toujours fait la singularité de sa basse… ou de sa batterie depuis Back in the U.S.S.R..

Cette entente dépasse le studio. On retrouve Grohl et McCartney à plusieurs étapes marquantes des années 2010 et 2020 : un « Get Back » partagé lors de l’entrée des Foo Fighters au Rock & Roll Hall of Fame en 2021 ; une apparition commune à Glastonbury en 2022 où Grohl rejoint McCartney pour I Saw Her Standing There et Band on the Run ; un hommage appuyé à Taylor Hawkins lors du Taylor Hawkins Tribute Concert à Wembley en 2022, où McCartney interprète Oh! Darling avec Chrissie Hynde puis Helter Skelter, entouré de membres des Foo Fighters.

Au fil de ces rencontres, une chose s’impose : la connivence. Elle n’a pas besoin d’être soulignée par des déclarations lyriques. Elle s’entend dans les réglages de plateau, dans la manière de laisser de l’espace à l’autre, dans le respect de l’économie des arrangements. McCartney n’a rien à prouver ; Grohl non plus. Ils se reconnaissent dans une même éthique de groupe : le sens de la chanson d’abord, le jeu collectif ensuite.

« The penny finally dropped » : une phrase, une méthode

Si la phrase a marqué, c’est qu’elle condense une manière de faire. McCartney n’a pas abordé la session Sound City comme une collaboration de prestige, mais comme une jam : une idée jetée, reprise, resserrée, jusqu’à ce que la structure apparaisse. C’est ce qu’il appelle la pièce qui tombe : le moment où l’oreille n’est plus en train de chercher, mais de reconnaître.

On a parfois glosé sur une autre phrase attribuée à McCartney au sujet de la première jam – il aurait dit ne pas avoir réalisé immédiatement qu’il jouait avec Nirvana, avant qu’on ne lui souffle : « You’re Kurt. That’s Nirvana. » Qu’on y voie un trait d’humour ou la vérité d’un instant, cela en dit long sur l’intensité de la séance : on ne compare pas des cartes de visite, on joue, et la musique tranche.

Avec Nirvana, cette reconnaissance a pris la forme d’un terrain commun : une pulsation carrée, un riff qui coupe l’air, une voix qui mord. Cut Me Some Slack n’essaie pas d’être Nirvana sans Cobain, ni un Beatles en plus fort ; il embrasse un milieu où chacun se retrouve. La force de la session, c’est ce consensus sonore sans compromis esthétique : les timbres sont crus, la batterie cogne, la basse pousse, les guitares creusent, et pourtant la ligne demeure.

Nirvana et les Beatles : parentés et différences

On a souvent commenté les ponts entre les deux mondes. Cobain aimait les mélodies simples et les refrains qui accrochent, mais il les dressait contre des couplets sombres, des ponts hurlés, un son abrasif. McCartney a, lui, longtemps privilégié la clarté harmonique et la souplesse du phrasé, sans craindre les déflagrations quand il le fallait – Helter Skelter, encore, en atteste. La parenté est donc moins une ressemblance qu’un désir commun : écrire des chansons populaires qui n’abandonnent pas l’avant‑garde, et inversement.

La différence majeure reste la temporalité. Les Beatles ont eu le temps de bâtir une œuvre, d’enregistrer, d’expérimenter, de se réinventer du Merseybeat au psychédélisme, jusqu’à la précision de Abbey Road. Nirvana, lui, n’a laissé que trois albums studio et une légende faite de ruptures. C’est peut‑être pour cela que le choix de McCartney touche juste : il désigne une énergie plus qu’un répertoire, une attitude plus qu’un style.

Les années 1990 vues par McCartney : l’écho d’une décennie

Pour qui a façonné les sixties, les années 1990 peuvent sembler un autre monde. Pourtant, McCartney y a vu se rejouer des questions familières : comment réinventer la chanson guitare‑basse‑batterie ? Comment faire cohabiter la fragilité et la puissance ? Nirvana y répond par la tension : des couplets presque chuchotés, des refrains qui explosent, des ponts qui vacillent. On entend là une logique que McCartney connaît intimement, lui qui a souvent pensé la chanson comme une dramaturgie miniaturisée – contrastes, relances, catharsis.

Dans ce cadre, la tentation Nirvana ne dit pas l’envie d’endosser une autre identité, mais le désir de se frotter à une école du son. La saturation de guitares, la sécheresse de la batterie, l’âpreté volontaire des prises : autant d’éléments qui, loin d’annuler la mélodie, la mettent au défi. C’est ce défi qui semble aimanter McCartney.

