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Le sport et la transgression

Publié le 20 novembre 2008 par François Némo @ifbranding


Rugby


Le sport tel que nous le pratiquons dans nos sociétés contemporaines n’est-il pas d’abord un exercice de socialisation. A travers des codes, des règles, un moyen de canaliser les pulsions à travers le lien social. On touche là aux fondements de la civilisation. Notre capacité à créer du progrès. Canaliser les instincts qui nous animent, produire une énergie positive, constructive.

Nous ne nous y sommes pas trompés en valorisant le sport comme un apprentissage de la vie sociale. Le sport à l’école, le sport dans les fédérations, une cause nationale. On parle de discipline, respecter les codes de bonne conduite, respecter l’adversaire, se dépasser dans l’effort. On parle du rugby comme d’un sport de gentlemen. Un état d’esprit particulièrement cher à Coubertin qui à travers l’olympisme a fait des disciplines sportives un ciment entre les nations. Une ouverture sur le monde puisée aux origines de la démocratie. Le sport pour transcender les conflits nationaux, dépasser les clivages, les intérêts nationaux.

Je ne souléverai pas ici des ambiguïtés qui peuvent accompagner la pratique sportive. Le dopage, les utilisations politiques, l’idéalisation... Là n’est pas mon sujet. J’évoquerai cet état d’esprit que l’on voit se développer récemment autour des compétitions et qui sans aucun doute est lié à leur rentabilité. Les codes ont changé, j’ai même envie d’évoquer un bouleversement qui ne serait pas sans faire bondir M. Coubertin. J’avais abordé le sujet dans ma note du 14 septembre, La BNP à Bercy. En effet dans les disciplines sportives où les enjeux financiers sont élevés, je pense au rugby, au tennis… on passe du sport fraternel au sport de combat. On ouvre les vannes, on fait appel aux vieux démons, conduite impulsive, repli sur soi.

N’est-ce pas particulièrement frappant dans cette publicité pour le match entre le stade français et les Harlequins de Londres ? Quels sont les codes ? C’est une nuit étoilée, on passe à l’ombre, un climat très lourd, des couleurs saturées, violacées, une lueur orangée, il y a un danger qui plane, quelque chose de terrible qui va se passer. Un décor envahissant, plus présent que ne le sont les joueurs eux-mêmes, une ambiance qui n’est pas sans rappeler les films fantastiques et l’univers des jeux vidéo. Il y a dans la typographie une tendance gothique, comme une inscription sur une pierre tombale, en relief, ébréchée. Il y aussi les symboles, la tour de Londres, une prison, le Parlement, plongés dans une obscurité inquiétante et cette épée rayonnante plantée dans un tissu rouge sang qui rappelle la magie, les vieilles traditions nationales, ancestrales, médiévales….

Si vous avez regardé le tournoi de tennis de Shanghaï, vous avez remarqué comme moi l’entrée en scène des tennisman. La musique dramatique, l’ambiance sombre, électrique, de toute évidence on veut que ces deux là s’affrontent comme des gladiateurs. Et s’il y avait du sang, des coups bas ? On sent derrière la mise en scène cette envie de pousser à transgresser les règles, que l’affrontement soit plus brutal, qu’il aille nourrir directement cette part de nous-même qui attend la faille pour se libérer des contraintes sociales (l’éternel combat).

Et si cet état d’esprit participait d’un climat général qui tend à transgresser les règles. Quelle influence sur les jeunes dans le tissu des fédérations. Comment cette image du sport contribue-t-elle à modifier leur perception de la confrontation entre deux hommes ou deux groupes d’hommes. Quelle fraternité, quelle construction entre les individus et quelle vision du monde en général. Comment interpréter l’hymne national dans un tel contexte. Je ne sais pas. Mais ces nouveaux codes qui envahissent nos stades et nos quotidiens me provoquent comme un frisson…


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