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Roberto Alajmo, UN COEUR DE MERE > FILS DE PERSONNE (critique)

Par Topolivres
Où il est question entre autres du fichu caractère d'une île, des infimes dingueries de ses habitants et de leurs fonds les moins limpides
Roberto Alajmo DR / Etna © Rino Porrovecchio FILS DE PERSONNE (critique)" /> FILS DE PERSONNE (critique)" /> FILS DE PERSONNE (critique)" />
Roberto Alajmo est un raconteur d'histoires et il est sicilien. Ce qui n'est pas une manière périphrastique, péjorative ou minimisante de dire "écrivain italien". Il observe l'humanité en faisant résonner les anfractuosités du bijou baroque de terre volcanique et d'épais tissus familiaux agrégés que la botte porte à l'orteil. Certaines de ses histoires prennent la forme de romans, deux ont paru à ce jour chez Rivages, mais sa besace contient à grand-peine les cent et mille petits romans-fleuve concentrés dans les extraits de Sicile qu'il collecte depuis des années, prélevant à même la vie et les faits jusque dans des passés enfouis, sondant le fichu caractère de l'île, les infimes dingueries de ses habitants ou leurs fonds les moins limpides.
Comme son écriture, Roberto Alajmo a le cheveu court et le teint brun, la manche de la veste remontée juste ce qu'il faut pour mettre en confiance, l'air posé. Remarquant qu'en même temps qu'il était absorbé à retracer le parcours rocambolesque des cendres de Pirandello à travers l'Italie, il était aussi en train de s'assurer sur sa propre personne de l'intégrité de l'oreille dont Cosimo avait été amputé par l'enfant qu'il gardait tout innocemment en otage dans Un coeur de mère, j'ai pensé que décidément, les apparences trompent parfois. (A ce stade de la narration, quatre voyageurs jouent aux cartes attablés autour de l'urne du Nobel sicilien. Une dame dans l'assistance s'esclaffe à tout rompre. Roberto Alajmo est en ce dimanche de fin juin l'invité de la Mairie du 13ème arrondissement et de la Libreria à l'occasion de la 7ème Semaine italienne organisée à Paris. Il continue quelques instants puis cesse de se tourmenter l'oreille entre pouce et index. De l'endroit où je me tiens, à environ deux mètres de sa table d'intervenant et deux un quart du vrombissement de la rue, son lobe semble intact.)
Dans son dernier roman publié en français début avril, l'auteur accompagne Tancredi Ciraulo (c'est son nom), la vingtaine terne et inerte, au centre d'une ronde macabre dont il se serait sans doute bien passé et qui le dépasse en tout cas assez largement. La superbe Volvo éraflée, le meurtre de son père commis, Tancredi n'a plus guère qu'à se faire tout petit, encore plus petit et attendre. Les Ciraulo constituent une famille soudée, tant bien que mal ils ont toujours trouvé moyen de s'arranger avec les vagues revenus du désossement d'épaves dans le port de Palerme : ils se débrouilleront encore pour gérer cette mort par balle. Le récit grince, rit sans rire, fouille bas et menu. Fils de personne se lit deux fois d'une traite et chaque lecture offre le plaisir pourtant inégalable d'une glace jasmin-cannelle.
Note : l'entretien qui suit a été réalisé sur un coin d'estrade improbable posé place d'Italie à Paris. Le vacarme du début, qui vous surprendra peut-être si vous écoutez le podcast en VO, rend in/volontairement l'extraordinaire amplitude des sons de Palerme. Une ville qui dialogue à coups de klaxons presque à s'en étourdir ; et au détour d'une oasis soudain le craquètement singulier d'un grillon.
Roberto Alajmo est né à Palerme en 1959. Journaliste, chroniqueur, critique et éditorialiste, il collabore actuellement à la Rai et au quotidien la Repubblica. Il a publié les ouvrages Una serata con Wagner (Palerme, Novecento 1986), Un lenzuolo contro la mafia (Palerme, Gelka 1993), Epica della città normale (Palerme, La Battaglia 1993), Almanacco siciliano delle morti presunte (La Battaglia 1997), Le Scarpe di Polifemo e altre storie siciliane (Milan, Feltrinelli 1998), Notizia del disastro (Milan, Garzanti 2001, Prix Mondello), Un coeur de mère (Milan, Mondadori 2003 / Paris, Rivages 2005, finaliste des Prix Strega et Campiello), Nuovo repertorio dei pazzi della città di Palermo (Mondadori 2004), Fils de personne (Mondadori 2005 / Rivages 2007, finaliste du Prix Viareggio), Palermo è una cipolla (Rome-Bari, Laterza 2005), Enciclopedia della memoria irrilevante (Palerme, Mondellolido 2006). Il est également l'auteur de pièces de théâtre et du livret d'opéra Ellis Island (Palerme, Teatro Massimo 2002, en collaboration avec le compositeur Giovanni Sollima). Aux dernières nouvelles, il pense que l'Etna est une femme. Aux éditions Laterza paraît en octobre 1982 - Memorie di un giovane vecchio.
Alice Guzzini
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Roberto Alajmo
Fils de personne

Traduit de l'italien (E' stato il figlio) par Danièle Valin
Rivages 2007
20 eurosRoberto Alajmo, UN COEUR DE MERE alt= FILS DE PERSONNE (critique)" /> FILS DE PERSONNE (critique)" /> FILS DE PERSONNE (critique)" /> FILS DE PERSONNE (critique)" border="0" title="Roberto Alajmo, UN COEUR DE MERE > FILS DE PERSONNE (critique)" />
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