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Maharishi Mahesh Yogi : De la Méditation Transcendantale à l’Empire

Publié le 25 novembre 2025 par John Lenmac @yellowsubnet

Maharishi Mahesh Yogi, fondateur de la Méditation Transcendantale (TM), a marqué l’histoire spirituelle mondiale en introduisant une approche accessible et moderne de la méditation, influençant même les Beatles. Bien qu’il ait été un personnage controversé, son héritage perdure, avec des pratiques aujourd’hui populaires pour le bien-être mental. Son mouvement, malgré les critiques, a fondé de nombreuses institutions à travers le monde.


Maharishi Mahesh Yogi est resté, jusqu’à la fin de sa vie, une figure singulière dans le paysage spirituel mondial. Souvent associé à la technique de la Méditation Transcendantale (Transcendental Meditation ou TM), il a su mêler, tout au long de son parcours, une base traditionnelle issue de la pensée védique indienne et un déploiement moderne axé sur la communication et l’organisation internationale. Son rôle de guide pour certains membres des Beatles, ainsi que sa large influence sur la culture occidentale des années 1960 et 1970, ont contribué à la notoriété de ce personnage à la fois énigmatique et charismatique.

Sommaire

  • LES ORIGINES ET LE PREMIER CONTACT AVEC LE MONDE SPIRITUEL
  • LE LANCEMENT DE LA MéDITATION TRANSCENDANTALE EN INDE ET À L’éTRANGER
  • LES TOURNéES MONDIALES : UN ENTREPRENEUR SPIRITUEL QUI PARLE À TOUS
  • LA RENCONTRE AVEC LES BEATLES ET L’ESSOR MéDIATIQUE
  • UNE TECHNIQUE QUI SéDUIT ET DES INSTITUTIONS QUI S’ORGANISENT
  • DE GRANDES AMBITIONS POLITIQUES ET COMMUNAUTAIRES
  • ENTRE CRITIQUES ET ADHéSIONS : UN CURSUS QUI DIVISE
  • UN DéPART PROGRESSIF DE LA SCèNE ET LE RETRAIT AUX PAYS-BAS
  • LA FIN D’UNE éPOQUE : SILENCE ET DéPART
  • UN HéRITAGE ENTRE SPIRITUALITé, SCIENCE ET VISION COMMERCIALE
  • UNE POSTéRITé DENSE ET UN PHéNOMèNE QUI SE POURSUIT
  • UN ENSEIGNEMENT ENTRE CRITIQUES ET ENGOUEMENT DURABLE

LES ORIGINES ET LE PREMIER CONTACT AVEC LE MONDE SPIRITUEL

Les détails sur la jeunesse de Maharishi Mahesh Yogi sont sujets à controverse : les sources divergent quant à sa date exacte de naissance, certaines avançant 1911, d’autres 1917 ou 1918. D’après plusieurs témoignages, il serait né dans la caste Kayastha, une communauté de lettrés et de scribes dans la région centrale de l’Inde alors sous domination britannique. Il aurait grandi sous le nom de Mahesh Prasad Varma, bien que des documents universitaires mentionnent un autre patronyme, Mahesh Srivastava.

Son diplôme de physique, obtenu à l’Université d’Allahabad en 1942, témoigne déjà de son attrait pour une compréhension à la fois rationnelle et philosophique de la vie. Peu après, il devient l’assistant du Shankaracharya Brahmananda Saraswati, également appelé Guru Dev, chef spirituel du Jyotir Math dans l’Himalaya indien. Le jeune Mahesh, désormais sous le nom de Bal Brahmachari Mahesh, suit Brahmananda Saraswati pendant une dizaine d’années, assumant des tâches variées, du secrétariat au rôle d’orateur sur des thèmes védiques. L’approche spirituelle de Guru Dev aura une influence décisive sur ses futurs enseignements.

