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Chronique d'un vice impuni

Par Sammy Fisher Jr
L'autre jour, en attendant que la voie de mon train soit affichée (il peut parfois s'avérer être très agaçant d'être en avance, pensez-y avant de vous précipitez), je suis allé faire un tour dans une de ces librairies qui pour être de gare, ne vendent pas seulement des romans du même nom. Celle-ci est d'ailleurs particulièrement bien fournie ; le fait qu'elle soit située en plein coeur de la gare de Lyon n'étant peut-être pas étranger à l'affaire.
Dernier coup d'œil au panneau électronique, avant de jeter le premier sur les journaux du jour, ceux du matin et ceux du soir. Les gros titres, les photos, le dessin de Plantu. Je passe ensuite du côté des romans, frôlant au passage un voyageur comme moi en attente d'un train, enjambant une valise, mettant toute mon attention à ne pas renverser une pile de romans qui finiront de toute façon au pilon, et c'est là que mon regard est attiré par un petit livre posé au niveau de mes yeux comme par un fait exprès. Il a un titre rigolo, où il est question des dessous de la grand-mère de l'auteur et, ah tiens, c'est un Delerm ? Je ne peux pas m'empêcher de feuilleter quelques pages, lisant certaines nouvelles en diagonale. A priori c'est un bon cru. Allez... et puis non, j'ai un tel stock de livres à lire que ce ne serait pas raisonnable. Sans compter que j'aurai le temps de le lire trois fois avant que d'être arrivé. Et puis la bibliothèque finira bien par l'acheter. Je retiens pour plus tard : Delerm, grand-mère, dessous.

Fuyons vite vers les autres rayons. Quelle heure est-il donc ? Trop tôt pour que l'horaire soit affiché, trop tard pour changer de billet. Hélas, je vais devoir continuer à me tenter. Déjà un livre de poche m'offre à la vue sa couverture aguichante. Un recueil de nouvelles de Dino Buzzati que je ne connais pas. Ah, c'est pas pareil ça, il y a de la matière à lire pendant deux heures... Oui mais pas raisonnable, stock à lire, bibliothèque... Bon, dans ce cas, il faut absolument que je le note tout ça quelque part. Ou alors je vais le répéter dans ma tête pour ne pas l'oublier : Delerm, grand-mère, Buzzati, inquiète. La Grand-mère de Delerm est inquiète des nouvelles de Buzzati. Les dessous Buzzati inquiètent grand-mère Delerm...

Oh, et ça, qu'est ce que c'est ? On dirait les dessins qui ornent les couvertures des tomes d'Harry Potter. Mais oui, c'est bien ça. Les contes de Beedle le barde, j'en avais entendu parler. Quelques semaines avant Noël, c'est tellement commercial que c'en est presque écoeurant. Je suis malgré tout à deux doigts de succomber. Qui ne voudrait entendre à nouveau la voix de Dumbledore ? Hum. Trop commercial. Je ne vais pas tomber dans le panneau quand même ! On retient malgré tout, les dessous affriolants de Delerm inquiètent Buzzati et Beedle le barde !

Continuant ma déambulation, tout en regardant ma montre à intervalles réguliers, j'avise, négligemment posé à un bout d'étagère comme si il ne s'agissait que d'un écrivain mineur, un livre de Stefan Zweig dont le titre ne me dit rien. Un inédit ! C'est trop, cette fois, je m'en vais. En passant, je survole du regard (bien malgré moi) les titres des essais, souriant devant l'un, soupirant devant l'autre, me retenant de saisir un troisième.

J'enjambe un sac, frôle un voyageur en attente d'un train, m'efforce de ne pas renverser une pile de futures ex-nouveautés, et continue la litanie, Delerm, Buzzati, Beedle, Zweig, dessous, nouvelles, contes, passé ; Beedle le barde trop commercial, les nouvelles inquiètes des dessous affriolants, la grand-mère de Delerm voyage dans le passé, le stock à lire, la bibliothèque... des pages et des pages à découvrir un jour, lorsque je succomberai encore à ce vice impuni, la lecture.

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