Magazine Journal intime

World Trip # 17: Nepal (Part I)

Par Gaelenicodeme
A Kathmandu, je dois retrouver Carlos qui est arrive la veille après 2 mois passes en Ethiopie.Debarquee a 3h du matin a l’hotel ou l’on avait convenu de notre rendez-vous, aucune trace de sa presence, ni meme de son passage.

Je trouble visiblement le sommeil du tenancier qui me repete qu’il n’a plus aucune chambre de libre, et que je ferais mieux de le laisser se rendormir. Dehors, Kathmandu ressemble a une ville fantome crystallisee dans un air glacial, et tous les hotels ont verrouille leur porte. Apres mes 32 heures sans pouvoir fermer l’oeil, et mes dernieres 24 heures remplies de tracas a l’aeroport de Delhi, je craque et fonds malgre moi en larmes, suppliant le patron mi-endormi, mi-agace, de pouvoir m’allonger sur son canape en attendant le lever du soleil. Visiblement, l’idee de voir une inconnue apparue de nulle part utiliser son sofa ne l’enchante pas plus que moi, l’idee de passer une seconde nuit blanche en compagnie des souris qui semblent avoir pris possession de sa reception.

Je retente donc une deuxieme escapade jusque la chambre que Carlos

m’avait indiquee, cognant a sa porte sans me soucier cette fois de reveiller tout l’hotel... Carlos m’ouvre enfin ! Creve de plusieurs jours de voyage par la route via l’Inde, il s’etait laisse emporte par un sommeil profond. Je ne l’ai pas vu depuis 4 mois, ses cheveux sont maintenant quasiment aussi longs que les miens, et il pourra bientot faire des tresses avec sa longue barbe... Est-ce Jesus qui m’accueille en son royaume ? ;-)

J’enfile mon bonnet, mon echarpe et mon polar, et je m’enfonce dans un lit... j’aurais pu dire douillet si cela avait ete le cas, ... mais enfin un lit !

On se reveille le lendemain dans l’apres-midi avec pleine vue sur Durbar Square ensoleille... La vie est a nouveau belle !!

Apres 4 mois d’Afrique, Kathmandu c’est New-York City ! Ca grouille de partout, les rues etroites sont surmontees d’immeubles vieux de moult siecles a plusieurs etages ; les restaurants et echoppes en tout genre bordent sans discontinuer notre passage. Les voitures, motos, carrioles, velos,... zigzaguent en klaxonnant entre les pietons... un petit gout d’Inde, les vaches sacrees nonchalantes au milieu de la route en moins !

Habituee aux deux rues goudronnees des villes malawiennes, j’avais l’impression d’avoir enfin acquis un sens irrefutable de l’orientation ; a Kathmandu, je m’avoue vaincue ! L’air est froid, l’air est frais, ... mais l’air est bon !, et en levant les yeux au ciel, on apercoit les sommets enneiges des montagnes qui ceinturent la ville.

A partir de 17h sur Durbar Square, c’est l’heure du Masala Chai, le the au lait... C’est la que tous les soirs les garcons et hommes de la ville se donnent rendez-vous pour quelques heures de socialisation ; les vendeurs de la place replient bagages, les feux a gaz se mettent en route, et les bouilloires chauffent un peu partout.

La veille Carlos y a rencontre un jeune Nepalais avec qui il a maintenant rendez-vous... Et c’est ainsi que je fais la connaissance de Pawan...

Pawan a 18 ans, la maturite d’un adulte de 30 ans, l’energie d’un jeune de 20 ans, et les ideaux d’un adolescent de 15 ans que les deceptions de la vie n’auraient pas encore entames.

Il est batteur dans un groupe de rock subsidie par des ONG pour delivrer, lors de leurs concerts, des messages contre l’usage de la drogue et pour le port du preservatif. Carlos lui a fait decouvrir quelques bons morceaux de musique via son ipod... Pawan en est ravi !

Pawan voudrait partir etudier aux Etats-Unis (cet indecrottable reve americain !), mais contrairement a la plupart des emigres des pays pauvres, il voudrait revenir au Nepal faire la difference, offrir du travail a ses compatriotes, et changer la politique de son pays. Partir semble pour lui la seule issue pour sortir de la misere... un discours malheureusement et tristement maintes fois entendu...

Moi, je me laisse conquerir et envouter... j’ecouterais des heures durant ses discours empreints d’altruisme, de generosite, d’ideal, de fraternite... en essayant de garder pour moi mes objections pourries par ma culture individualiste.

Pawan veut devenir quelqu’un, un grand leader... Il deviendra un Homme avec un grand H, dans tous les sens humanistes du terme, ca ne fait aucun doute, il en a les capacites, et du fond du coeur, je lui souhaite !

Pawan nous presente a Ravi pour qui il travaille comme benevole. Ravi a une trentaine d’annees, et est un ancien drogue aux drogues dures. Quand il a voulu decrocher, il s’est rendu compte que non seulement, les drogues etaient traites comme des scelerats, mais aussi, aucune structure n’existait pour les aider a decrocher. Il a donc fonde, il y a quelques annees, une organisation pour venir en aide a ceux qui souhaitent se desintoxiquer, accueillant en centre de jour des jeunes en manque, leur fournissant ainsi qu’a leurs familles le support moral necessaire. Par voie de consequence, son organisation s’est egalement ouverte aux malades du Sida, et a la lutte contre la transmission de la maladie. « Drugs kill you before you die », voila pour leur motto.

