Hommage à Nuala O'Faolain

ÉLOGE DE L’ÂGE MÛR
Nuala O’Faolain est morte le 9 mai dernier. En guise de testament, elle laisse son meilleur livre, "Best Love Rosie", que son éditrice française, Sabine Wespieser, fait paraître en avant-première mondiale. Portrait posthume.
En 2006, cet écrivain irlandais, qui fut aussi journaliste, productrice à la BBC et chroniqueuse à Irish Times, avait reçu le prix Femina étranger pour L’Histoire de Chicago May. Je l’avais rencontrée à cette occasion, à Saint-Germain-des-Prés, dans sa chambre d’hôtel aux poutres apparentes, digne d’un petit nid d’amour, l’exacte image qu’elle se faisait de Paris. Un de ses rêves, être publiée en France, avait été exaucé quatre ans auparavant avec la sortie de On s’est déjà vu quelque part ? Remarquant mes chaussures, pointues à talons, elle m’avait confié ne plus pouvoir en porter. "À mon âge, je dois me contenter de ce qui est confortable et pratique. C’est-à-dire moche." Cette remarque n’avait rien de futile, surtout venant d’une féministe intellectuelle telle que Nuala.
Une grande détresse s’y cachait, celle de sa narratrice, Rosie Barry, 55 ans, qui, après une vie brillante, retourne dans la banlieue pauvre de Dublin pour s’occuper de sa tante. Que pèse une femme sans enfant ni mari dans une société catholique et ultra conservatrice ? Le poids d’une plume, celle que reprend Rosie afin de rédiger des Pensées sur la maturité. Comment dompter ce corps qui vieillit et continue d’éprouver un besoin de sensualité ? Toutes ces choses que l’on taît, Nuala les transcrit.
Le même regard perçant, intransigeant, et son humour, nimbent les personnages. Min, la plus truculente, tante septuagénaire, dépressive et alcoolique, retrouve une seconde vie en débarquant à New York. Par elle, l’auteur explore sa relation à la mère avec la difficulté de communiquer et de dire son amour. Comme nombre d’Irlandais, Nuala était fascinée par les États-Unis, où les femmes paraissent systématiquement dix ans de moins. Cependant, ce n’est pas là qu’elle trouvera les réponses sur l’existence. C’est à la nature que la narratrice devra réconfort et réconciliation.
"Best Love Rosie" de Nuala O'Faolain (Sabine Wespieser éditeur) - Littérature anglo-saxonne - 26 €
Article paru dans le magazine FEMMES
http://www.femmes.com/culture/lecture/nuala-o-faolain-5082