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La poésie venue du froid

Par Chatperlipopette

La poésie venue du froid Dernièrement, un recueil de poèmes choisis trônait sur la table des nouveautés de la médiathèque. Je me suis alors approchée et après feuilletage et manipulation dudit recueil, je l'ai embarqué, très curieuse de découvrir la poésie finlandaise!

Pentti Holappa est un des grands poètes finlandais contemporains, sinon le plus grand. Je ne connaissais absolument pas ce poète aussi me suis-je promenée au gré de mes lectures picorées du recueil dans un univers parfois sombre mais d'une grande beauté, dans une langue parfois crue mais d'une fulgurance poignante, dans un monde où la pudeur côtoie la sensualité et la sensibilité.

Une belle découverte au souffle tumultueux et rude comme un voyage inattendu dans une contrée qui se dévoile.


Trois poèmes m'ont particulièrement touchée...

Le filet cuirassé des racines couvre la terre. Rampantes, jointures puissantes et nuques luisantes, elles jaillissent de la tourbe puis plongent dans la fissure du rocher, dans les failles de l'éboulis. Depuis le rivage du Sud jusqu'à la limite boréale des arbres, en Laponie, elles lient la fine couche de terre au socle rocheux. La mer suce de son côté la matière flottante. La pluie, la brume même séduisent la vase, la boue et le sable, mais les racines de l'arbre enserrent la terre et la forcent de rester fidèle. Et la forêt est fichée par-dessus.


Il y a bien peu de temps les animaux se sont levés de leurs racines, ils se sont mis à ramper, à voler, à nager. Certains marchent même.


Je lève un pied, puis l'autre sur le sentier, je regarde. Les pieds sont faits pour l'arrêt. Les pieds tâtent le sol qui fourmille d'évènements immobiles. Les pieds comprennent. Je les glisse entre les racines, je les arrache d'un seul coup.


Un quart d'heure est passé, voici l'avion. Ils sont assis, liés par leur ceinture de sécurié, je suis parmi les autres. je bâtis consciencieusement mes inexpériences. Ainsi je me rejette et je reste au coeur de la brume, parmi les arbres. L'eau coule en moi, elle remonte, elle ruisselle. Une pensée s'enracine dans la chair, l'existence.


(in Une ville illuminée dans la nuit artique, 1985)

La nuit vint, puis la neige aussi,
Sous la cape de neige une montagne.
A mille mètres de profondeur
sous la montagne il y a une torche,
qui brûle. Je la veux
en soleil pour ma nuit,
je veux l'impossible,
absolument.

(in traces de doigts dans le vide, 1991)

La feuille de papier blanc et le parfum de ta peau sont assez de matière pour un poème immortel.
La feuille de papier blanc, le parfum de ta peau sans crier gare se dissipent dans le ciel.

Les poèmes du recueil "Les mots longs" sont traduits du finnois par Gabriel Rebourcet

La poésie venue du froid


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