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La critique de L’art de la pensée négative de Bârd Breien, en avant première.

Publié le 23 octobre 2008 par Ariane_

L'art de la pensée négativeL’art de la pensée négative de Bârd Breien est un bel ovni. Film norvégien, d’abord, et il y en a peu qui viennent jusqu’aux spectateurs français.
Film au parti-pris osé, ensuite : Geirr, cloué dans un fauteuil roulant à la suite d’un accident s’ensauvage de jour en jour. Sa femme Ingvild fait appel à un groupe d’handicapés mené d’une main de fer par Tori, grande adepte de la méthode positive. Avec elle, pas de problème, et si quelque chose dépasse, il suffit de cracher son venin dans le petit sac présent à cet effet.
La rencontre commence mal puisque Geirr n’hésite pas à utiliser un extincteur pour faire fuir le groupe. Mais Marte au sourire constant, Gard en apparence serviable et parfait, Lillemor aux jolis cheveux, Asbjorn qui ne parle pas et leur mentor Tori sont soudés, positifs et souriants.
Ils entrent et pour eux, tout bascule.

Comment un seul homme peut-il remettre en cause la thérapie et le mode de fonctionnement de tout un groupe : telle est l’histoire de L’art de la pensée négative où Geirr, pessimiste et violent, propose à ces handicapés sa thérapie à lui… La pensée négative.
Ainsi, Geirr choisit de regarder une vidéo de son mariage et un film de guerre : ce qu’il a été et ne peut sans doute plus être. Un mari, un valide. Quant à la bande originale du film, majoritairement des morceaux de Johnny Cash, elle installe la loi des armes, comme un regain de force et de virilité.
Sujet original donc, choix scénique plus classique : la maison du couple est vivante, métaphorique à souhait.
Au rez de chaussée, c’est le désir de mort et le chaos qui règnent. L’alcool et la drogue coulent à flot, jusqu’à la séance de roulette russe avec le pistolet de Geirr.
A l’étage, c’est un septième ciel aussi bancal qu’incertain : chaque personnage qui y monte est tôt au tard soumis aux règles mécaniques de l’envie et du désir, qu’ils soient assouvis ou non.
L’amour est-il encore possible entre un valide et sa moitié devenue handicapée ? La frontière du handicap est-elle trop forte ? Comment guérir son amour ?
L’art de la pensée négative pose toutes ces questions, propose des brins de réponses, sans surcharger le spectateur d’habituels lieux communs.
Le discours y est audacieux, le parti-pris osé.
Car on rit à plusieurs reprises devant des scènes où l’humour noir, féroce, se fait irrésistible : le sac pour vider ce qu’on a sur le cœur est troué, le spectateur assiste à plusieurs morts ratées. L’échappatoire, s’il est un temps dans les paradis artificiels, se stabilise dans ce rire, collectif et curatif.
L’art de la pensée négative est un film sur le malaise, le mal être, le désir de mourir. Et pourtant, le spectateur sort plus optimiste de la salle : il y a espoir, semble nous dire le film. Car la pensée négative, si elle est souvent considérée comme sinistre et néfaste, pourrait peut-être, aussi, être à l’origine de petites guérisons, tout en révélant aux autres et à soi-même qui l’on est vraiment.
Note 8/10
Un tel titre, un tel scénario : il fallait le faire. Bârd Breien semble n’avoir peur de rien, parce qu’il dit tout et montre tout.
La note d’intention du réalisateur Bârd Breien
« Avec L’art de la pensée négative, je voulais faire un film drôle à propos de quelque chose de très sérieux, où l’on essaie de comprendre la manière dont nous abordons les questions difficiles : les sentiments que nous devrions gérer et les actes que nous pourrions commettre face à un drame.
Dans le même temps, je voulais mettre à l’épreuve le concept de « positivité » comme voie unique de bonheur. Une volonté que j’incarne à travers le personnage de Geirr, un homme très amer et négatif, d’abord envahi par un groupe de la pensée positive, censé lui apprendre à être à nouveau heureux. J’ai vu dans la façon dont Geirr prend le contrôle du groupe jusqu’à le pousser dans un sombre tunnel de désespoir et de démoralisation, le potentiel d’une comédie superbe. Même si mon film est une histoire dure, je n’ai cessé de le regarder comme une comédie. »
L’art de la pensée négative de Bârd Breien sort dans les salles le 26 novembre. Il dure une 1h19 et est distribué par Little Stone Distribution.


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