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L’évolution de John Lennon : De ‘It’s Only Love’ à ‘Strawberry Fields Forever’

Publié le 19 novembre 2025 par John Lenmac @yellowsubnet

En 1964, les Beatles rencontrent Bob Dylan, changeant à jamais leur vision de la musique. Cette rencontre marque le début de la transformation de leur son, de l’innocence pop à la complexité psychédélique, particulièrement chez John Lennon. Un exemple marquant est le titre ‘It’s Only Love’, issu de l’album Help! en 1965. Lennon, insatisfait du résultat, déclare plus tard détester cette chanson, la jugeant médiocre. Néanmoins, cette chanson représente un jalon dans l’évolution musicale du groupe.


En 1964, les Beatles font une rencontre déterminante : celle de Bob Dylan. En une seule soirée, le regard du groupe sur la musique bascule. Dylan leur montre qu’il est possible d’aller plus loin, que la pop n’a pas besoin de se contenter de refrains accrocheurs et de romances adolescentes. Cette prise de conscience, qui se manifeste particulièrement chez John Lennon, amorce une révolution. Moins de deux ans plus tard, l’innocence juvénile des premiers tubes cède la place à la complexité psychédélique de Revolver (1966). L’évolution est fulgurante.

Si Lennon a toujours laissé transparaître une profondeur dans son écriture, sa trajectoire musicale s’enrichit d’une quête introspective nourrie par sa propre histoire personnelle, marquée par l’abandon et la perte. Dans cette dynamique, certaines chansons plus légères de la première période des Beatles lui deviennent insupportables. C’est notamment le cas de It’s Only Love, une composition qu’il ne cessera de décrier.

It’s Only Love : un titre « loupé » selon Lennon

Sorti en 1965 sur l’album Help!, It’s Only Love appartient à une période de transition pour les Beatles. À cette époque, le groupe est pris entre deux feux : d’un côté, la pression commerciale qui les pousse à produire rapidement de nouveaux morceaux ; de l’autre, leur ambition grandissante d’explorer des horizons plus vastes. Ce titre, aux arrangements mélodiques pourtant travaillés, incarne cette tension entre spontanéité et précipitation. Et Lennon, perfectionniste et toujours plus exigeant avec lui-même, n’a jamais supporté le résultat final.

Des années plus tard, en 1980, dans une interview avec le magazine Playboy, il avouera sans détour : “It’s Only Love est de moi. J’ai toujours pensé que c’était une chanson médiocre. Les paroles étaient abominables. J’ai toujours détesté cette chanson.” Un rejet sans appel, d’autant plus marquant que Lennon, s’il pouvait être critique envers ses propres œuvres, défendait généralement son travail avec conviction.

Une écriture qui ne correspondait plus à ses exigences

Les paroles de It’s Only Love sont en effet loin des standards d’écriture que Lennon s’imposera plus tard. Elles semblent simplistes, voire clichées, à une époque où la sophistication des textes devient une priorité pour lui. Si l’on compare les vers naïfs de cette chanson aux envolées poétiques et absurdes de I Am the Walrus ou à la finesse narrative de Norwegian Wood, l’écart est vertigineux. Lennon considérait ce texte comme un raté, un symbole des concessions qu’il avait dû faire dans les premières années des Beatles.

Paul McCartney, moins sévère dans ses jugements, reconnaîtra néanmoins que certains morceaux, comme It’s Only Love, ont été écrits sans grand soin : “Parfois, on ne se battait pas trop contre un texte un peu fade. Si une parole était vraiment mauvaise, on la modifiait, mais ce n’était pas notre priorité. Après tout, ce n’est que du rock’n’roll, ce n’est pas de la littérature.”

Pourtant, quelques mois plus tard, les Beatles prouveront que la pop peut bel et bien devenir une forme de littérature. Eleanor Rigby et Tomorrow Never Knows introduisent des thématiques inédites dans le rock britannique, et montrent à quel point le groupe est en pleine mutation.

Un jalon dans l’évolution artistique de Lennon

Si Lennon renia It’s Only Love, on peut y voir une étape nécessaire dans son parcours. Ce morceau incarne l’époque où il se trouvait encore en quête de sa voix artistique. Il témoigne des derniers moments où les Beatles se contentaient d’appliquer les recettes éprouvées de la pop britannique avant d’embrasser pleinement l’expérimentation. En cela, cette chanson joue malgré elle un rôle fondamental : elle marque la frontière entre un passé qu’ils s’apprêtent à dépasser et un futur où ils deviendront les véritables architectes de la musique moderne.

Paradoxalement, c’est peut-être parce qu’il a écrit des chansons comme It’s Only Love que Lennon a ensuite pu concevoir des titres aussi puissants que Strawberry Fields Forever. Ces « erreurs » qu’il dénonçait sont aussi les jalons de son ascension vers l’excellence.

Les Beatles étaient en constante évolution, toujours soucieux de ne pas se répéter. It’s Only Love leur rappelait ce qu’ils ne voulaient plus faire. Le reste appartient à l’histoire.


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