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Doute

Par Rob Gordon
DouteLe problème avec les adaptation de pièce de théâtre, c'est qu'elles ont très vite tendance à être dévorées par deux types d'excès. Soit le réalisateur en fait des caisses pour rendre l'ensemble moins statique, soit il s'enferme dans un total dénuement qui peut rendre l'ensemble austère et ennuyeux. Portant sa propre pièce à l'écran (il signe le scénario et la réalisation), John Patrick Shanley parvient à éviter ces deux écueils, trouvant dès le début le juste milieu. Doute est une oeuvre idéalement équilibrée, un vrai film de cinéma au sujet pour le moins passionnant. L'argument est placé sous le signe de l'ambiguïté, celle-ci caractérisant non seulement le prêtre incarné par Philip Seymour Hoffman, mais également les autres personnages, dont le positionnement par rapport aux évènements est parfois trouble.
L'une des nombreuses bonnes idées du film, c'est d'utiliser les pratiques religieuses de ses protagonistes comme un moyen pour eux de se détourner de la vérité, notamment grâce au secret de la confession. Pour autant, Shanley ne signe pas un réquisitoire à charge contre l'Église, qui aurait été beaucoup trop facile et surtout hors de propos. Mis à part ce pour quoi il est suspecté, le père Flynn est même plutôt sympathique (et c'est d'ailleurs là l'origine de ses ennuis). À l'inverse, si l'on met de côté sa détermination à découvrir la vérité, la soeur Aloysius (Meryl Streep) est un personnage tout sauf atatchant, qui confond parfois rigueur et terreur. Des personnages assez fascinants, tout comme la troisième roue du carrosse, la jeune soeur James (Amy Adams) qui s'immisce dans le duel psychologique qui s'installe entre les deux héros, rendant le tout encore plus sinueux.
Porté par des dialogues en or, Doute avance sans temps mort jusqu'à une conclusion très satisfaisante, qui permet au film d'exister bien après le générique de fin. Si la construction fait penser aux pièces de David Mamet, Shanley s'en distingue par son refus de toute perversité superflue, ne jouant jamais au plus malin avec le spectateur, mais lui laissant le soin de juger et de tirer les conclusions qui s'imposent. Un seul défaut vient finalement émailler ce drame assez impeccable : mille excuses, mais Meryl Streep en fait un peu trop dans la peau de cette soeur Aloysius si rigide et austère qu'elle finit par ressembler à Cruella. On n'y croit jamais tout à fait, pas plus qu'au léger revirement final de son personnage. Contrairement à elle, Philip Seymour Hoffman et Amy Adams sont pile dans le ton. Même les plus grandes actrices ont parfois des faiblesses...
7/10

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