La mort de Brahmananda Saraswati en 1953 marque un tournant : ne pouvant hériter du titre de Shankaracharya puisqu’il n’était pas brahmane, Mahesh décide de poursuivre la mission transmise par son maître, consistant à diffuser une forme de méditation simple et accessible au grand public. Il se retire deux ans à Uttarkashi, dans l’Himalaya, menant une vie ascétique et méditative. Ce n’est qu’en 1955 qu’il émerge à nouveau pour proposer au public sa “Méditation profonde transcendantale”. Il adopte peu à peu l’appellation Maharishi (“grand voyant”) et devient, pour beaucoup, Maharishi Mahesh Yogi.

LE LANCEMENT DE LA MéDITATION TRANSCENDANTALE EN INDE ET À L’éTRANGER

Entre 1955 et 1958, Maharishi Mahesh Yogi arpente diverses régions de l’Inde pour présenter sa technique, fondée selon lui sur un savoir traditionnel védique : la Transcendental Deep Meditation (devenue plus tard la Transcendental Meditation ou TM). Il insiste sur la simplicité de la méthode et son adaptabilité à tous, indépendamment de la caste ou de l’origine religieuse. S’il s’adresse surtout aux cercles hindous à ses débuts, il comprend vite qu’il peut universaliser son discours en exploitant la langue anglaise, notamment dans le sud de l’Inde où le hindi ne prédomine pas.

En 1958, lors d’une intervention à Madras, il annonce son intention de sillonner le monde pour partager ce qu’il considère être une pratique de bien-être mental et physique à portée universelle. Il entreprend sa première tournée internationale en 1959, faisant étape en Birmanie (aujourd’hui Myanmar), en Thaïlande, à Singapour, puis à Hawaï. Sa réputation se forge grâce à des articles de presse remarqués, louant la simplicité de son mode de vie, soulignant qu’il voyage léger et ne demande pas d’argent pour lui-même, tout en diffusant une philosophie promettant d’enrayer le mal-être de l’humanité.

À la fin de l’année 1959, sa tournée se déplace vers les états-Unis continentaux (San Francisco, Los Angeles, Boston, New York) et vers l’Europe (Londres). Il noue alors ses premiers contacts avec des personnes influentes et quelques célébrités hollywoodiennes. En parallèle, il fonde plusieurs organisations visant à structurer l’expansion de la Méditation Transcendantale. Dès 1960, ses conférences attirent l’attention des médias. Malgré la curiosité des Occidentaux, des sceptiques se manifestent, lui reprochant de simplifier la tradition hindoue ou de la “dénaturer” pour plaire au public occidental.

LES TOURNéES MONDIALES : UN ENTREPRENEUR SPIRITUEL QUI PARLE À TOUS

Tout au long des années 1960, Maharishi Mahesh Yogi enchaîne les “World Tours”, se rendant dans plus de cinquante pays. Il cherche à montrer que sa technique n’est pas liée à une ascèse extrême ni à des pratiques ésotériques obscures. Au contraire, il insiste sur son caractère naturel et souligne que quelques minutes de méditation matin et soir suffisent pour ancrer la paix intérieure dans le quotidien.

Ses nombreux voyages (Europe, Asie, Amérique du Nord, Australie, Nouvelle-Zélande, Afrique) sont relayés par la presse internationale, fascinée par ce moine hindou qui prétend promouvoir l’épanouissement personnel et la réduction du stress, un sujet dans l’air du temps. Ses conférences, souvent données en anglais, attirent un public varié, allant du simple étudiant aux professeurs d’université. Dès le milieu des années 1960, il crée des organisations locales et internationales, comme la Spiritual Regeneration Movement (rebaptisée plus tard), lesquelles deviennent des pôles de formation pour de futurs enseignants de la TM. On y propose des cours intensifs et des retraites dédiées à l’apprentissage de la méditation selon les protocoles qu’il établit.

LA RENCONTRE AVEC LES BEATLES ET L’ESSOR MéDIATIQUE

L’association de Maharishi Mahesh Yogi avec les Beatles, à partir de 1967, propulse définitivement son nom sur le devant de la scène. Les membres du groupe, déjà en quête de sens et d’expériences introspectives, se montrent intrigués par ses discours lors d’une conférence à Londres. Ils le suivent dans la petite ville de Bangor au pays de Galles, puis jusqu’à Rishikesh, dans l’Himalaya, afin de participer à une immersion de plusieurs semaines en méditation et en études védiques.

