Lors d’un concert d’Elton John en 1975, Ringo Starr quitte la salle après trois chansons, déçu par le choix de l’artiste de ne jouer que son nouvel album Captain Fantastic and the Brown Dirt Cowboy. Un moment marquant qui illustre les attentes du public face à l’innovation musicale.
Dans le monde du rock, la diplomatie est souvent de mise. Lorsqu’un artiste traverse une mauvaise passe ou peine à offrir une performance à la hauteur des attentes, ses pairs savent généralement faire preuve d’empathie. Après tout, chacun a connu des soirées plus difficiles, des doutes ou des concerts qui ne se sont pas déroulés comme prévu. Pourtant, même dans un univers où la solidarité entre musiciens est souvent présente, il arrive que certaines expériences soient trop décevantes pour être endurées jusqu’au bout. C’est ainsi que Ringo Starr, batteur légendaire des Beatles, s’est retrouvé à quitter un concert d’Elton John après seulement trois morceaux, déconcerté par le choix artistique du pianiste britannique.
Sommaire
- Ringo Starr, une icône libre de ses choix
- Elton John et la volonté d’innover
- Une attente déçue
- Une anecdote qui traverse les années
Ringo Starr, une icône libre de ses choix
En tant que l’un des quatre Beatles, Ringo Starr n’avait plus rien à prouver dès la fin des années 1960. Bien que le groupe se soit séparé dans des circonstances parfois tendues, Starr fut l’un des premiers à rebondir avec succès, enchaînant des titres solo acclamés comme It Don’t Come Easy ou Photograph. Son style bon enfant et son sens inné du groove lui ont permis de s’attirer la sympathie du public et de ses pairs, qui appréciaient chez lui cette capacité à insuffler une atmosphère chaleureuse à ses morceaux.
Si son succès solo a été nourri par sa personnalité attachante, il ne faut pas oublier que nombre de ses titres les plus emblématiques doivent beaucoup à la contribution de ses amis musiciens. Des artistes comme Harry Nilsson ou encore ses anciens compagnons des Beatles ont souvent été de la partie pour enrichir ses albums. Ainsi, même si Starr possédait une présence incontestable, il restait un artiste qui comptait sur la magie collective pour transcender ses compositions.
Elton John et la volonté d’innover
Dans les années 1970, Elton John était une des figures musicales les plus influentes. Son talent au piano, sa voix singulière et sa propension à créer des hymnes intemporels lui avaient permis de se tailler une place de choix parmi les plus grands. Il n’hésitait pas à collaborer avec les figures majeures de l’industrie, notamment John Lennon et Ringo Starr lui-même.
Cependant, à trop vouloir se démarquer, il lui arrivait parfois de prendre des risques qui ne faisaient pas l’unanimité. Lors du lancement de son album Captain Fantastic and the Brown Dirt Cowboy, John a pris une décision audacieuse : jouer l’album dans son intégralité dès le début de sa tournée, avant même que le public ne le connaisse. L’intention était louable, car Captain Fantastic était un projet ambitieux, racontant de manière quasi autobiographique les débuts difficiles de John et de son parolier Bernie Taupin. Pourtant, la stratégie s’est avérée risquée.
Une attente déçue
Lors de ce fameux concert auquel assistait Ringo Starr, Elton John démarre en annonçant qu’il jouerait uniquement les titres de son nouvel album. Ce choix surprend une partie du public, qui s’attend à entendre les tubes habituels comme Rocket Man, Your Song ou Candle in the Wind. Si certains spectateurs sont prêts à se laisser porter par la nouveauté, d’autres sont moins enclins à cette expérience. Parmi eux, Ringo Starr et la mère d’Elton John elle-même, qui décident de quitter la salle après trois morceaux. Plus tard, Starr confiera : « Il est arrivé et a dit : ‘Je vais juste jouer le nouvel album.’ Sa mère et moi sommes partis après trois chansons, parce que nous ne les connaissions pas. »
Cet aveu en dit long sur la manière dont certains artistes perçoivent la musique en concert. Starr, à l’instar d’un public classique, apprécie d’entendre des morceaux familiers, ceux qui résonnent avec ses souvenirs et ses émotions. Une approche que beaucoup d’artistes adoptent encore aujourd’hui, conscients qu’un concert est aussi un moment de communion avec une audience qui attend des repères.
Une anecdote qui traverse les années
Avec le recul, cette histoire prête à sourire. L’album Captain Fantastic and the Brown Dirt Cowboy est aujourd’hui reconnu comme l’un des grands classiques de la discographie d’Elton John, et il semble presque inconcevable qu’un public ait pu bouder un tel récital. Pourtant, ce qui paraît évident des années plus tard ne l’est pas nécessairement sur le moment.
Elton John, visionnaire et passionné, voulait faire découvrir son nouvel opus dans sa totalité, une démarche artistique qui demandait un effort de la part du public. De son côté, Ringo Starr, musicien au parcours exceptionnel, s’attendait à une soirée festive ponctuée des plus grands succès d’Elton. L’incompréhension était donc inévitable.
Ce genre d’épisode rappelle à quel point l’attente d’un concert varie d’un spectateur à l’autre. Certains viennent pour découvrir, d’autres pour revivre des émotions passées. Et si aujourd’hui, personne ne songerait à quitter la salle en entendant Someone Saved My Life Tonight, cette soirée-là, Ringo Starr et la mère d’Elton John ont préféré prendre la porte, faute d’accroche avec ce qui se jouait sur scène.
