LITTE - RATURE
Comment ça la crise sociale couve en France ? Un petit récit à suivre d’un grand auteur qui n’existe pas, c’est le programme de ce mercredi et du (des)
prochains.
C’est ici que débute notre histoire. Au milieu de ces tours sordides qui connaissent un taux de natalité proche de celui du rat musqué ou des souris de laboratoire.
Durant les années 70 les H.L.M poussèrent ici comme autant de gros champignons vénéneux dans les sous-bois après plusieurs jours de pluie. On y accueillait et entassait dans la plus grande confusion les ouvriers maçons chassés du centre ville, les chômeurs chroniques, les beatnicks sur le retour, les polacks et les ritals de seconde génération, et bien sur les arabes et les blacks qui fuyaient l’Afrique. Je me souviens qu’un des politiques locaux, à l’époque où un certain racisme primaire était encore toléré sans que le ligue des droits de l’homme ne puisse vous tomber sur le râble, avait osé comparer cette entrée massive d’immigrés à un nuage de sauterelles, en précisant que « partout où passent ces nuages de bestioles, il ne reste plus rien que la désolation, mais qu’au moins, elles, elles finissent par s’en aller poussées par le vent, tandis que « eux », ils s’établissent durablement et remodèle le quartier à leur image ». Par image, il fallait comprendre la saleté et l’odeur, la violence et la précarité, cela va sans dire.
En trente ans, presque rien n’a changé, si ce n’est en pire, et que les paroles sont aujourd’hui plus mesurées en public. Ici les habitations sont situées en « zone d’habitation prioritaire » et les collèges sont en « zone d’éducation prioritaire ». Prioritaire, c’est un épithète malin, qui permet de donner aux autochtones le sentiment que l’on va s’occuper d’eux, tôt ou tard. C’est imminent, ça va venir, un peu de patience, Sœur Anne, ne vois tu donc rien venir ? Tout ici fonctionne par sigle, la misère s’affuble parfois d’une pudeur étonnante. Les REP, les ZUP, sont les réservoirs inépuisables du RMI, de l’ANPE, des CES et de la CMU, sans oublier les SDF. L’extrême droite souhaiterait y ajouter les CRS, histoire de remettre un peu d’ordre par un joli couvre feu quotidien, et de rétablir certaines valeurs à coups de matraques et de gaz lacrymos. La gauche feint de s’insurger et opte pour le RAF ( Rien à foutre ) général. L’extrême gauche a encore du mal à y voir clair, aveuglée par ses dreadlocks et la fumée du tarpé qui tourne.
(à suivre…)