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Le livre de toutes les heures

Par Lazare
Notes de lecture sur Vélum d'Hal Duncan (Denoël/Lunes d'encre).
Parler d'Hal Duncan m'évitera de dire du mal du dernier livre de Xavier Mauméjean qui m'avait foutu sur place (le centre de gravitation au plus bas) lorsque j'avais lu son Car Je Suis Légion, excellent bouquin comme la SF camembert n'en n'avait plus moulé depuis que le groupe Limite disait merde & remerde! à sa prochaine désintégration, depuis Damasio & les bourrasques salutaires déployées sur tout un pan d'une littérature qui se voudrait créatrice au degré ultime de la création mais qui n'est rien d'autre de plus ni de moins (c'est bien là le problème) que, disons, végétative. On n'a jamais autant parlé de littérature depuis qu'on y croit plus des masses & - BIS - c'est bien ça le problème. Les petits hargneux à l'haleine fétide qui dissèquent son cadavre tout en montrant les dents n'y changeront rien mais BREF! Passons. Lilliputia, sans être une sombre navet (loin de là!), sera une énième déception; sans doute pas la dernière de l'année.
Le livre de toutes les heures
Autant parler de ce qui brille & fait mal aux yeux. Comme ce Vélum tombé de nulle part – enfin si, du moins pas exactement « nulle part » on va voir ça. Attendu comme le messie avant même d'avoir traversé la Manche par une poignée de lecteurs au bon goût & aux ramifications aussi électives que les pynchoneros de tous poils ou même quelques fils spirituels & spiritueux du Consul Firmin qui sont parfois tout ça d'un coup d'un seul. Vélum est la première partie d'un diptyque qui révèle, semble t'il & nous tenterons de conserver ce doute jusqu'au bout de la lecture en cours, qui révèle donc un auteur talentueux, assez malin pour s'y retrouver dans un bordel aussi incroyable que la fin du monde & patata, dont les références (de Borges à Burroughs en passant par les frontières encore fumantes du punk situasionniste... si ça veut encore dire quelque chose) nous rappellent d'assez bons souvenirs - un auteur dis ai je, Hal Duncan, assez discret sur le net puisqu'il y est seulement dit que le gars est écossais, écrit de la SF, qu'il vient de sortir deux romans dont voici le premier effeuillé en notes de lecture en vue d'un totem pour le Club.
Le livre de toutes les heures
Il sera peut être compliqué de s'y retrouver dans les premières pages. Les choses se mettent en place avec minutie & lenteur. La patience sera un outil aussi indispensable que le cahier/crayon qui ne devrait jamais quitter nos lectures (j'essaie de retenir la leçon mais ça n'est pas facile). L'intérêt d'un tel ouvrage (exactement là où Mauméjean s'est viandé alors que, sincèrement, il n'était pas loin du but) est la continuelle perplexité qui y flotte. Les informations arrivent de toutes part, des personnages portent plusieurs noms, vivent à des moments, dans des lieux différents mais durant une seule & unique vie. Presque une éternité à y regarder de plus près. Le mouvement initié dès la fin du prologue (qui s'annonce peut être comme le dernier chapitre – ainsi que pour le Volcan consulaire) est constant; les bons de côté, placés astucieusement entre les lignes comme de jolies mines antipersonnel/antitextuel, font imploser le récit & le relance à toute berzingue vers une nouvelle déflagration. C'est un fait: les premières pages sont « physiques », dans tous les sens du terme, & cela pourrait être un défaut vite décourageant. Mais, sincèrement, hum hum, pas du tout. Le cortex comprend vite que ce codex hallucinant est une page vierge qui n'attend rien d'autre que de prendre une nouvelle direction. Un choix dans sa plus pure formulation; & c'est la clé de ces quelques pages (à peine plus d'une centaine) qui laisse comme une drôle d'impression, l'impression de lire un livre qui s'écrit au moment même où mes yeux se posent dessus – ah, ah, ah, ça ressemblerait presque à un argument définitif - qui hésite entre aller à droite où à gauche, revient sur ses propos, choisit un autre chemin pour le délaisser quelques lignes plus loin. Il faudrait se replonger dans Daniel C. Dennett & ses possibilités rédactionnelles car il s'agit bien de cela.///stupeur! Tandis que j'écris ces lignes l'Homme Oiseau est train de traverser la Manche en direct sur France 3!!!!! L'Homme Oiseau traverse la Manche... ça laisse rêveur.////Mais où j'en éta_____ oui , voilà... Il s'agit alors d'un soucis de choix me semble t'il. Il s'agit de la fin du monde aussi & surtout, d'une bataille ultime entre une bande d'anges & une autre. Sont pas d'accord bien sûr, ça va donc fighter grave. Mais avant ça il faut constituer les armées & Vélum intervient (entre autre) à ce moment précis. Les Anges VS les Démons... enfin, selon comment on regarde la chose, car l'inverse se tient aussi. La question est: que faire lorsque la bataille finale approche & que l'on refuse de se battre? Les possibilités rédactionnelles fusent toutes ensemble vers le Vélum. Ce monde fait d'autres mondes semblables & pourtant à chaque fois différents. Parfois un simple détail. Les nazis ont gagné la guerre (& là on pense à Philip K. Dick & à son Maître du Haut-Château dans lequel l'Allemangne & le Japon victorieux se partagent l'Amérique), L'Irlande est rayée de la carte tandis que la Grande-Bretagne est encore liée au Nord Pas-de-Callais, lieu de départ de l'Homme OiseauBREF! (...) L'uchronie tourne à plein régime sans jamais en faire trop & on en est reconnaissant. Bien trop souvent de "grands livres" sont passés pour tels simplement parce qu'ils noyaient littéralement & littérairement leurs lecteurs qui ne savaient plus très bien où regarder. Pas ici. Ce problème essentiel du choix flotte au dessus du livre (des 12O premières pages) comme un garde fou. Il faudrait donc relire un peu de Sartre aussi & tout un pan de la philosophie européenne qui s'y frotte j'imagine. En tout cas c'est ce qu'un vrai critique ferait. Rien à foutre, je ne suis pas immortel & encore moins critique & j'ai une pile de livres qui commencent à s'ennuyer ferme depuis que je les ai posé là. Alors on continue, on avance dans ce Vélum qui s'annonce comme un sacré machin qui trouvera sans doute quelques détracteurs aux noms aussi ridicules que le mien. Rien à foutre.
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