Dans le Thamel touristique, et sur Freak Street pres de Durbar square, les dealers vous proposent de facon intempestive du shit, de l’herbe, voire plus si affinites.. ; vestiges et heritage des hordes de hippies occidentaux qui venaient peleriner a Kathmandu, mais surtout fumer son herbe reputee pour etre une des meilleures au monde... avant d’etre boutes hors du pays par le Roi Birendra. Ce paturage d’extases enfumees a grande echelle a laisse des traces, et pollue aujourd’hui encore les jeunes generations nepalaises.

Le lendemain de notre rencontre, Pawan nous convie a un cours de Newari (historiquement la langue d’une des castes superieures) dispense gratuitement pour les jeunes de la ville. On assiste aux deux heures de cours ainsi qu’au discours inaugural du maire de Kathmandu sans rien y piger, mais ca a l’air de leur faire plaisir d’avoir des hotes venus d’aussi loin que l’Espagne ou la Belgique... On s’y soumet donc avec un enthousiame partage.

Le 1er decembre, c’est la journee mondiale du Sida. Pour l’occasion, l’organisation de Ravi va organiser des concerts, des petitions et la distribution de preservatifs sur Durbar Square. Pour ce faire, il a besoin de sponsors, et donc rediger un dossier de demande de subsides. La personne qui habituellement s’en occupe a eu un deces dans sa famille.

Un deces au Nepal est suivi de 15 jours de deuil au cours desquels les personnes proches du defunt ne peuvent avoir de contact avec l’exterieur, que ce soit verbalement ou par ecrit. De meme, toutes les personnes proches de la famille endeuillee ne peuvent en principe toucher ou manger toute chose qui aurait ete en contact avec cette meme famille. A moins de 15 jours du 1er decembre, Ravi se trouve donc dans un situation difficile, ayant a endosser des responsabilites pour lesquelles il n’a aucune experience. A sa demande, on lui fournit notre aide bien maigre et futile... on n’a plus vraiment le temps de faire de grands changements !

Ravi est d’une attention tellement indefectible a notre egard, qu’elle en est presque genante, voire meme parfois etouffante. Il nous invite au restaurant avec sa fiancee Bumikha pour gouter les specialites locales sans nous laisser payer, nous offre sa pleine attention quand on passe au bureau de son organisation, le the, negocie des prix dans les hotels pour nous y sejourner, nous donne la sim card de son mobile pour nous pouvoir telephoner... vraiment, on se sent submerges par ses gentillesses ; on ne sait comment y reagir.

De meme, Pawan nous invite un soir a diner dans sa famille avec tous les membres de son groupe de rock. Sa mere nous a concocte des delices typiquement nepalais. Quand arrivent les plats, Carlos et moi sommes les seuls a nous regaler ; « Guests are Gods » dans la maison d’un Nepalais... On devra insister pour qu’ils se joignent a notre festin, etant prets a nous regarder manger toute la soiree comme le veut la tradition locale.

Lorsqu’on dit a Ravi ou Pawan que notre visa nepalais expire mi-janvier, ca leur parait beaucoup trop tot ; il voudrait nous voir sejourner a Kathmandu pour de longs mois a leurs cotes. C’est avec un pincement au coeur, mais determination, qu’on leur explique qu’on aimerait voir autre chose du Nepal que sa capitale. En attendant, je parviens a reculer une nouvelle fois mon vol vers la Chine ; je sens que mon sejour risque de se prolonger..

Lorsqu’on veut inviter Pawan ou Ravi a prendre un verre ou a manger pour les remercier de leur hospitalite, ils refusent tout net. Et quand enfin on parvient a les trainer apres insistance dans un cafe, ils ne commandent rien, pas meme un verre d’eau. Il doit y avoir quelque chose que ne saisit pas encore dans la culture nepalaise...

On reussira quand meme a les amener diner dans un bar ou se produisent des artistes live reprenant le meilleur des grands classiques rock... Une petite pensee pour mes soirees a Bangkok avec le Marcus...

Le surlendemain, Carlos et moi partons pour Pokhara, a l’Ouest de Kathmandu, point de depart des treks vers l’Himalaya. J’ai dormi quasiment les 8 heures que dure le trajet en bus, mais lorsque j’ouvrais un oeil, c’etait pour decouvrir de magnifiques paysages faits de montagnes et vallees vert tendre.

A Pokhara, on logera dans une guest house recommandee par un touriste anglais, et tenue par un Nepalais adorable. Sur le toit est construite une terrasse de laquelle on a une vue imprenable sur l’Annapurna, et sur laquelle on peut prendre le temps d’apprecier les levers et couchers de soleil sur les montagnes.

Compare a l’effervescence de Kathmandu, Pokhara est un veritable havre de paix, une petite ville paisible au bord d’un lac coince entre les montagnes. Mais Pokhara, c’est aussi la premiere ville touristique du pays offrant toutes les facilites requises par les backpackers de passage ; cybercafes, boutiques de souvenirs, bars, restaurants a profusion specialement concus pour delecter les papilles occidentales... et je dois dire que cela requiert parfois des efforts d’imagination pour encore se sentir au Nepal.

J’en profite pour faire le plein de bouquins et faux Lonely Planet a ½ prix, ainsi que m’equipper contre le froid des sommets. Au bout de 3 jours, c’est sans grande emotion que nous quittons Pokhara...


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