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Exilé

Par Rob Gordon
Difficile de juger vraiment Johnnie To, auteur d'une quarantaine de films en vingt ans, et dont on n'a pu découvrir par chez nous que les oeuvres les plus récentes (de The mission à PTU). Génie pour beaucoup, tâcheron pour d'autres, il est surtout spécialiste des films mal fagotés, qui n'atteignent jamais vraiment les sommets promis. Exilé arrive à temps pour prouver que To n'est pas un arnaqueur de première, mais bien un vrai cinéaste, avec un style et des histoires plein la musette.
Exilé ressemble à s'y méprendre à un grand classique du western : longues étendues poussiéreuses, dialogues au compte-gouttes, rupture de ton entre repos du guerrier et fusillades. Revenant à l'essence même du genre, Johnnie To filme une histoire des plus simples (vengeance, fuite, course-poursuite) en l'agrémentant de ce qui fait sa singularité, c'est-à-dire un humour très noir, à peine perceptible, extrêmement désespéré, et un sens quasiment lyrique du gunfight (John Woo peut sans doute aller se rhabiller). C'est froid, sobre, diablement efficace, et il naît même une vive émotion du sort de ces hommes pourtant aussi expressifs que des morceaux de bois. Et, pour une fois, le metteur en scène semble maîtriser son récit jusqu'à la dernière image, ajoutant une louche de virtuosité à chaque fois qu'on pense le film terminé. Fort en gueules et en grand spectacle, Exilé est la preuve irréfutable que To a sa place entre Huston et Peckinpah. Ce qui n'est pas franchement donné à tout le monde.
8/10

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