Cet épisode, très médiatisé, suscite autant d’enthousiasme que de scepticisme dans l’opinion publique occidentale. Les Beatles apparaissent comme des ambassadeurs de cette pratique que beaucoup jugent alors avant-gardiste. Pour une partie de la jeunesse occidentale en quête de spiritualité, l’intérêt est immédiat, d’autant que l’attrait pour les philosophies orientales (bouddhisme, yoga, etc.) est en hausse dans les milieux contestataires. Maharishi, surnommé le “guru qui rit” pour son éclat de rire caractéristique, profite de cette notoriété pour intensifier ses actions de diffusion de la TM. Il apparaît sur les couvertures de magazines prestigieux (Time, Life, Newsweek), participe à des émissions de télévision américaines comme The Tonight Show ou The Today Show, et donne des conférences devant des foules nombreuses.

Toutefois, la collaboration avec les Beatles s’achève sur fond de rumeurs, notamment une allégation selon laquelle Maharishi Mahesh Yogi aurait eu un comportement déplacé envers l’actrice Mia Farrow, alors également présente à Rishikesh. John Lennon et George Harrison, ulcérés par de possibles inconduites du maître, quittent l’ashram en pleine tension, Lennon composant la chanson “Sexy Sadie” (initialement intitulée “Maharishi”). Plus tard, plusieurs de ces accusations seront réévaluées : George Harrison exprimera des regrets envers le traitement public infligé au Maharishi, qualifiant les allégations de “purs mensonges”. Paul McCartney, quant à lui, renouera contact avec le Maharishi dans les années 2000.

UNE TECHNIQUE QUI SéDUIT ET DES INSTITUTIONS QUI S’ORGANISENT

Par-delà l’épisode Beatles, Maharishi Mahesh Yogi continue à attirer de nombreux adeptes. Sa Méditation Transcendantale se propage dans les campus universitaires américains. Durant les années 1970, la Students’ International Meditation Society (SIMS) voit le jour dans plus d’un millier d’universités, dont Harvard et Yale. Des célébrités comme le chanteur des Beach Boys, Mike Love, ou le comédien Jerry Seinfeld, se montrent également conquis. Les adeptes insistent sur les bienfaits de la méditation : diminution du stress, amélioration de la concentration, meilleur équilibre émotionnel.

Fort de ce succès, Maharishi Mahesh Yogi structure de plus en plus son organisation. Il lance de nouveaux programmes, comme le TM-Sidhi, censé développer davantage de potentiel mental et physique. Dans ce cadre apparaît notamment la pratique dite du “yogic flying”, que certains décrivent comme une expérience de lévitation. Les images montrant des méditants assis en position du lotus, rebondissant sur des matelas, intriguent le grand public et alimentent nombre de discussions. Pour ses détracteurs, il s’agit de promesses farfelues ; pour ses partisans, c’est l’expression d’une maîtrise psychophysique avancée.

DE GRANDES AMBITIONS POLITIQUES ET COMMUNAUTAIRES

Au milieu des années 1970, Maharishi Mahesh Yogi annonce des projets audacieux : la réduction de la criminalité dans des villes comme Washington D.C. grâce à des groupes de méditants, l’idée que si un certain pourcentage de la population pratique la TM, la cohérence de la conscience collective s’améliore, entraînant un déclin statistique de la violence et des conflits. Ces propositions, popularisées sous le nom d’“effet Maharishi” ou “effet de cohérence”, restent controversées d’un point de vue scientifique. Certains partisans font valoir des corrélations dans des études locales, tandis que d’autres estiment que le lien de causalité n’est pas établi de manière rigoureuse.

