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Barack Obama à la Maison Blanche : Messie ? Mais non !

Publié le 30 janvier 2009 par Stb

Messie  « Mille fois « bienvenue » à Barack Obama, le premier président noir des Etats-Unis, l'homme du changement, l'intellectuel qui brasse des idées nouvelles -une si heureuse exception dans la classe politique ! Mais cette « Obamania » universelle a aussi quelque chose d'agaçant. Elle montre toute la suprématie des Etats-Unis, elle ravale nos dirigeants au rang de simples gouverneurs de provinces, elle prouve qu'en économie, en politique, dans l'évolution de la société et même dans le domaine culturel, l'élan ne peut venir que d'outre-Atlantique. Non pas tant par volonté hégémonique américaine que par manque de confiance des Européens en quête de modèles. Tout ce qui est « made in USA » devient bon à prendre, jusqu'aux mécanismes tordus recopiés à l'aveuglette qui ont mené à la crise financière ». Comment ne pas souscrire à cette introduction signée de Jean Claude Kiefer, éditorialiste des Dernières Nouvelles d’Alsace ?

C’est tellement vrai qu’au lieu de rechercher une solution européenne à la crise des subprimes, on attend que l’Oncle Sam ou désormais son cousin baraqué nous trouve la solution. On l’image assez vêtu de l’habit rêveur de l’apprenti sorcier que sut si habilement dépeindre Walt Disney ou de celui de Superman pourfendre à la fois le taliban afghan, le mollah iranien, le russe arrogant et le trader dépressif. On l’imagine, mais là n’est pas le pire... On l’attend surtout. 

Comme si l’Europe n’avait jamais existé (ce qui est peut-être le cas ?), comme si la veille Europe ne pouvait plus bouger et attendait que la jeune Amérique vienne remplacer son déambulateur cassé par la tempête.

Pour un peu, cette situation nous ferait même regretter l’activisme européen d’un Nicolas Sarkozy dont la présidence européenne marquera les annales. L’espace de quelques mois, on a entendu parler d’Europe et là, bizarrement alors que l’on avance vers les élections européennes, on n’en parle déjà plus.

La différence entre Nicolas Sarkozy  et son homologue américain se situe pourtant là, Barack Obama sait qu’il a été élu pour appliquer le slogan « America First » alors que le président français a choisi de s’investir ailleurs, sans doute pour prendre de la hauteur et regarder de loin un pays difficilement réformable. Grand bien lui a fait, et osons le dire, cela a servi les intérêts de l’Euro et de l’Europe. Personne ne se pose la question de savoir comment le Franc aurait pu seul traverser la tempête. Mais le Franc, c’était hier et demain a déjà commencé.

Des obamaniaques aux obamaniaco-dépressifs

On pourrait et on devrait sans doute se joindre à la sanctification universelle du Président américain, mais la « real-politik », le pragmatisme invitent à un autre regard. Après la campagne électorale la plus couteuse de l’histoire des Etats-Unis, après l’investiture la plus chère (75 millions de Dollars), on analysera les mots avant d’en mesurer les actes.
On aura sanctifié la diversité de l’Amérique réunifiée tout en disant qu’il n’y a rien de nouveau. Un bel exercice de sémantique appliquée. On aura soulevé un « nouvel élan »  quasi messianique, en collant ainsi aux idées fondatrices de la mystique américaine. On aura annoncé des « lendemains qui changent » insufflant même au monde l’idée que tout ce que fera Obama sera bon pour l’humanité obamo-centrée et l’on aura trouvé le messie d’une pensée magique fortement assise sur des grands noms de l’histoire américaine à l’instar du Président Lincoln ou de Martin Luther King.

Barack Obama, porteur de tout cela, est donc rentré dans l’habit comme on rentre dans la fonction. Avec force effets communicationnels et symboliques, générant une émotion si forte qu’elle sera naturellement de nature à faire passer tous veux qui ont « voté Obama » de par le monde, du statut extatique d’obamaniaques à celui d’obamaniaco-dépressifs.

De la pensée magique aux actes majeurs

Pour s’en percevoir, il a suffit d’écouter le discours  d'investiture du Président Barack Obama, un discours inscrit dans les fondements des valeurs américaines : travail, patriotisme, courage, héritage de l’histoire, victoire sur le fascisme, chute du communisme comme autant de marqueurs d’une foi dans le rôle universel de l’Amérique.

Et il est même des dirigeants européens pour avoir fait le voyage de Washington afin d’entendre un discours dans lequel – semble-t-il, le mot Europe n’a jamais été prononcé !
On attendait là une rupture et c’est finalement une continuité qui s’exprime. Talentueux et séduisant, Barack Obama inaugure l’ère d’un « soft-impérialisme » dont le visage humain n’enlèvera rien aux effets collatéraux pour celles et ceux qui se laisseront séduire.

Et cette séduction a déjà commencé. On demande à l’Europe de prendre part à l’effort de guerre au Moyen Orient, on l’implique « à l’insu de son plein gré » dans la guerre en lui demandant d’accueillir des détenus « libérés » de Guantanamo.

Le tout en ne lui faisant aucun cadeau économique, car là aussi, Obama est un pragmatique. Pour relancer l’économie américaine, il utilisera la planche à billets. En monétarisant la dette, il empêchera l’économie européenne d’être concurrente à l’exportation.

Mais cela, il n’en parlera pas. Il laissera faire. Certains attendaient le messie, ils n’auront en face d’eux d’abord que l’homme d’un état, celui de l’Amérique. Ne sera-t-il alors un subprime politique – produit génial un temps, décrié ensuite ? L’avenir nous le dira rapidement. Une partie de son destin pourrait cependant se décider ailleurs. La Chine, refroidie par le discours du nouveau président sur sa monnaie, détient en effet 700 milliards de dollars de bons du trésor américain. De la bienveillance de ce pays  aux prochaines adjudications du Trésor américain dépend une partie de la future relance de l’économie américaine.

Quant à l’Europe, son destin ne dépendra que d’elle, de sa capacité à s’incarner, à être et à imaginer un avenir multipolaire avec des partenaires renouvelés à l’échelle continentale, jusqu’à la Russie !

Stéphane Bourhis


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