Magazine Cinéma

67

Par Untel

Je te disais : « il n’y a que les petits oiseaux qui me font chier. » Peut-être aurais-je mieux fait de me taire, et d’attendre un peu que ça décante. Le fait est pourtant. Les petits oiseaux ne sont pas là pour rien : ils sont le symbole de ce pour quoi se bat le personnage : une terre, les grands espaces, sa jeunesse, sa patrie, ses idées politiques, sa foi aussi. Mais pourquoi ces petits oiseaux à la con ? Peut-être parce qu’ils sont le symbole de l’espèce d’innocence à laquelle aspire le personnage, et aussi peut-être du Ciel qu’il va rejoindre. Voilà peut-être ce qui me gênerait vraiment : c’est un saint qui, plongé dans la merde et la gueule fracassée contre le mur, martyrisé, s’imagine les petits oiseaux de sa campagne chérie (là je crois que je te provoque un peu). Non, voilà plutôt : le film est superbe, les cadrages sont fantastiques, sont des tableaux de maître, ils signifient et sont d’ailleurs composés comme la peinture religieuse (les exemples ne manquent pas de compositions tranchées, magnifiques d’ailleurs – sans compter les portraits christiques, l’image du corps décharné du christ mort). Le film révèle d’une certains façon la beauté de l’action des prisonniers, en utilisant la merde et la pisse dans laquelle ils vivent : comme celui qui peint les murs de sa cellule. Peut-être qu’on pourrait lui reprocher sa beauté même. Prends le gardien de prison : on voit les traces des coups qu’il donne aux prisonniers, il est seul lorsqu’il fume sa clope sous la neige, mais on cherche encore ce qu’il y a derrière ses yeux glacials, et on n’y voit pas la moindre faille, la moindre passion, je ne sais pas moi, de la haine qui pourrait justifier qu’il soit pris dans cette tempête de merde, qu’il en soit une des forces. De même, où sont les failles des prisonniers ? Rien ne les ferait céder. C’est en quelque sorte trop beau pour être humain et, justement, il s’agit de politique : les membres de l’IRA sont des saints. Des saints martyrisés dont le combat serait en quelque sorte naïf, absurde et démesuré : celui de l’enfant irlandais attaché à sa terre, aspirant au sublime du combat pour sa foi. Peut-être est-ce ce qu’il veut dire lorsque le prêtre, lorsqu’il discute avec Bobby Sands, lui reproche de ne pas aimer la vie ; le film essaie de contredire cette affirmation, par les flashbacks vers la jeunesse du personnage, et par les images de la nature irlandaise, pendant l’agonie, mais justement ces images me semblent tellement contradictoire avec le reste du film, avec ce que fait le personnage, que j’ai du mal à croire à l’humanité de ce personnage.

Une erreur de lecture de Hunger, le film de Steve McQueen



Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Untel 4 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines