Rien de plus dissemblable a priori que Freud et Rodin, l’intellectuel juif viennois plein de mépris pour l’art de son temps et le rude et jouissif créateur autodidacte, refusant de s’engager pour Dreyfus. Ils ne se sont jamais rencontrés et l’exposition peine un peu à lister des passeurs, à chercher qui a pu connaître l’un et l’autre ; ce n’est pas sa partie la plus intéressante.
Car ce qui les relie dans cette exposition au Musée Rodin jusqu’au 22 février, c’est leur passion commune pour l’antiquité, pour les collections d’objets anciens (la collection d’objets primitifs de Freud n’étant pas abordée ici). Mais leur approche est bien différente.
Rodin s’intéresse aux formes, il collectionne des bras, des torses, des fronts qui s’entassent dans son atelier. Peu lui importent la provenance, semble-t-il, ni même l’authenticité (beaucoup de faux dans sa collection, murmure-t-on), mais des fragments qui vont l’inspirer, le nourrir, voire même l’alimenter :


Le rapprochement de ces deux collectionneurs si différents peut paraitre ténu, mais tous deux nourrissent leur oeuvre (plastique ou intellectuelle) de leur collection, omniprésente dans l’atelier ou le cabinet, source continue d’inspiration. Le catalogue en parle assez bien.
Lire ici.
Et si vous allez au Musée Rodin, vous verrez aussi Laocoon, les trois installations d’Etienne Bossut, trois monstres faits de formes de plastique assemblées : écho lointain de l’Antique, écho aussi de Lessing, de sa réflexion sur l’espace face au temps et de l’autonomie de l’art par rapport à la poésie. Beaucoup de bagage pour une telle sculpture.
