Dans la nuit du 29 au 30 juin 1860, chez les Kent, à Road Hill House, grande maison bourgeoise du Wilthshire, Saville Kent, trois ans, disparaît de la nursery. Il est retrouvé, un peu plus tard, égorgé de manière atroce, dans les latrines qui jouxtent la demeure.
L'affaire passionne les médias de l'époque, la rumeur. Un détective de Scotland Yard, Jack Whicher, est dépêché sur les lieux. Il s'avère vite que le criminel ne peut être qu'un habitant de la bâtisse, les volets ayant été ouverts de l'intérieur, oui mais lequel ? Les hypothèses et fausses pistes vont bon train tandis qu'on décortique les indices et questionne les domestiques.
Kate Summerscale ne se contente pas dans son essai de dépecer le crime qui suscita autant de passion et d'effervescence à l'époque, en Angleterre, elle met en lumière et en perspective sa place importante dans l'histoire de la criminalité. Elle évoque la création de Scotland Yard, des brigades de détectives, la mise en place de tout un système d'enquête, qui nous semble si évident aujourd'hui, acquis. L'affaire de Road Hill House est, avec d'autres affaires, à l'origine d'une autre vision du foyer bourgeois, autrefois impénétrable, secrète. Elle est également le fondement, en quelque sorte, des premières intrigues policières, et de cette littérature à énigme qui remportera ensuite de plus en plus de succès.
L'affaire de road hill house brosse par le biais d'un crime domestique tout un pan de l'histoire d'Angleterre, et c'est terriblement passionnant. J'ai plongé avec délectation dans ce pavé foisonnant et riche, avide de connaître le dénouement, intéressée par ces portraits très fouillés des protagonistes proches ou lointains du crime, conquise par l'excellente technique de Kate Summerscale qui sait rendre chaque détail captivant. Ce livre est une réussite.
Un petit extrait...instructif
"Le mot clue [indice] vient de clew, qui désigne une pelote de fil. Il en est venu à signifier "ce qui indique le chemin" en raison du mythe grec dans lequel Thésée utilise, pour ressortir du labyrinthe du Minotaure, une pelote de fil que lui a remise Ariane. Les auteurs du milieu du dix-neuvième siècle avaient encore cette image à l'esprit lorsqu'ils employaient le mot. "C'est toujours un plaisir que de débrouiller un mystère, de saisir ce fil [clue] ténu qui conduira à la certitude", note Elizabeth Gaskell en 1848. "Je crus voir le bout d'un fil rouge", déclare le narrateur dans The Female Detective d'Andrew Forrester (1864). William Wills, adjoint de Dickens, rendit hommage en 1850 à la grande intelligence de Whicher en faisant observer que ce détective trouvait la voie même quand "chaque fil conducteur semble coupé". "Je croyais avoir le fil en main, dit le narrateur de La Dame en blanc dans un épisode publié en juin 1860. Combien j'étais ignorant, alors, des tours et détours du dédale où j'allais encore me fourvoyer !" Une intrigue était une sorte de noeud et une histoire s'achevait par un dénouement."
Un livre lu dans le cadre du grand prix des lectrices de
2009Catégorie Document
ISBN 978-2-267-01981-0 - 25€ - 05/2008
Lu par Loutarwen, Clochette et Amanda, qui l'ont trouvé passionnant, aussi.
Enna a eu l'impression que se logeaient trop d'éléments dans ce livre, malgré tout intéressant