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Mantegna

Publié le 07 octobre 2008 par Marc Lenot

mantegna-31.1223369362.jpgVous lirez ailleurs des critiques savantes de cette exposition, au Louvre jusqu’au 5 Janvier, et n’aurez ici que quelques impressions. Ce peintre émerge de la gangue rugueuse du Moyen Âge, avec des premiers tableaux aux allures d’icônes, et finit sa vie dans une douceur émolliente imposée par Isabelle d’Este, qui le trouve vieillot et tente de le mettre au joli goût du jour, Léonard et Titien étant ses références. Mais entre ces deux écueils, quelle force ! Maître de la perspective et du raccourci (hélas, le Christ mort sur la table d’embaumement n’a pu venir de Milan à Paris), virtuose de la rocaille désolée sur laquelle ses personnages semblent s’enraciner, Mantegna peint des saints et des christs poignants.

Voyez ce Christ de pitié soutenu par un séraphin et un chérubin (lequel est le séraphin et lequel le chérubin ?): au delà de la douleur un peu figée des visages, toute la composition est faite de tensions et d’oppositions entre le rigide et le flou. Le

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siège aux lignes dures soutient le linceul blanc tout en volutes, la terre désolée du premier plan s’oppose au ciel coloré aux nuages moutonneux et, sans aller jusqu’à une exégèse de la phallophanie, l’humain et le divin se conjuguent dans le corps du Christ.

Quant au Saint-Sébastien d’Aigueperse, il n’a pas l’appétence charnelle des saints Sébastien devenus iconiques, il est gris, tragique, immense sur sa colonne en ruines. Mais le plus frappant est ce bégaiement, cette répétition, ce troisième pied de marbre, en bas à gauche, déjà mort, rigide, brisé : démembrement du corps, fragmentation, annonce de la mort ou de la résurrection sur fond de ruines. Cependant, à droite, les têtes des bourreaux émergent du cadre avec en arrière-plan une ville peuplée de vivants.

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On note aussi des effets de marbre saisissants, par exemple dans la Circoncision (détail ci-contre), comme si l’oeil venait s’y reposer, s’y purifier, plongeant dans une composition abstraite expressionniste; et, plus loin, la pergola de la Vierge de la Victoire, vide végétal orné de guirlande et d’oiseaux. 

Et on peut enfin s’attarder sur un des tableaux peints pour le studiolo d’Isabelle d’Este à Mantoue, Minerve chassant les vices du jardin de la Vertu, où (détail ci-dessous) les vices s’enfonçant dans l’étang au premier plan sont des plus réjouissants. 

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