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Anthologie permanente : Alain Madeleine-Perdrillat

Par Florence Trocmé

les mille passants immortels des rues

je les regarde aller ce soir
Passant je suis aussi
mais mortel moi
moi seul

Dans l'entre chien et loup
le souvenir m'est revenu
de la très grosse femme folle aux lèvres rouge sang
et cheveux noirs gominés à l'espagnol
énorme Carmen évincée
qui s'avançait cahin-caha sur le Cours Mirabeau
en pleine lumière (l'été bruissait du délire des fontaines
on riait aux terrasses)
vieille sans âge infiniment souriante à rien
dandinant doucement
son corps tenu par de grands yeux d'enfant

J'ai vu son pied dressé dans un soulier de fée
Elle aussi fut petite
petite fille jouant à la marelle de jadis
enfer et paradis 
avant le temps

Elle serrait contre ses seins
un grand portefeuille craquelé
tout plein de photos de magazine
qu'elle tirait comme cartes
aux jeunes gens abordés Vois-tu
vois-tu bien celui-ci Mario et celui-ci Aldo chéri
et celui-ci Marco mon cher amour et lui encore Alphonse
les jolis cœurs c'était toujours un mot gentil
Ah mère cette voix de sirop
qui disait amoureusement les noms
d'amants imaginaires souriant à jamais
ou bien d'amants idiots qui rirent
sonne en moi comme celle d'une sainte

Alain Madeleine-Perdrillat, De longues absences, La Dogana, 2004.

Contribution d'Alain Paire

Bio-bibliographie d’Alain Madeleine-Perdrillat

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