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Critique d’une étude de SocialMedia SL sur l’influence des médias sociaux en Espagne

Publié le 19 octobre 2008 par Lilzeon

Citoyens ! A l’heure où l’on se pose la question de l’influence des médias sociaux, SocialMedia SL vient de publier les résultats d’une étude conduite auprès de 920 internautes espagnols. Elle se focalise sur le “pouvoir” des blogs du réseau Weblog SL .

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On y apprend quelques informations intéressantes :

  • environ 25% des internautes espagnols ne participent ou ne visitent pas encore les médias sociaux aka pour l’étude les blogs personnels, spécialisés, les forums. Ce chiffre semble pourtant se réduire de mois en mois…
  • depuis qu’ils lisent des blogs, le comportement des internautes vis-à-vis des enquêtes dans les journaux ont changé (on n’en sait pas plus, dommage : défiance ? envie d’aller plus loin ? …)
  • entre 1977 et 2006, le bouche-à-oreille a gagné 30 points en tant que source fiable d’information (1977 : 67% 2006 : 97%) en comparaison avec la pub télé (qui reste presque au même taux)
  • 23% des personnes interrogées ont recommandé des produits / services à des individus qu’elles ne connaissaient pas du tout (et donc beaucoup en ligne)
  • le “marché de la recommandation en ligne” (barbarisme, désolé) semble très structuré auprès des geeks, férus de technologie ou de produits électroniques : on n’a par contre aucune donné sur les autres domaines (et c’est bien dommage, il n’y a pas que gizmodo dans la vie)
  • les influenceurs digitaux et les influenceurs tout court se nourrissent du traitement que font leurs pairs en ligne. Autrement dit des comportemtents de spin peuvent avoir lieu puisque des petites communautés de gens très suivis s’autoalimentent

Quelques remarques :

  • il est étonnant que les différentes études souhaitant comprendre et mesurer l’influence se limitent seulement à des niches “techniques”, où l’on commente essentiellement les attributs produits, où l’on note et où l’on attend les versions suivantes (téléphonie, web, gadgets…) alors que sur nos marchés en saturation, le sacrosaint principe est “l’expérience” : inadéquation étude / stratégie ?
  • la plupart des études mentionnent le fait que la distinction offline / online n’est plus franchement valides : à quand une étude sur l’influence réelle, où le web ne serait qu’une extension d’une capacité d’influence basée sur des réseaux de solidarité ancrés dans le capital culturel, économique (…) des agents ?
  • une intuition me taraude : et si le web ne changeait pas l’habitus mais plutôt l’accès à l’habitus et sa mobilisation ? je reviendrai sur le sujet plus tard…Je vole à ce propos cet article de Frédérique traitant de la critique de Grignon contre Bourdieu et son usage systémique de l’habitus :

” La définition du goût comme système de dispositions développée par P. Bourdieu repose sur la transposition à l’étude des consommations et des modes de vie contemporains du schème de l’homologie utilisé par E. Panofsky à propos de la scolastique et de l’architecture gothique : de même qu’une même « force formatrice d’habitudes » est à l’œuvre dans le plan des ouvrages de théologie et dans celui des cathédrales, de même un principe unique, règle l’ensemble des consommations propres à un groupe ; qu’il s’agisse de politique, de morale, de religion, d’art, de vêtement, de mobilier ou d’alimentation, tous les choix de consommation qui caractérisent ce groupe procèdent d’une même « habitude mentale”.

Parler de style d’alimentation ou de style de vie, c’est en l’occurrence parler de style au sens fort, ou du moins au sens savant du terme, par analogie avec le style gothique et plus généralement avec le style qui confère à toutes les productions d’une même période historique leur « air de famille ». Ce transfert de la notion de habit-forming force (que P. Bourdieu traduit par habitus) autorise un usage plus systématique, mais aussi moins contrôlé, de l’analogie. Poser que les consommations d’un même groupe entretiennent entre elles une « affinité structurale », et qu’une pratique ne livre toute sa signification que si on la replace dans la « constellation » dont elle fait partie, produit un effet de Gestalt (qui contribue à « styliser » le mode de vie) et permet de s’affranchir de la division arbitraire des objets de recherche en fonction des domaines d’activité concrets

Si l’on admet que les mêmes dispositions sont au principe de tous les choix, il devient possible d’analyser les attitudes à l’égard de la cuisine et de la nourriture dans les mêmes termes et avec les mêmes schèmes que les attitudes à l’égard de la politique ou à l’égard de l’éducation. Malheureusement, l’habitus fait partie de ces notions dont il est tentant « de se prévaloir pour tout comprendre ». La trop grande vertu explicative accordée à l’habitus finit par détourner de l’étude sérieuse des relations entre les différentes consommations, et des relations entre les dispositions et les conditions de vie et le niveau de vie ; elle décourage de consacrer le temps et le travail nécessaires à la saisie empirique des médiations entre les goûts et les consommations. Ainsi les éléments des styles de vie décrits par P. Bourdieu finissent par tirer toute leur signification de la relation directe qu’ils entretiennent avec l’habitus autour duquel ils gravitent. Pris en eux-mêmes, ou dans les relations qu’ils entretiennent les uns avec les autres, ils n’ont pas plus de réalité que les ombres portées sur les murs de la caverne de Platon ; tous sont interchangeables, et tous sont présents dans chacun d’eux, parce que tous reflètent le même principe essentiel.

Dès lors que toutes les manifestations de l’habitus se valent, la sélection des traits appelés à définir la « constellation » caractéristique d’un style de vie risque de se faire davantage en fonction de leur caractère pittoresque et des échos qu’ils sont susceptibles d’éveiller dans l’esprit du lecteur que sur la base d’une connaissance réelle et raisonnée des relations qui unissent les différents ordres de pratiques auxquels ils se rattachent. La métaphore libre, et les procédés d’écriture qui lui sont liés, s’introduit par le biais du raisonnement analogique : en matière d’association et de rapprochements tout devient possible, mais rien n’est nécessaire. Faute de s’appuyer sur des connaissances empiriques, la notion d’habitus elle-même finit par se vider de tout contenu, et par se réduire à un principe d’explication central purement formel ; ainsi l’habitus que P. Bourdieu place au principe des nourritures et des corps populaires se confond avec une image sociale stéréotypée du peuple et des « masses », qui mêle les lieux communs de l’imaginaire dominant, les souvenirs littéraires (Gargantua, via L’Assommoir) et les fantasmes que la vitalité supposée des « manuels » inspire aux intellectuels.”


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