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Une préface de Marcel Proust

Par Alain Bagnoud

Marcel ProustProust et Morand. On sait que c'était une amitié, et une admiration sans failles du second pour le premier (voir pour s'en convaincre la vidéo ci-dessous). De qui d'ailleurs Paul Morand a obtenu une préface pour Tendres stocks, son premier livre publié, que je viens de lire.
Préface intéressante. Mais qu'est-ce qui, venant de Proust, ne l'est pas?
Il s'y attaque à une de ses cibles préférées: Sainte-Beuve.
Il est vrai que ce n'était par une resucée à l'époque puisque son Contre Sainte-Beuve n'était pas paru.
Le voici donc parlant de Baudelaire. « Pauvre Baudelaire! mendiant un article à Sainte-Beuve (avec quelle tendresse, quelle déférence) il finit par obtenir des éloges tels que ceux-ci: « Ce qui est certain, c'est que M. Baudelaire gagne à être vu. Là où on s'attendait à voir entrer un homme étrange, excentrique, on se trouve en présence d'un candidat poli, respectueux, d'un gentil garçon, fin de langage et tout fait classique dans les formes. »
Et Proust de s'étonner de la modestie de Baudelaire, ce « génie qui se méconnaît lui-même ». De défendre Stendhal « un grand écrivain sans le savoir ». De s'énerver contre Anatole France, son « cher maître » qu'il n'a plus revu depuis plus de vingt ans.
Il est agacé parce que France a proclamé, dans un article, qu'on ne savait plus écrire depuis la fin du XVIIIème siècle. Paul MorandOr Proust refuse justement « le principe même du « canon » qui signifierait la dépendance d'un style unique à l'égard d'une pensée multiforme. » Et il oppose à Anatole France de nouveaux écrivains originaux: Jean Giraudoux et Paul Morand.
Ah, nous y voici enfin, à Morand. Son ami Morand. Dont Marcel vante la nouveauté de regard en lui reprochant « des images autres que des images inévitables » et en le décrétant, comme Giraudoux, « généralement assez fatigant à lire et difficile à comprendre parce qu'il unit les choses par un rapport nouveau ».
Jusqu'ici, jusqu'à ces deux pages avant la fin de ce texte qui en compte vingt, il s'agissait bien peu de Tendres Stocks.
Mais il est vrai que Proust revient immédiatement à lui, en proposant à Morand, puisqu'il aime les labyrinthes des palaces, de lui faire visiter celui de l'Hôtel de Balbec...

Paul Morand, Tendres Stocks, Préface de Marcel Proust, Editions Folio


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