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Georgie : Des projets de réarmement qui embarrassent les Occidentaux

Publié le 29 septembre 2008 par Theatrum Belli @TheatrumBelli

Craignant une nouvelle guerre avec la Russie, Tbilissi entend investir massivement dans la reconstruction de son armée. Des ambitions que certains, y compris au Pentagone, jugent démesurées.

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Quelques semaines à peine après la débandade face à l’armée russe, à Tbilissi, on se prépare de nouveau à la guerre. “Notre mission est de protéger notre pays contre une agression russe de grande envergure, la plus importante depuis le milieu du XXe siècle”, explique Davit Kezerachvili, le ministre de la Défense géorgien, âgé de 29 ans, interrogé sur la nature des futures missions qui seraient confiées à son armée.

Des responsables russes ont exprimé à plusieurs reprises leurs inquiétudes face à un éventuel soutien massif des Etats-Unis à la reconstitution de l’armée géorgienne. Pour l’heure, le gouvernement Bush a choisi de mettre en avant le soutien humanitaire qu’il apporte à la Géorgie et évite d’évoquer l’aide militaire. [Le 3 septembre, la Maison-Blanche a annoncé l’octroi de 1 milliard de dollars d’aide à la Géorgie, une somme destinée à la “reconstruction”, mais qui ne comprend pas l’aide militaire. Ce silence officiel témoigne des inquiétudes que suscitent à Washington les tensions entre les Etats-Unis et la Russie, affirme-t-on en haut lieu, et explique que les responsables politiques et militaires du gouvernement Bush n’abordent le sujet que sous le couvert de l’anonymat.

Les responsables de la défense à Tbilissi disent espérer au minimum équiper de matériel moderne les quatre brigades existantes de l’armée de terre et développer l’armée de l’air. Le pays compte à l’heure actuelle 33.000 soldats d’active. La Géorgie espère aussi se doter d’un système de défense antiaérienne intégré couvrant l’intégralité de l’espace aérien géorgien, armer ses forces terrestres de missiles et renouveler le matériel de communications de l’armée, rendu largement inutilisable par les brouillages de l’armée russe pendant la courte guerre de la mi-août. Tbilissi veut aussi distribuer des systèmes de visée nocturne en masse à ses forces armées, pour compenser leur infériorité numérique sur le terrain face aux unités blindées russes. Les discussions qu’entament actuellement la Géorgie et l’Occident sur leur collaboration militaire sont marquées par les événements du mois d’août, l’armée géorgienne s’étant alors dispersée sous le feu de l’ennemi. Ces problèmes, à en croire Davit Kezerachvili et son premier vice-ministre Batu Kutelia, pourraient être résolus grâce à des investissements en matériel. Le ministre de la Défense ambitionne de créer jusqu’à quatre brigades de combat supplémentaires. Il affirme que l’entraînement et l’équipement de ces nouvelles brigades, le rééquipement des forces existantes et l’installation d’une défense antiaérienne moderne pourraient coûter de 8 milliards à 9 milliards de dollars [de 5,6 milliards à 6,3 milliards d’euros].

Un allié militaire pas très fiable

Mais, selon des officiers occidentaux ayant une expérience de la collaboration avec l’armée géorgienne, ces lacunes sont trop graves et trop profondes pour être comblées par le seul renouvellement des équipements. Pendant le conflit du mois d’août, qui n’a duré que quelques jours, l’armée géorgienne a battu en retraite face à l’avancée de l’armée russe, tournant les talons et abandonnant des civils à l’ennemi. Passé les premières heures, ses avions n’ont plus fait aucune sortie. Ses bâtiments de guerre ont été coulés dans les ports, et les Russes se sont emparés de ses vedettes et les ont emportées sur des semi-remorques.

Selon les renseignements dont on dispose pour l’heure, la Géorgie, qui souhaite adhérer à l’OTAN, a si mal combattu tout au long du conflit qu’elle a sapé tous ses efforts visant à se présenter en partenaire militaire sérieux. Bien que le chef de l’Etat n’ait aucune expérience militaire tactique, il a personnellement dirigé d’importantes phases des combats, donnant ses ordres par téléphone portable et décidant du moment où déplacer une brigade de l’ouest vers le centre de la Géorgie pour faire face à l’avancée des colonnes russes.

Sur le terrain, racontent de nombreux témoins, l’armée géorgienne a commencé à pilonner, dans les trente minutes qui ont suivi l’ordre de Saakachvili, des quartiers civils de la ville de Tskhinvali, de même qu’une base russe de maintien de la paix, procédant à d’importants tirs de barrage de roquettes et d’artillerie. Ces tirs ont eu pour seul résultat de provoquer une réaction militaire des Russes, assurent plusieurs diplomates, officiers et témoins. Par la suite, un général géorgien a quitté le champ de bataille en ambulance, abandonnant ses soldats au mépris de son devoir, raconte un officier occidental. Une accusation que nie catégoriquement le ministère de la Défense géorgien. Personne ne conteste en revanche que l’armée géorgienne a succombé à la panique, à tel point que les soldats ont fui jusqu’à la capitale, abandonnant la ville de Gori sans préparer de véritable défense et avant même que les Russes ne l’aient atteinte en nombre. Dans leur débâcle, les Géorgiens ont aussi abandonné en chemin quantité de munitions.

Source du texte : COURRIER INTERNATIONAL


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