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Quand l'empereur était un dieu, Julie Otsuka

Par Cocola

C'est un très joli mais pas très joyeux petit roman que je vous présente aujourd'hui...
Il raconte l'histoire d'une famille américaine, jamais nommée, d'origine japonaise pendant la deuxième guerre mondiale. On pourrait croire qu'une fois qu'on a obtenu la nationalité américaine, on est un citoyen à part entière, avec les mêmes droits et les devoirs que les autres. Seulement voilà, en temps de guerre, avoir des origines japonaises, vouloir maintenir des liens avec les grands-parents restés au pays ou tout simplement pratiquer sa religion, peut suffire pour être soupçonné d'être un traître à la nation.
C'est ce qui est arrivé non pas à une infime minorité mais à plus de 100 000 personnes à cette époque.
Le style -je parle ici seulement du style, car le thème bien que s'en rapprochant n'est pas le même- m'a fait penser à Être sans destin, d'Imre Kertész, écrivain hongrois, parce que comme Julie Otsuka, les faits sont décrits simplement, sans vraiment de signes extérieurs d'émotion chez les personnages, alors que le pire est commis. Le traumatisme est profond, mais silencieux. Le sentiment d'être arraché à son chez-soi est vraiment très bien décrit, mais décrit n'est pas le mot parce qu'il n'est justement pas exprimé tel quel...
Les enfants apprennent à grandir seuls, parce que les parents sont parfois trop perdus eux-mêmes pour s'en occuper. Tous survivent, alors qu'on leur enlève leurs propriétés, leur travail, leur famille parfois, leur droit de choisir. Finalement beaucoup de ce qui nous rend humains.
Mais Julie Otsuka décrit aussi le retour chez soi, après les longues années passées dans les camps. Et tout ne se résout pas du jour au lendemain, les blessures restent mais il faut réapprendre à vivre avec les siens, devenus étrangers parfois, mais aussi avec les autres, ceux qui n'ont pas connu l'internement, ceux qui refusaient les Japonais dans leurs magasins, ceux qui n'ont rien fait quand la police sont venus chercher certains familles pour les emmener.
Les familles ne se sont pas révoltées, parce qu'elles voulaient prouver au gouvernement américain qu'elles n'étaient pas espionnes au service du Japon. Après la guerre, aucune voix ne s'est fait entendre, parce que tous avaient honte d'avoir connu l'enfermement.
Autant pour cette délicate écriture que pour en savoir plus sur des événements très rarement évoqués, je vous conseille définitivement Quand l'empereur était un dieu, de Julie Otsuka.

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