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Mind Games : quand John Lennon dépasse les slogans pour la paix

Publié le 19 octobre 2025 par John Lenmac @yellowsubnet

Mind Games est une chanson emblématique de John Lennon sortie en 1973. Initialement intitulée Make Love Not War, elle incarne son désir d’un monde meilleur tout en évitant les slogans trop simplistes. Ce morceau marque une transition entre son engagement politique frontal et une approche plus poétique de son message pacifiste, prouvant que Lennon savait allier mélodie et réflexion profonde.


Parmi les nombreux talents de John Lennon, son aptitude à jongler avec les mots est sans doute l’un des plus fascinants. Avec Paul McCartney, il formait un duo de composition où l’équilibre entre spontanité et rigueur créative était essentiel. Même dans les moments les plus expérimentaux, il veillait à ce que les paroles de ses chansons aient un sens particulier, une texture poétique qui transcendait la simplicité apparente de la musique pop. Mais si Lennon pouvait se montrer visionnaire, il était aussi son propre critique le plus sévère.

Dans les années 1960, les Beatles ont souvent été perçus comme les porte-étendards d’un idéalisme fleur bleue, prêchant la paix et l’amour universel. Pourtant, à l’aube des années 1970, Lennon lui-même a commencé à ressentir une certaine lassitude face à ces slogans qui, selon lui, étaient devenus des lieux communs. Lorsqu’il composaitMind Games, l’une des chansons emblématiques de son album du même nom sorti en 1973, il avait initialement envisagé de l’intituler« Make Love Not War ». Mais très vite, il s’est rendu compte que cette phrase était trop galvaudée pour être utilisée de manière sérieuse.

Une idée revisitée pour éviter le cliché

Lennon déclarera plus tard :« C’était trop cliché, on ne pouvait plus dire ça, alors j’ai écrit quelque chose de plus obscur, mais c’est la même histoire. »Une manière pour lui de détourner une idée simple en une vision plus subtile et nuancée.Mind Gamesdemeure donc un hymne à l’amour et à la paix, mais exprimé d’une façon plus introspective, moins directe que ne l’aurait été un simple slogan.

Cette démarche en dit long sur l’évolution de Lennon en tant qu’auteur-compositeur. Lui qui avait été un temps un fervent militant politique avec des morceaux commePower to the People, s’éloignait progressivement des discours frontalement engagés pour retourner vers une forme de lyrisme plus abstrait. Il ressentait sans doute une frustration face à la récupération des valeurs de la contre-culture, voyant comment les idéaux des années 1960 étaient désormais tournés en dérision par une société en pleine mutation.

Un Lennon tiraillé entre engagement et musique

Cette période de la carrière de Lennon est intéressante car elle montre un artiste oscillant entre sa volonté de changer le monde et son amour pour la pure mélodie. Son albumSome Time in New York City, sorti en 1972, en est un parfait exemple. Il y adopte une approche quasi journalistique, où les chansons ressemblent davantage à des manifestes politiques qu’à des morceaux de musique pop traditionnelle. Mais le résultat est mitigé : la musique y semble reléguée au second plan, éclipsée par des messages parfois trop didactiques.

C’est pourquoiMind Gamesmarque un retour à une forme plus accessible. Avec des morceaux commeOut of the Blue, Lennon renoue avec les ballades intemporelles qui ont fait sa renommée, tout en conservant cette sensibilité qui l’a toujours distingué. Bien que l’album n’ait pas eu le même impact queImagineouPlastic Ono Band, il reflète parfaitement où en était Lennon à cette époque : un homme désireux de partager ses idéaux, mais fatigué de voir ces idéaux réduits à des slogans creux.

« Imagine » et « Mind Games » : une même quête sous des formes différentes

Là oùImagines’impose comme un manifeste universel d’espoir et de rêve collectif,Mind Gamesprésente une approche plus intime et psychologique. Le message reste pourtant le même : celui d’un monde meilleur fondé sur l’amour et la compréhension mutuelle. Lennon avait compris que les mots seuls ne suffisaient pas à changer les mentalités. Il fallait que ces mots soient portés par une véritable émotion, par une mélodie qui puisse toucher les cœurs avant les esprits.

En définitive, si Lennon a jugé que« Make Love Not War »était trop cliché pour être utilisé, ce n’est pas tant par rejet de cette idée que par souci d’efficacité. En modifiant son approche, en enveloppant son message d’une poésie plus mystérieuse, il a su garder intacte la force de son propos. Un demi-siècle plus tard,Mind Gamesrésonne encore comme un écho de cette utopie que Lennon n’a jamais cessé de poursuivre.


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