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John Lennon et « Bony Moronie » : Un hommage rock ‘n’ roll sous le signe de Phil Spector

Publié le 11 novembre 2025 par John Lenmac @yellowsubnet

En 1975, John Lennon sort Rock ‘N’ Roll, un album qui marque un retour aux sources pour l’ancien Beatle, rendant hommage aux pionniers de la musique qui l’ont influencé. Parmi les titres choisis, on retrouve « Bony Moronie », une chanson énergique de Larry Williams qui, sous la houlette du producteur Phil Spector, prend une tournure radicalement différente de l’originale.

Sommaire

« Bony Moronie » : Un classique du rock ‘n’ roll revisité

Écrite et enregistrée en 1957 par Larry Williams, « Bony Moronie » est une chanson emblématique de l’ère du rock ‘n’ roll naissant. Avec son rythme entraînant et son texte léger décrivant une relation amoureuse avec une jeune femme surnommée « Bony Moronie », le titre se hisse à la 14e place du classement américain et atteint la 12e position au Royaume-Uni. Williams, qui a également signé des morceaux incontournables comme « Dizzy Miss Lizzy » et « Slow Down », a marqué l’histoire avec ce morceau qui sera repris par de nombreux artistes, notamment John Lennon.

Pour Lennon, « Bony Moronie » ne se limite pas à un simple hommage musical. En 1975, il explique dans une interview que la chanson fait partie de ses souvenirs d’enfance les plus marquants :

« ‘Bony Moronie’ était l’une des toutes premières chansons – avec ‘Be-Bop-A-Lula’ – et je me souviens de l’avoir chantée la seule fois où ma mère m’a vu sur scène avant de mourir. J’étais donc très attaché à ‘Bony Moronie’. C’est l’une des raisons qui m’ont poussé à la reprendre. J’aimais aussi Larry Williams, qui l’avait enregistrée. »

Ce lien personnel ajoute une dimension émotionnelle à cette reprise, qui s’inscrit dans un projet global visant à revisiter les classiques du rock ‘n’ roll qui ont façonné le musicien britannique.

Une production marquée par le style de Phil Spector

L’album Rock ‘N’ Roll est en partie produit par Phil Spector, l’architecte du célèbre « Wall of Sound ». Cette approche, caractérisée par une superposition dense des instruments et une réverbération prononcée, transforme « Bony Moronie » en une version plus lente et plus lourde que l’originale. Contrairement à la version enjouée et dynamique de Larry Williams, celle de Lennon adopte une rythmique plus pesante et une orchestration foisonnante, conférant au morceau une atmosphère nostalgique et puissante.

L’enregistrement de l’album, toutefois, ne se déroule pas sans heurts. Spector, réputé pour son comportement imprévisible, disparaît subitement avec les bandes de travail, laissant Lennon dans l’incertitude quant à l’avenir du projet. Finalement, les enregistrements sont récupérés et finalisés, permettant la sortie de l’album en février 1975.

Une équipe de musiciens de renom

Pour donner vie à sa version de « Bony Moronie », Lennon s’entoure d’un impressionnant panel de musiciens. Outre lui-même au chant et à la guitare électrique, on retrouve une brochette de guitaristes parmi lesquels Jesse Ed Davis, Steve Cropper et même José Feliciano. La section rythmique est assurée par des bassistes de talent tels que Bob Glaub et Ray Neapolitan, tandis que Jim Keltner, Hal Blaine et d’autres se partagent les parties de batterie. Les claviers sont confiés à des musiciens d’envergure, notamment Mac Rebennack (alias Dr. John) et Leon Russell, tandis qu’une section de cuivres imposante, incluant Bobby Keys et Plas Johnson, renforce l’aspect grandiose de la production.

Ce foisonnement instrumental s’accorde parfaitement avec l’approche sonore de Spector, conférant au morceau une ampleur digne des grandes productions de l’époque.

Une anecdote technique qui aurait pu tout compromettre

L’histoire de l’enregistrement de « Bony Moronie » est aussi marquée par un incident technique qui aurait pu compromettre la sortie de l’album. Un ingénieur du son junior commet une erreur en étirant une bande de « Bony Moronie » lors d’un mixage, déformant ainsi l’enregistrement. Heureusement, il ne s’agissait que d’un mix provisoire et non de la bande multipistes originale, permettant ainsi à la chanson d’être récupérée et intégrée à l’album final.

Rock ‘N’ Roll : un dernier regard vers le passé

La sortie de Rock ‘N’ Roll en 1975 marque un tournant dans la carrière de John Lennon. Cet album est à la fois un hommage à ses racines musicales et un adieu temporaire à la scène musicale. Peu après sa sortie, Lennon décide en effet de se retirer de la vie publique pour se consacrer à sa famille et à l’éducation de son fils Sean. Il faudra attendre 1980 et Double Fantasy pour le voir revenir avec de nouvelles compositions.

Dans ce contexte, « Bony Moronie » et les autres reprises de l’album prennent une signification particulière. Elles témoignent non seulement de l’amour indéfectible de Lennon pour le rock ‘n’ roll des années 1950, mais aussi d’un besoin de boucler la boucle avant de s’accorder un temps de recul.

L’héritage de « Bony Moronie » dans l’univers de Lennon

Si « Bony Moronie » n’est pas la chanson la plus emblématique de l’album Rock ‘N’ Roll, elle illustre néanmoins parfaitement la démarche de Lennon. En ralentissant le tempo et en conférant au morceau une densité sonore inédite, il ne se contente pas d’une simple reprise, mais propose une réinterprétation qui porte sa propre empreinte artistique. De plus, l’attachement personnel du musicien à ce titre en fait une pièce à part dans son répertoire, renforçant l’émotion qui traverse l’ensemble de l’album.

Aujourd’hui encore, la version de Lennon de « Bony Moronie » demeure un témoignage fascinant de son amour pour le rock ‘n’ roll et de sa capacité à revisiter des classiques tout en leur insufflant une nouvelle vie. Elle s’inscrit ainsi comme un chapitre important de son héritage musical, témoignant de son indéfectible passion pour les racines du rock.


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