À partir de 1992, des partisans de Maharishi Mahesh Yogi fondent la Natural Law Party dans plusieurs pays (états-Unis, Royaume-Uni, Inde…) pour promouvoir la paix, le respect de “la loi naturelle” et la diffusion de la Méditation Transcendantale. Les résultats électoraux demeurent marginaux, mais l’initiative révèle la volonté d’institutionnaliser et de politiser l’approche défendue par le Maharishi. Il déclare même vouloir créer un “Gouvernement Mondial” basé sur ses principes, couronnant certains disciples sous le titre de “Raja” (roi) dans le cadre de la Global Country of World Peace, une structure à but non lucratif censée promouvoir la prospérité mondiale.

Au fil des ans, son mouvement acquiert de nombreux biens immobiliers : anciennes résidences, centres de conférences, campus universitaires. Il investit dans des fermes biologiques, des suppléments alimentaires et des cliniques de “santé ayurvédique” (Maharishi Ayurveda), vendus sous diverses entités. Les estimations de la valeur totale de son organisation varient de quelques centaines de millions à plusieurs milliards de dollars, englobant des propriétés dans différents pays. Le Maharishi, parfois accusé d’être un homme d’affaires plus qu’un moine, répond qu’il n’utilise pas ces fonds à des fins personnelles, mais pour étendre et consolider son réseau d’écoles et de centres de méditation.

ENTRE CRITIQUES ET ADHéSIONS : UN CURSUS QUI DIVISE

Si Maharishi Mahesh Yogi a suscité un large enthousiasme, il ne fut pas exempt de critiques. Certains sages hindous lui ont reproché de banaliser et de commercialiser la tradition védique, de “vendre” des mantras. Des poursuites judiciaires, notamment aux états-Unis, ont parfois considéré que sa pratique relevait d’un culte à connotation religieuse, posant problème pour son introduction dans des écoles publiques. Des responsables hindous plus orthodoxes, comme Swami Swaroopananda, l’ont également critiqué pour avoir assumé un rôle magistral alors qu’il n’était pas brahmane de naissance.

Des témoignages d’anciens disciples ont pointé son goût pour le luxe – on parla à tort ou à raison de Rolls-Royce, référence confondue avec d’autres figures de gourous indiens – et des frictions internes se sont produites, notamment lorsque Deepak Chopra, un de ses proches collaborateurs, quitta le mouvement en 1994 après un désaccord. Les rumeurs d’inconduites sexuelles circulèrent également à propos de l’ashram de Rishikesh. Mia Farrow affirma qu’il aurait eu envers elle des avances déplacées, ce qu’autres témoins, comme George Harrison et Cynthia Lennon, contestèrent vivement.

Malgré ces polémiques, les instituts qui enseignent la TM n’ont cessé de croître. Des personnalités du cinéma, de la musique ou même de la science ont validé la démarche de Maharishi, particulièrement au sujet de la réduction du stress et de l’exploration d’états de conscience élargie. Des études en neurosciences, certaines menées au sein de la Maharishi University of Management (ex-Maharishi International University) à Fairfield (Iowa), ou publiées par des chercheurs affiliés, insistent sur les bienfaits physiologiques de la méditation. D’autres experts, plus extérieurs, dénoncent un manque de neutralité et des biais méthodologiques dans la recherche liée à la TM.

UN DéPART PROGRESSIF DE LA SCèNE ET LE RETRAIT AUX PAYS-BAS

Vers la fin des années 1980, le Maharishi essuie des déconvenues avec l’administration fiscale indienne, qui mène un raid dans certains locaux de son organisation. Bien qu’il soit difficile de vérifier la réalité des montants saisis, la rumeur veut qu’il se soit ensuite fait plus discret en Inde. Au début des années 1990, il installe son quartier général dans un ancien monastère franciscain à Vlodrop, aux Pays-Bas. Là, il s’entoure d’un cercle restreint de collaborateurs et communique essentiellement via des vidéoconférences. De plus, il lance une chaîne par satellite, Veda Vision, censée diffuser ses messages dans le monde entier.

Durant les dernières années de sa vie, il limite ses apparitions publiques pour préserver sa santé et son énergie. Il souligne que son but reste d’aider à instaurer la paix mondiale par le biais de groupes de méditants formés, capables de générer une “cohérence” dans la conscience collective. En 2000, il annonce la création du Global Country of World Peace et confère le titre de “Raja” à Tony Nader, un neuro-scientifique d’origine libanaise. L’utopie d’une nation globale, sans frontières, dédiée à la méditation et à la paix, demeure pour beaucoup un projet intrigant, oscillant entre idéalisme et pure ambition démesurée.

