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Réintroduction de l’Ours : le confort de l’homme justifie tout !

Publié le 23 juillet 2007 par Nicolas Thierry

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A l’initiative de l’association pour la sauvegarde du patrimoine d’Ariège-Pyrénées (Aspap), les anti-ours profitent depuis dimanche du passage du Tour de France dans l’Ariège, pour rappeler leur opposition au plan de réintroduction du plantigrade dans les Pyrénées. Une association pour la sauvergarde du patrimoine des Pyrénées qui lutte contre le retour d’un ours symbole de la vie Pyrénéenne et d’une montagne libre et authentique. Leur vision intime de la sauvegarde du patrimoine est en réalité une montagne domptée et appartenant intégralement à l’homme. J’entends déjà les anti-ours me taxer de Parisien (Bordelais en l’occurrence) ayant une vision idillique et peu réaliste de la situation.D’aprés eux, je ne vis pas en montagne et me fout de la sécurité des habitants ainsi que de celle des troupeaux ! Demandons donc aux chiffres ce qu’ils en pensent (Mais çela aussi cela doit être un argument de Parisien:)).

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Sur soixante cas de rencontre homme-ours recensés dans les Pyrénées de 1996 à 2000, le comportement de l’animal a été noté. L’ours évite généralement l’homme (il est très rare de voir un ours). Il est donc à souligner que les pourcentages suivants ne comptabilisent pas les cas où l’ours a évité l’homme, sans que ce dernier ne le voit. Sur les 60 observations, il a été constaté que, dans 78 % des cas, l’ours s’enfuit ou s’éloigne de l’homme. Dans 19 % des cas, il manifeste un comportement indifférent sans être agressif. Dans 3 % des cas (deux cas), l’animal a chargé. Les deux charges correspondent à une femelle accompagnée d’oursons. En 1997, Melba charge un chasseur qui la tue, et en 1998 Ziva charge deux agents de l’équipe technique ours (charge d’intimidation pour les dissuader de s’approcher). Les cas de mort d’homme dus à l’ours brun sont très rares en Europe. En Scandinavie, le dernier cas connu remonte à 1905. Quelques cas rares ont été répertoriés en Europe centrale et en Russie dans les années 1980. En 2004, en Roumanie, un ours brun, qui était porteur de la rage, a tué une personne. En Amérique du Nord, des accidents ont pu être relevés mais les contextes écologiques et humains sont très différents, et plusieurs millions de touristes peuvent passer dans les parcs nationaux américains sans qu’il n’y ait d’accident grave. Dans les Pyrénées, des récits anciens et souvent mythiques relatent l’agressivité d’ours blessés par des chasseurs ou des bergers. Cependant, on n’y connaît aucun cas documenté de mort d’homme à cause de l’ours depuis la deuxième moitié du XlXe siècle. Rappelons également qu’en France, sangliers et cerfs engendrent des accidents mortels chez l’homme tous les ans. Si l’on prend en compte le nombre d’ours réintroduits ainsi que la trés bonne connaissance des zones où les ours sont potentiellement rencontrables ,le risque de mauvaise surprise frise donc le zéro absolu.

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Les dommages causés par les ours en France sont-ils aussi importants qu’une partie de la profession agricole aimerait le faire croire ? L’ours met-il le pastoralisme en danger? En 2004, sur l’ensemble du massif pyrénéen, on recensait 157 000 bovins, 621 300 ovins, 14 000 caprins et 12 000 équins (*). Au cours de cette même année, 129 animaux ont été indemnisés au titre de dommages imputés à l’ours et 60 au titre de dommages attribués au bénéfice du doute (ce n’était peut-être pas l’ours). Au total, sur un cheptel de 804 300 têtes, les pertes dues à l’ours sont au maximum de 189 bêtes, soit 0,02 % du cheptel. Prenons le cas le plus favorable au discours de ceux qui veulent faire croire que l’ours est un danger pour le pastoralisme : considérons que la majorité des pertes causées par l’ours concerne davantage le cheptel des brebis, soit un total de 621 300 têtes. En 2005, 119 animaux ont été indemnisées au titre de dommages imputés à l’ours et 287 attribués au bénéfice du doute. Au total, sur un cheptel ovin de 621 300 bêtes, les pertes dues à l’ours sont au grand maximum de 406, soit 0,06% au grand maximum.

Malgré tout, ces pertes sont logiquement compensées par l’état car même faible globalement, elles sont toutefois un manque à gagner pour un berger. Les préjudices liés à une attaque d’ours sont divers. En plus de la perte directe de bêtes, la perte indirecte suite à un affolement du troupeau, le dérangement du berger et du troupeau (avec ses effets potentiellement induits en terme productif : avortements, baisse de lactation…), les bêtes égarées suite à l’attaque… représentent autant d’inconvénients. Pour les compenser, il existe un dispositif d’accompagnement financé par le ministère de l’écologie et du développement durable. Les dommages d’ours ayant été constatés (ce qui exclut les bêtes disparues) font l’objet d’une compensation. Si la responsabilité de l’ours est reconnue, ou au bénéfice du doute après avis de la commission en charge de la compensation des dommages d’ours, le bien endommagé est compensé à hauteur d’un prix défini par un barème. Ce barème est fondé sur les prix moyens du marché, réactualisé chaque année après avis des commissions, et publié par décision du préfet coordonnateur de massif. Les effets indirects du dommage d’ours sont pris en compte par le versement au berger d’une prime de dérangement de 115 € destinée à compenser le surcroît de travail lié à la recherche des animaux, au rassemblement du troupeau le cas échéant, à la participation à l’expertise… Une indemnité de manque à gagner de 10 % du prix des bêtes victimes avec un minimum de 46 €, équivalent au prix d’un agneau, est aussi versée pour compenser les pertes indirectes (avortement, stress du troupeau…). Un certain nombre de dommages n’est pas compensé, notamment les dommages qui ne peuvent être constatés (bêtes disparues). Les causes de disparition sont multiples et la responsabilité de l’ours toujours difficile à justifier, même si elle n’est pas exclue. Plutôt que de compenser des disparitions d’animaux, il apparaît plus juste à l’administration d’apporter aux éleveurs un soutien pour la réalisation de leur activité par le biais des mesures d’accompagnement du programme ours et des dispositifs financiers agricoles. Pour en savoir plus, vous pouvez télécharger le barème 2006 pour l’indemnisation des dommages occasionnés par l’ours sur le
massif pyrénéen.

La lutte pour la réintroduction de l’ours dans les Pyrénées est le symbole de notre difficile compréhension que l’homme n’est pas seul sur cette planète et que tout être vivant a droit à sa place pour survivre. Voici une belle occasion de prouver que nous sommes des animaux pourvus d’humanité.


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