Ce que ce choix dit de McCartney en 2025

McCartney en 2025

On pourrait croire qu’à 80 ans passés, McCartney se contenterait d’entretenir le patrimoine. Or son parcours des quinze dernières années raconte autre chose : l’attrait pour les contextes qui le déstabilisent juste ce qu’il faut. Travailler avec Grohl et les ex-Nirvana, c’était accepter une granularité vocale plus rugueuse, un cadre rythmique plus lourd, un mix plus épais. McCartney ne cherche pas à le lisser ; il s’y installe, avec la précision d’un artisan qui sait où poser la note qui va tenir l’ensemble.

Son goût des collaborations ne se résume pas à des alliances de prestige. Qu’il chante Heal the Pain avec George Michael ou qu’il co‑écrive avec Kanye West et Rihanna FourFiveSeconds, McCartney s’embarque dans des écosystèmes musicaux aux règles différentes et s’y rend utile : un pont d’accords, une harmonie de basse, une idée de découpe rythmique. L’épisode Nirvana s’inscrit exactement dans ce mouvement : un musicien qui, plutôt que de protéger son héritage, le met en jeu.

On y ajoutera un trait de caractère souvent passé sous silence : une discipline de travail intacte. Qu’on le voie arriver en studio pour Sunday Rain et enregistrer, en deux prises, une partie de batterie qui tient la chanson, ou qu’on l’observe superviser la mise en place d’un final monumental comme The End avec les membres des Foo Fighters, on retrouve la même exigence : aller vite vers l’essentiel sans sacrifier la précision.

Un héritage partagé, sans nostalgie

Il serait facile de lire ces rencontres à travers la seule nostalgie. Ce serait passer à côté de leur fonction : produire des chansons et des moments qui existent par eux‑mêmes. Cut Me Some Slack tient la route parce qu’il a sa propre logique ; la version de Get Back jouée au Rock & Roll Hall of Fame en 2021 avec les Foo Fighters fonctionne parce qu’elle embrasse le présent sonore du groupe autant qu’elle honore le passé des Beatles. Le Glastonbury 2022, où Grohl vient épauler McCartney, n’est pas un musée en plein air ; c’est une scène où des musiciens mesurent leur joie de jouer ensemble, au‑delà des calendriers.

La réaction publique au rapprochement avec Nirvana a parfois été contrastée – certains y ont vu une trahison symbolique, d’autres un geste de vie. Mais le temps a clarifié les choses : ce qui demeure, ce sont les performances et l’écriture, pas les querelles sémantiques. Et si des voix – y compris au sein de l’entourage de Cobain – ont exprimé leur réticence, l’histoire a retenu la musique.

Car ce qui relie toutes ces étapes, de Sound City à Wembley, c’est une fidélité à l’idée de groupe : quatre ou cinq personnes dans une pièce, des instruments, peu d’effets, beaucoup d’écoute. Le reste – l’aura, les hiérarchies, les débats d’héritage – s’efface devant la matière sonore. Là, McCartney et les ex‑Nirvana parlent la même langue.

Conclusion : une évidence tardive, un fil tendu : une évidence tardive, un fil tendu

« The penny finally dropped » : cette phrase, prononcée par Paul McCartney avant d’attaquer Cut Me Some Slack au Madison Square Garden, résonne comme un aveu et un programme. L’aveu : il a fallu un moment pour percevoir l’évidence, cette parenté entre des mondes qu’on croyait éloignés. Le programme : continuer à tendre des fils entre les esthétiques, à chercher l’étincelle qui fait d’un riff une chanson, d’une jam une œuvre.

En ce sens, le souhait de rejoindre Nirvana n’est pas un regret ; c’est la formulation d’un désir qui, d’une certaine manière, s’est réalisé. McCartney n’a pas intégré Nirvana – ce serait un contresens – mais il a partagé avec ses membres un lieu musical où chacun pouvait être soi, et quelque chose de neuf pouvait naître. La salle, les amplis, la batterie, la basse, les guitares : tout ce qui fait la matérialité du rock. Et, au centre, cette ligne mélodique qui, décidément, ne l’a jamais quitté.

Au bout du compte, voilà ce que révèle cette histoire : la curiosité de Paul McCartney n’est pas un supplément d’âme, c’est son moteur. Elle l’a mené de Liverpool à Seattle, des Quarrymen aux Foo Fighters, de Penny Lane à Cut Me Some Slack, de l’harmonie à la distorsion. Et si la pièce continue de tomber, c’est peut-être parce que la machine, elle, ne s’est jamais arrêtée.


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