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Antonella Anedda/Per un nuovo inverno

Par Angèle Paoli
« Poésie d'un jour
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PER UN NUOVO INVERNO

nella morte di A.R. [Amelia Rosselli]


Se non fosse che questo : giungere a un luogo
esattamente pronunciarne il nome, essere a casa.

Felice inverno adesso che il nuovo inverno è passato
da un inizio per noi ancora senza nome
non diverso dal varco estivo di reti
forse, un cerchio debole di lumi.

Intorno solo piante
che non avresti fatto in tempo a scansare
acqua soffiata sulle pietre ― grandine
che mai sapremo se è arrivata col suono
che faceva sui tetti là nel tuo tempo
nella bianca, umana pulizia dei bagni.
Finora solo passi recisi
che forse ascolti con ardente silenzio
e aria tra gli aranci mossi piano dai vivi.

Vedi qui nulla per la prima volta si perde.
Stamattina hanno buttato la terra
fredda ― colma della gioia dell’acqua
ha dimenticato per te
la sbarra della sedia, la nuca rovesciata
il vento del cortile.
Così felice notte ora che di nuovo è notte
e non è vero che il gelo resti
e abbassi piano il pensiero
forse uno scatto invece schiude qualcosa in alto
molto in alto ―
una nota
oltre il becco oltre gli occhi lucenti di un uccello
una scheggia di collina ― quella laggiù
serrata al tetto verde-bronzo della chiesa.
Felice notte a te
per sempre priva di abisso, una steppa dell’anima-sommessa
dove l’ulivo si piega senza suono
Gerusalemme della quiete
della quiete e del tronco che cerchia e incide la morte
che la succhia nel vuoto e nel vuoto la getta
e la macera piano.

Non ho voce, né canto
ma una lingua intrecciata di paglia
una lingua di corda e sale chiusa nel pugno
e fitto in ogni fessura
nel cancello di casa che batte sul tumulo duro dell’alba
dal buio al buio
per chi resta
per chi ruota.

Antonella Anedda, Per un nuovo inverno in Notti di pace occidentale, Donzelli Editore, 2001, pp. 65-66.



POUR UN NOUVEL HIVER

À la mort d’A.R. [Amelia Rosselli]


S’il suffisait de ceci : arriver quelque part
en prononcer parfaitement le nom, être à la maison.

Heureux hiver quand le nouvel hiver est passé
d’un début qui pour nous est encore sans nom
proche du chemin des filets, l’été
peut-être, un faible cercle de lueurs.
Autour, des plantes seules
que tu n’aurais pas eu le temps de déplacer
de l’eau sur les pierres soufflée ― la grêle
nous ne saurons jamais si elle est arrivée au bruit
qu’elle faisait sur les toits, là à ton époque
dans la propreté blanche et humaine des sanitaires.
Jusque là, juste des pas nets
que tu écoutes peut-être avec un ardent silence
et l’air entre les orangers agités lentement par la main des vivants.

Tu vois, ici pour la première fois, rien ne se perd.
ce matin, ils ont battu la terre
froide ― comblée par la joie des eaux
le vent dans la cour
a oublié pour toi
la barre de la chaise, la nuque renversée.
Bonne nuit maintenant qu’il fait nuit à nouveau
et il est faux que le gel durera
et doucement tu abaisses la pensée
peut-être un déclic déclenche-t-il quelque chose en hauteur
très haut ―
une note
au-delà du bec, au-delà des yeux brillants d’un oiseau
un éclair de colline ― celle-là en bas
collée au toit vert bronze de l’église.
Bonne nuit à toi
à jamais privée d’abîme une steppe de l’âme étouffée
où l’olivier se plie sans un bruit
Jérusalem de la quiétude
de la quiétude et du tronc qui encercle et inscrit la mort
qui l’aspire dans le vide et dans le vide la jette
et la mâche lentement.

Je n’ai ni voix ni chant
mais une langue tressée de paille
une langue de corde et du sel dans mon poing
plein pour chaque fissure
dans le portail de la maison qui frappe sur le tombeau dur de l’aube
de l’obscurité à l’obscurité,
pour qui reste
pour qui tourne.