LA FIN D’UNE éPOQUE : SILENCE ET DéPART

Le 12 janvier 2008, jour réputé être son anniversaire, Maharishi Mahesh Yogi annonce qu’il se retire de toute activité administrative et qu’il va désormais observer le silence. Il se déclare satisfait de la mission accomplie “au pied de Guru Dev” (son maître décédé en 1953). Trois semaines plus tard, le 5 février 2008, il meurt dans son sommeil à Vlodrop, dans le Limbourg néerlandais. Son corps est rapatrié à Allahabad, en Inde, pour y être incinéré sur les bords du Gange, dans une cérémonie à laquelle participent des responsables politiques locaux et internationaux, des représentants hindous et quelques figures du mouvement de la Méditation Transcendantale.

Les hommages affluent : Paul McCartney souligne la “grandeur” de l’homme, George Harrison avait déjà demandé “pardon” des années auparavant pour les malentendus. Des critiques rappellent cependant que Maharishi laissait derrière lui une organisation pesant des centaines de millions de dollars, et dont l’héritage se partagerait entre des neveux et des disciples élevés au rang de “rois”. Certains saluent la mémoire d’un visionnaire qui aura su “dévoiler la méditation à l’Occident”, d’autres décrient une énième manifestation de “commerce spirituel”.

UN HéRITAGE ENTRE SPIRITUALITé, SCIENCE ET VISION COMMERCIALE

Quoi qu’il en soit, l’impact de Maharishi Mahesh Yogi sur la culture occidentale est indéniable. Il est largement crédité d’avoir fait passer la méditation orientale de la marge (réservée à quelques initiés) au grand public. Les années 1960 voyaient déjà émerger un intérêt pour les philosophies et pratiques asiatiques, mais la TM, avec son protocole clair et sa communication efficace, a contribué à diffuser l’idée selon laquelle la paix intérieure et la réduction du stress sont accessibles à tous, indépendamment de la religion ou de l’appartenance sociale.

Son enseignement, appelé Maharishi Vedic Science, se veut l’héritier direct d’une tradition védique ancestrale, intégrée au mode de vie moderne : architecture (Maharishi Sthapatya Veda), agriculture (Maharishi Vedic Agriculture), musique (Maharishi Gandharva Veda), médecine (Maharishi Ayurveda). Cette transversalité, associée à une approche parfois jugée trop “business”, suscite toujours le débat. D’un côté, l’organisation se dote de multiples antennes, forme des professeurs, ouvre des écoles en Inde et à l’international, crée même des universités — la Maharishi University of Management aux états-Unis en est un exemple. De l’autre côté, on lui reproche une structure quasi-corporative et des frais d’enseignement considérés comme élevés.

D’un point de vue sociologique, Maharishi Mahesh Yogi incarne une forme de néo-hindouisme, adaptant l’héritage védique aux attentes d’un public occidental, curieux mais peu familier des textes sacrés. Il insiste sur le fait que sa méditation n’est affiliée à aucune religion en particulier et cherche à démontrer, par des arguments présentés comme scientifiques, les bienfaits de la pratique. Les sceptiques répliquent que la méthode comprend un rituel d’initiation (puja) et que la terminologie – mantras, symboles védiques – renvoie à un substrat religieux hindou. Les procès intentés dans les années 1970-80 visent à clarifier ces enjeux, particulièrement autour de l’introduction de la TM dans des écoles publiques américaines (question sensible en raison de la séparation entre l’église et l’état).

