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Nouvelle Vague (1990-2008)

Publié le 04 novembre 2008 par Gregory71

Combien de fois ai-je au juste vu et revu ce film? A chaque visionnement, je comprend l’ampleur de ma dette. Pas simplement comme une citation, mais comme une impulsion plus profonde et secrète qui va de travail en travail, de recherche en recherche. Je sais que c’est là.

J’avais vu ce film à 18 ans. Je me souviens du sentiment d’avoir vu quelque chose qui n’était ni classique ni contemporain, d’avoir vu justement le point de jonction entre une histoire, le retour de l’amour, et une structure non pas déconstruite, mais laissant une place à la complexité, à des voix qui se perdent, qui ne peuvent s’entendre, qui se répètent. Le film débordait de toutes parts ma capacité à percevoir. Il y avait du reste et ce n’était pas la croyance en un grand art, une confiance fétichiste en un nom, Godard, mais simplement une oeuvre qui n’attendait pas ma présence. Je me disais alors que c’était cela qu’il fallait faire. Non pas s’isoler. Non pas se lier non plus. Faire simplement. L’acte est fabuleux.

Quelque chose ne s’arrête pas dans ce film, le flux interrompu des paroles, dénoncé, raturé dans le film lui-même, le langage y est de trop. Et pourtant ça ne cesse de parler, trop, de manière maladroite. Un peu comme dans la carte postale de Jacques Derrida, cette joyeuse déconstruction de ses propres effets de style. Et puis il y a l’art de la citation, chaque phrase est un intensif (Lyotard), on peut le saisir, on peut le lâcher, s’en servir ou simplement passer à côté. Ce n’est pas grave. Dans un film industriel, il faut tout comprendre, le réalisateur a fait en sorte que tout soit négociable et audible, que le public ne rate rien, comme si on pouvait ne rien rater, comme si la perception n’était pas un reste. Dans Nouvelle Vague il y a un reste, on ne voit pas tout, on entend pas tout. L’oeuvre dépasse ma capacité perceptive, et je retrouve par là même le mouvement du devenir, son inextricabilité: sentir de ne pas tout sentir, sentir parce que le monde nous déborde, que la perception est locale et discrète, que la continuité n’est qu’un effet de style, disons un réflexe.

Peut-être ai-je été hanté plus jeune par la figure de Domiziana Giordano. Je l’avais croisé une fois rue du Dragon.


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