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Adolescences. Stephen King et la Tour Sombre.

Par Thomz

I realised that what I wanted to write was a novel that contained Tolkien’s sense of quest and magic but set against Sergio Leone’s almost absurdly majestic Western backdrop.

S

tephen King.

On peut considérer, avec un peu d’imagination, que le cycle de la Tour Sombre (inspiré par le poème de Robert Browning « Childe Roland to the Dark Tower came »), sept volumes, est la colonne vertébrale de toute son œuvre. Quoique ce serait lui donner un corps, faire d’elle quelque chose ayant une forme, une consistance qu’elle n’a pas. Commencé après ses premiers romans, terminé vingt-cinq après, King publie toujours depuis, a un rythme effréné. Pour faire simple : la Tour Sombre a rayonné sur une grande partie des ouvrages de King, autant que ses autres ouvrages ont rayonné sur la Tour Sombre, jusqu’à ce que l’écrivain s’y invite lui-même, en tant que personnage. Plus simple encore, à juste titre ou non, la Tour Sombre est le Nœud de l’œuvre de King. Dire cela, c’est tout et ne rien dire. Evidemment. Multiples réseaux de sens, de correspondances, motifs répétés, appuyés, distordus, personnages (Randall Flagg !) récurrents. Le détail viendra soyez-en sûrs. Quelques pistes tout de même pour débuter ce qui sera l’exercice de fond de cette année 2009, que j’essaierai de terminer, que je terminerai sans aucun doute. Parce que la lecture de ce cycle et plus largement d’une partie importante de l’œuvre de King possède pour mon passif de lecteur adolescent une forme d’éclat qui n’a pas encore totalement faibli, en attendant l’épreuve du temps. Ses livres sont avant tout le souvenir de lectures de longue haleine, de ces petits volumes noirs de chez J’ai Lu qui peuplent encore les bas rayons de ma bibliothèques, décrépits, des pages manquent sans aucun doute, la reliure ne tient plus que par intervention divine mais chacun possède une place particulière. Pardonnez-moi à l’avance mes approximations, jugements à l’emporte pièce balancés sans aucune note de bas de page (allergie temporaire), ni même citation ou allusion précise. Je n’ai pas la prétention de me souvenir de tout dans ces romans, de les avoir tous lus, ni même de me souvenir de tous ceux que j’ai lus. S’il est une œuvre qui brille par les écarts qualitatifs c’est surement celle de King. A boire et à manger dirons-nous. J’ai pourtant rarement lu des pages aussi sensées (à défaut d’être d’une beauté littéraire parfaite) sur l’adolescence et le passage à l’âge adulte qui représente la partie la plus importance de çA. Cela marque quand on a 13 ans et que l’on a rien de mieux à faire que d’enquiller des petits pavés qui ne préfigurent pas encore les grandes lectures à venir, à une époque où les gouts commencent à se dessiner, mais commencent à peine, une époque où l’on est pas embarrassé de critique littéraire, ou l’on est pas forcément au fait de ce qui se fait de mieux même si on commence, où on ne sait pas ce qui se fait de pire alors même qu’il était déjà là, est encore là et sera toujours là, même si l’on a quelques marottes, quelques conseils d’adultes bienveillants. Passons.

King donc, dont la lecture est le moment parfait pour devenir un lecteur et le rester. Je dois avouer que je ne lis plus rien de lui, par manque de temps sans doute, peut-être parce que j’ai peur que cela ne me touche plus comme avant. Et aussi parce que ses romans m’intéressent beaucoup moins, tout simplement. J’ai du lire Cell, qui est au mieux médiocre mais qui a su assouvir ma passion pour la sous-culture zombie et Lost Hearts In Atlantis, pas entièrement raté parce qu’y résonne en sourdine l’appel de la Tour Sombre (et qu’on l’y retrouvera).

Le premier volume, d’abord publié sous la forme d’un feuilleton, s’intitule The Gunslinger et débute par cette phrase mythique pour tous les lecteurs du cycle, tant elle trouvera de multiples échos jusqu’à la fin :

The man in black fled across the desert, and the gunslinger followed.

Voilà la trame de ce premier roman sur sept. Ce pistolero est le dernier de son genre, reste d’une civilisation qui a disparue (on ne saura le comment et le pourquoi que bien plus tard). Dans un monde qui par certains aspects ressemble au notre (on y chante Hey Jude, les personnages y portent des jeans, connaissent les piles nucléaires, ont une compagnie d’énergie qui s’appelle North Central Positronics…). Deux colts énormes en bandoulière. On imagine Clint Eastwood sans aucun problème. 25 ans après, le roman a vieilli et ne fut sans doute jamais très bon, même si la version remaniée parue il y a cinq ans arrange quelques gros défauts, de concordance avec les autres volumes notamment. De cette chasse, on peut retenir [sans déflorer ce qui se déroule pour ne pas gâcher le plaisir de l’éventuel lecteur] la fusillade qui a lieu dans la bourgade de Tull, la rencontre avec Jake qui vient de notre New York et qui est peut être mort, ou non. Le monde du pistolero est peut être le purgatoire du notre, sa promesse, une version inachevée, archaïque peut-être. « There are other worlds, then » s’écrie Jake à un moment crucial de ce roman mal fagoté, qui souffre de la forme feuilletonesque de ses débuts avant que les volumes suivants ne viennent corriger le tir.

Non, l’essentiel est à trouver ailleurs : dans la puissance d’évocation que développe le roman, par touches successives. Quelques pistes nous sont données sur la nature du monde qui nous est donné à voir et que le pistolero traverse à la poursuite de l’homme en noir, échos d’un passé glorieux, chevaleresque avant que le monde ne change irrémédiablement. King pose les bases d’un monde qu’il ne cessera de visiter et revisiter toute sa vie, même si cette première pierre n’en manque pas de bons. Le lecteur est plus face des promesses (qui seront tenues), des germes (qui fleuriront au-delà des espérances, notamment lors du tome 4, Wizard And Glass, sans aucun doute le plus beau volume du cycle et le plus beau roman de son auteur). Les grands moments sont encore à venir. On peut lire ce premier volume comme une préface pour faire passer la pilule. On peut renâcler à lire celui-là mais sa beauté étrange, son style encore vert ainsi que sa progression lente suggère bien plus, une longue quête. Mais après avoir lu le dernier volume (The Dark Tower), l’évidence est que le premier apparait primordial à bien des égards pour en appréhender de manière satisfaisante la conclusion. La Tour elle-même, objet ultime de la quête n’est qu’un élément diffus parmi d’autres avant que se décide le destin du pistolero, et que ne se scelle définitivement le pacte d’une lecture qui s'étalera sur quelques milliers de pages.


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