En cette fin d’année 2008, un constat peut être fait : « Hokuto No Ken » est plus que jamais de retour, ce qui n’est pas sans raviver les souvenirs émus de la génération Club Dorothée qui a été en son temps élevée à grand coups de Hokuto Shinken dévastateur. Après la sortie en France des nouveaux films sur l’univers de « Ken le Survivant » (comme on l’appelait chez nous) grâce à Kaze et Eurozoom, les éditions Asuka avaient frappé un grand coup en rééditant le cultissime manga originel de Tetsuo Hara et Buronson, jusqu’ici édité honteusement chez « feu » J’ai Lu, en proposant enfin une édition de qualité à la hauteur du manga. Mais une bonne nouvelle n’arrivant jamais seule, voilà que débarquent chez nous les mangas « spin-offs » de l’univers d’ »Hokuto No Ken », avec des séries consacrées aux personnages forts de la série, à savoir Toki, Rei, et bien sur Raoh, alias Ken-Oh « Le roi du poing ». L’occasion inespérée de développer un univers et une série devenue culte pour toute une génération. « La Légende de Raoh » (« Ten no Haou Hokuto No Ken Rao Gaiden » de son titre original) est le premier spin-off à venir tenter de combler les attentes des fans. Un pari risqué quand on connaît l’exigence des fans de la première heure…
Prenant place peu après la destruction quasi-totale de l’humanité par le feu nucléaire, univers post-apocalyptique indissociable du récit d’Hokuto No Ken, La Légende de Raoh permet au lecteur de suivre le parcours et l’ascension fulgurante de Raoh, ainé des frères du Hokuto Shinken, dans sa quête de pouvoir et de puissance, qui le conduiront à terme à asseoir sa domination par le force sous le titre de « Ken-Oh » (« Le Roi du Poing »). Le pari de centrer ainsi le récit autour de ce personnage culte se révèle ainsi aussi indispensable que risqué, tant Raoh est un personnage fort de l’univers d’Hokuto No Ken. Rarement un personnage dit méchant d’un manga aura eu en effet un charisme et une présence aussi forte que ce dernier, dont la brutalité, l’ego et la puissance sans limite l’ont fait rentrer face à Kenshiro au panthéon des personnages cultes de l’univers manga.
La Légende de Raoh retrace l’ascension du futur Ken’Oh, de ses débuts errant de ville en ville afin de rassembler ce qui sera par la suite sa puissante armée, à sa rencontre avec son futur cheval Koku’Oh (« Le Roi Noir), en passant bien sur par sa guerre continuelle l’opposant aux représentants du Nanto Seiken, dont Souther, l’empereur de la Croix du Sud, sera le principal ennemi… autant de passages indispensables à découvrir pour le fan de la première heure de Hokuto No Ken, qui retrouvera pour l’occasion tout le talent de scénariste de Buronson, secondé pour l’occasion par Tetsuo Hara lui-même.
Parallèlement à l’univers mythique inventé par Buronson, c’est également bien sur la plume inimitable et si particulière de Tetsuo Hara qui a permis à Hokuto No Ken de marquer les esprits de toute une génération. Avec ses personnages sombres et charismatiques, souvent démesurées, et son souci du détail en terme de chara-design, de décors et de fluidité des mouvements, Hokuto No Ken est un manga qui a réussi un imprimer une image graphique forte dans la mémoire des fans.
Reprendre le flambeau d’un dessinateur considéré comme irremplaçable semble ainsi mission impossible, et pourtant c’est le défi relevé pour l’occasion par Youkow Asada, jeune mangaka plutôt habitué aux shonen bon marchés qu’aux fresques grandioses comme Hokuto No Ken…
Le pari a le mérite d’être salué, même si le résultat final risque d’en faire frémir plus d’un, car c’est peu dire que le graphisme de Tetsuo Hara et celui de son jeune héritier sont littéralement opposés. Aux oubliettes les pages sombres et chargés du Hokuto No Ken original, place désormais à un dessin anguleux et épuré, aux arrières-plans minimalistes et sans saveur. Pire, les personnages eux-mêmes semblent tirés d’un mauvais shonen, avec par exemple ce guerrier tirant plus du singe que de l’homme se battant à coups de kunais et autres shurikens (l’effet Naruto ?) dont Raoh ne fera qu’une bouchée. Roah d’ailleurs subit lui-même de plein fouet les frais de ce lifting, prenant l’apparence d’une montagne de muscle juvénile au chara-design aseptisé, accompagné pour l’occasion de deux lieutenants aussi inutiles qu’encombrants lorsque l’on se souvient du caractère brutal et solitaire du Ken’Oh d’antan…La déception est donc au rendez-vous pour les fans de la première heure, surtout lorsque les diverses scènes de combat perdent leur mordant (on se demanderait presque où est passé le vrai Hokuto Shinken…), et que d’autres scènes vouées à devenir cultes (le face-à-face avec Koku-Oh) deviennent quasiment ridicules…
Attendu au tournant par toute une génération de fans assidus, La Légende de Raoh adopte au final un double visage : d’un coté l’immense joie de retrouver un personnage culte de l’univers d’Hokuto No Ken et de voir enfin sa fulgurante ascension de maître du monde ; de l’autre la déception de se retrouver face à un graphisme sans saveur, très typé shonen, qui, s’il a le mérite de plaire à la nouvelle génération et ainsi de leur faire découvrir l’œuvre culte de Tetsuo Hara et Buronson, ne saura trouver foi envers les fans de la première heure. Un quasi choc des cultures en quelque sorte…
La Légende de Raoh
Titre original : Hokuto no Ken Raoh Gaiden (天の覇王 北斗の拳 ラオウ外伝)
Dessins : Youkow Osada
Scénario : Tetsuo Hara / Buronson
Editeur VO : Coamix
Editeur VF : Asuka
Première publication en 2006 par Shinchosha Publishing
Série complète en 5 tomes
Spiky
Plus d’infos : www.asuka.fr
Ten no Haou Hokuto No Ken Rao Gaiden © Youkow OSADA Tetsuo Hara BURONSON 2006 – All rights reserved.