UNE POSTéRITé DENSE ET UN PHéNOMèNE QUI SE POURSUIT

Après le décès du Maharishi, le mouvement ne disparaît pas : la Méditation Transcendantale continue d’être enseignée partout dans le monde, y compris dans des entreprises et des écoles privées. Des conférences et séminaires perpétuent sa vision, tout comme les publications se réclamant de la “Science de l’Intelligence Créatrice” (Science of Creative Intelligence). Certains considèrent que l’héritage le plus profond du Maharishi réside dans la promotion d’une quatrième forme de conscience, distincte de la conscience de veille, du rêve et du sommeil, un état transcendé que la méditation permettrait d’atteindre et de stabiliser. L’intérêt de la recherche scientifique pour les états de conscience modifiés, en particulier la méditation, s’en est trouvé stimulé et a ouvert la voie à de nombreuses études en neurosciences.

La culture populaire, marquée par l’épopée des Beatles, continue d’évoquer le Maharishi comme l’un des grands “gurus” de la contreculture des années 1960. Au fil des décennies, il est apparu dans des œuvres de fiction, des documentaires, des satires, tantôt loué, tantôt raillé. Son rire haut perché lors d’interviews télévisées lui a valu le surnom de “giggling guru”. Le public retient souvent le contraste entre son style de vie réputé simple et la richesse accumulée par ses institutions.

Néanmoins, au-delà des polémiques, Maharishi Mahesh Yogi a profondément contribué à l’intérêt généralisé pour la méditation et les techniques de bien-être dérivées des traditions indiennes. Aujourd’hui, bien des gens se tournent vers ces pratiques pour gérer le stress et cultiver une forme de spiritualité laïque. À cet égard, l’influence du Maharishi transcende les clivages religieux et se déploie dans le champ plus large de la psychologie, de la médecine intégrative et du développement personnel.

UN ENSEIGNEMENT ENTRE CRITIQUES ET ENGOUEMENT DURABLE

Dans l’ensemble, Maharishi Mahesh Yogi reste une personnalité incontournable pour qui s’intéresse à l’histoire de la diffusion de la méditation en Occident. Ses séances collectives, ses formations de professeurs, son habileté à tisser des liens avec des personnalités en vue, et son sens de l’organisation ont permis à la TM de devenir l’une des techniques de méditation les plus célèbres au monde. Si l’on reproche à son système un aspect commercial prononcé et une cohorte de revendications surnaturelles (lévitation, invisibilité) liées à certaines branches avancées (le programme TM-Sidhi), on lui reconnaît l’avoir popularisée auprès de millions d’individus.

Son mouvement demeure aujourd’hui très actif, à travers la Maharishi Foundation, la Global Country of World Peace et différentes universités ou écoles. Les publications associées à la Maharishi University of Management, dans l’Iowa, contribuent encore à la recherche sur la physiologie de la méditation. Les termes “Maharishi Vedic Science”, “Maharishi Ayurveda” ou “Maharishi Sthapatya Veda” renvoient à des adaptations contemporaines de savoirs indiens anciens, proposés dans un cadre moderne.

Plus largement, la figure de Maharishi Mahesh Yogi interroge la rencontre de l’Orient et de l’Occident. Ses méthodes, destinées à promouvoir un bonheur individuel et collectif, ont trouvé un écho singulier dans une époque marquée par la recherche de nouvelles formes de spiritualité, moins dogmatiques et davantage tournées vers l’expérience personnelle. La controverse autour de son train de vie, de sa gestion des fonds et de son comportement n’aura pas suffi à éteindre l’enthousiasme de ses disciples. Dans l’histoire de la spiritualité contemporaine, il occupe donc une place majeure, traduisant l’aspiration de millions de personnes à un mieux-être intérieur, et symbolisant en même temps les ambiguïtés liées à la commercialisation d’une sagesse ancestrale.

En définitive, Maharishi Mahesh Yogi représente à la fois l’ascète souriant, le diffuseur d’une pratique spirituelle séculaire, et le bâtisseur d’un véritable empire international. Son héritage, ponctué de controverses et de réussites, continue d’exercer une fascination durable. Et si, pour certains, son nom évoque surtout la période où les Beatles cherchèrent un souffle nouveau en Inde, pour d’autres, il demeure un visionnaire qui, le premier, a su proposer une méthode de méditation à la portée de tous, ouvrant la voie à l’actuel engouement mondial pour le bien-être mental.


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