Antonella Anedda, Pour un nouvel hiver, in Nuits de paix occidentale ; 30 ans de poésie Italienne, Po&sie 110, 1975-2004, Éditions Belin, 2005, pp. 399-400. Traduction de Martin Rueff.

  Dédié à Amelia Rosselli, Per un nuovo inverno a été écrit un mois après le suicide de la grande poétesse italienne, survenu à Rome le 11 février 1996. « Les vers d’Antonella Anedda transforment le gel d’un adieu en un dialogue affectueux au-delà de la mort ».


BIO-BIBLIOGRAPHIE

  D’origine sarde et corse (par sa grand-mère), Antonella Anedda (Antonella Anedda-Angioy) est née en 1958 [et non pas en 1955] à Rome où elle a suivi des études d’histoire de l’art. Elle partage son temps entre la « Ville éternelle » et la Sardaigne, et enseigne actuellement le français à la Faculté des lettres et de philosophie de l'Université de Sienne/Arezzo. Elle écrit dans de nombreux périodiques et revues : Il Manifesto, Legendaria, Linea d’ombra, MicroMega, Nuovi Argomenti (éditions Mondadori), Poesia (éditions Crocetti).

  Antonella Anedda est l’auteure de quatre recueils de poésie :

- Residenze Invernali (Crocetti, Milan, 1992), pour lequel elle a reçu le prix Sinisgalli, le prix Diego Valeri et le Tratti Poetry Prize ;
- Notti di pace occidentale (Donzelli, Rome, septembre 1999). Prix Montale 2000 ;
- Il catalogo della gioia (Donzelli, Rome, 2003) ;
- Dal balcone del corpo (Mondadori, Collection Lo specchio, Milan, juin 2007). Prix Napoli 2007.

  Elle a également publié trois recueils d’essais et nouvelles :

- Cosa sono gli anni (Fazi Editore, Rome, 1997) ;
- La luce delle cose (Feltrinelli, Milan, 2000) ;
- Tre stazioni (LietoColle, Faloppio, 2003).

  En tant que traductrice, elle a aussi publié une anthologie de poèmes de Philippe Jaccottet : Appunti per una semina : poesie e prose 1954-1994 (Fondazione Piazzolla, Rome, 1994), outre un recueil de variations poétiques et de poésies étrangères intitulé Nomi Distanti (Empiria, Rome, 1998).

  Tenue pour l’une des voix les plus originales de la poésie italienne contemporaine, Antonella Anedda est présente dans de très nombreuses anthologies italiennes et étrangères. Une traduction en français de Notti di pace occidentale (Nuits de paix occidentale & autres poèmes) est parue le 7 novembre 2008 aux éditions bordelaises L'Escampette (traduction de Jean-Baptiste Para, directeur de la revue Europe). Certains des poèmes traduits dans ce recueil ont déjà paru dans le n° 1 de la revue Confluences poétiques (Mercure de France, mars 2006), dans le n° 132 (décembre 2006) de la revue Décharge et dans le n° 20 (automne-hiver 2007) de la revue Rehauts.



ANTONELLA ANEDDA

Anedda1

Source

Voir aussi, sur Terres de femmes :
- Antonella Anedda/février, nuit ;
- Antonella Anedda/mars, nuit ;
- Antonella Anedda/mai, nuit ;
- Antonella Anedda/octobre, nuit ;
- 13 décembre ****/Fête de sainte Lucie (décembre, nuit) ;
- Antonella Anedda/Avant l’heure du dîner ;
- Antonella Anedda/Le dit de l’abandon ;
- Antonella Anedda/S ;
- (dans la Galerie « Visages de femmes » de Terres de femmes) le portrait d'Antonella Anedda (+ deux poèmes extraits de Nomi distanti et de Notti di pace occidentale).

Voir encore :
-
les pages que le site Italian Poetry a consacrées à Antonella Anedda ;
- (sur Poetry International Web) un dossier Antonella Anedda ;
- (sur Niederngasse 16, janvier-mars 2006) un entretien (en italien) avec Antonella Anedda ;
- (sur Her circle ezine) Antonella Anedda: Encounters with Silence, the Page, and the World (7 mars 2008).



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