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J'Ai Epousé Un Communiste - Philip Roth

Par Woland

I married a communist Traduction : Josée Kamoun

"J'ai épousé un communiste", tel est le titre qu'Eve, épouse en instance de divorce d'Ira Ringold, donne à l'ouvrage-vengeance qu'elle fait paraître au beau milieu des années cinquante et du maccarthysme galopant. Immédiatement ou presque, soutenu par les critiques du couple Grant, l'ouvrage s'envole vers la première place des best-sellers du mois.

C'est qu'il ne fait pas bon être communiste aux Etats-Unis en cet après-guerre suspicieux qui redoute les renseignements soviétiques et voit d'un très mauvais oeil l'URSS se doter, elle aussi, de la bombe nucléaire. Au demeurant, on n'a même pas besoin d'être officiellement encarté pour avoir des ennuis : il suffit d'une rumeur, d'un soupçon ou de simples opinions dites "de gauche" mais non extrémistes.

Or, communiste, Ira Ringold l'est. Et depuis longtemps. Il peut mentir au tout jeune Nathan Zuckerman et lui garantir qu'il n'a pas sa carte au Parti, le fait est là : Ira est communiste.

Comme nombre d'activistes des deux camps, Ira n'est pas vraiment devenu communiste : en fait, il n'avait pas de bases et tout juste quelques racines bien malades ; alors, il s'est accroché à une idéologie qui, par ses structures, lui donnait l'illusion de la sécurité familiale qu'il n'avait pas eu la chance de connaître. Eût-il été plus porté sur la chose par l'éducation reçue qu'il serait devenu un fanatique religieux ...

Fidèle à sa méthode, Philip Roth nous fait revivre cette période troublée de l'Histoire des USA en nous proposant le récit fait par un proche d'Ira - son frère, Murray - des événements qui ont contribué à l'ascension et à la chute de son frère. S'y mêlent les propres souvenirs de Zuckerman qui, alors adolescent, avait été séduit par les idées "progressistes" et la faconde indéniable d'Ira tandis que celui-ci, on peut le penser, voyait dans le garçon le fils qu'il n'avait pas eu.

Contrairement à "Pastorale américaine", dont la fin abrupte et "ouverte" sans l'être peut faire tiquer son lecteur, "J'ai épousé un communiste" bénéficie d'une construction impeccable qui ne laisse aucun détail au hasard. Le seul problème qui se pose touchera celles et ceux qui ne se sont jusque là jamais intéressés (ou alors très peu) à la Guerre froide, au maccarhysme, à Hoover, au communisme et à sa propagande, etc ... dans le contexte très particulier des Etats-Unis, pays super-capitaliste par excellence.

Je crains personnellement que ceux-là ne se s'ennuient un peu à la lecture de ce roman que, pour ma part, j'ai beaucoup aimé même si aucun de ses personnages, pas même le pauvre Ira, ne possède ni la chaleur rayonnante d'un Seymour Levov, ni l'énergie vengeresse d'un Coleman Silk.

C'est la seule réserve que j'émettrai. "J'ai épousé un communiste" ne m'a donné qu'une seule envie : persévérer dans Philip Roth. La preuve : je me suis procuré le premier roman où apparaît Zuckerman, "L'Ecrivain des Ombres." Je vous tiens au courant. ;o)


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