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De Durban 2001 à la conférence d’examen dite « Durban 2 » en 2009 (2è partie)

Publié le 11 mars 2009 par Drzz

2 ème Partie :

3. Le processus préparatoire de la Conférence d’examen de Durban

(Durban II)

Le 22 novembre 2006, la troisième Commission de l’Assemblée Générale, en charge des Affaires sociales, culturelles et humanitaires, adopte une résolution qui demande l’organisation d’une conférence en 2009 pour examiner la « mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban » et charge le Conseil des droits de l’homme [nouvellement créé en juin 2006] d’entamer les préparatifs de cette manifestation».

a. Le Conseil des Droits de l’Homme

Il est composé de 47 Etats élus par roulement et il siège à Genève, en tant qu’organe subsidiaire de l’Assemblée générale. Il est chargé « de promouvoir le respect universel et la défense de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales ».

Cependant, on y assiste très vite à une vaste offensive de la part de certains pays peu respectueux des droits de l'homme. Ces pays remettent systématiquement en cause les textes fondamentaux de la Déclaration universelle des Droits de l'homme (de 1948) et la conception universaliste de ces droits. Au demeurant, le Conseil semble défendre les intérêts de certains pays, qui se servent de cet organe pour échapper à toutes critiques. Prenons quelques exemples :

- Des postes de rapporteurs spéciaux, qui enquêtaient sur la situation des droits humains dans des pays spécifiques, sont supprimés (Cuba et la Biélorussie, en juin 2007).

- Quatre pays africains déclarent très sérieusement ne plus vouloir d’ « enquêteurs des Nations Unies » chez eux : le Soudan, la Somalie, le Libéria, le Burundi et la République Démocratique du Congo.

- Enfin, plusieurs Etats membres du Conseil s’en prennent à la liberté d'expression qui -selon eux- servirait à diffamer les religions. Les représentants des pays musulmans introduisent le thème de l’islamophobie particulièrement en relation avec la libre expression, la religion, et maintenant, le racisme.

- Le 28 mars 2008 (lors de sa 7ème session), dans la foulée de sa condamnation du film (de Wilders) Fitna pour diffamation envers le Coran, le Conseil des droits de l’homme adopte une modification du mandat du rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression. Cet amendement précise que le rapporteur doit désormais relever les cas où un individu aurait abusé de son droit à la liberté d’expression. Le Conseil des droits de l’homme franchit le pas pour reconnaître officiellement le blasphème comme un délit voire une violation des droits de l’homme et pour ficher son auteur. Cet amendement est approuvé par 32 voix (contre 15) notamment grâce aux pays musulmans qui siègent au Conseil des droits de l’homme.

-

b. Préparation de la conférence de Genève (Durban II)

 

Le 22 novembre 2006, la troisième Commission de l’Assemble générale à New York adopte une résolution qui demande l’organisation d’une conférence en 2009 pour examiner « la mise en œuvre de la déclaration et du programme d’action de

Durban ».

Les membres du comité préparatoire de la Conférence de suivi de Durban sont désignés durant le mois d’août 2007. La présidente est libyenne, avec comme rapporteur et vice-président, un cubain. Les autres vice-présidents sont, pour la région Afrique, le Cameroun, l’Afrique du Sud et le Sénégal ; pour l’Asie l’Inde, l’Indonésie, la République islamique d’Iran et le Pakistan (à noter que le Pakistan est également porte-parole de l’Organisation de la Conférence islamique) ; pour la région Amérique du sud et caraïbe : l’Argentine, le Brésil, le Chili ; pour la région Europe de l’Est : l’Arménie, la Croatie, l’Estonie et la Fédération de Russie ; et pour la région Europe de l’Ouest : la Belgique, la Grèce, la Norvège et la Turquie.

Un Comité Ad Hoc pour l’élaboration de normes complémentaires est également créé, présidé par l’ambassadeur algérien Idriss Jazeiry. Ce dernier a, d’ores et déjà, donné sa définition de l’antisémitisme, la même que celle soumise par l’OCI lors de l’adoption de la DPA en 2001, à savoir que l’antisémitisme est une atteinte aux arabes qui sont des sémites. Selon lui, depuis le 11 septembre 2001, l’antisémitisme à l’encontre des populations arabes, et par à extension tous les musulmans dans le monde, s’est aggravé. Il ne s’agit, d’ailleurs, pas pour ceux qui redéfinissent les termes, de nier l’antisémitisme qu’auraient subi les juifs jadis, mais de le cantonner à la période nazie sur le continent européen et de nier la réalité de l’antisémitisme contemporain à leur encontre.

Durant la première année de négociation, on discerne déjà très précisément les rapports de force qui démontrent le peu de poids des démocraties, et notamment de l’UE, sur l’ensemble du processus.

c. Les réunions de Comités Préparatoires (PrepCom)

La Conférence de suivi de Durban II -qui aura lieu finalement à Genève, du 20 au 24 avril 2009, au Palais des Nations- risque d’être aussi problématique que celle qui fut organisée en 2001. Elle a d’abord été préparée par des conférences régionales, puis par des comités préparatoires (PrepCom).

* Les conférences régionales

- La première conférence régionale, pour l'Amérique du Sud et Caraïbe, qui a lieu à Brasilia a refusé d'inclure l'antisémitisme.

- Ni la conférence ni la déclaration finale de la réunion préparatoire de Durban 2 (Genève) pour l’Afrique qui s’est tenue à Abuja, au Nigeria, (24 au 26 août 2008), n’ont traité des crimes contre l’humanité, commis par le gouvernement soudanais au Darfour, y compris les massacres ethniques d’au moins 200.000 Africains. Le Soudan -soutenu par l’Algérie, le Maroc et le président nigérian, Martin Uhomoibhi- a interrompu toute discussion sur ce sujet. En outre, le texte de la Conférence d’Abuja omet d’examiner les agressions xénophobes qui ont eu lieu récemment en Afrique du Sud. Le texte n’examine pas non plus les crimes ethniques commis au Kenya cette année, lesquels ont coûté la vie à 1.000 personnes et causé l’expulsion de 600.000 autres.

* Les comités préparatoires (PrepCom)

Le deuxième Comité préparatoire de la Conférence d’examen de Genève s’est tenu du 6 au 17 octobre 2008 aux Nations Unies, à Genève.

Ce PrepCom s’est achevé sur un document inexploitable de 640 paragraphes (dont 160 en provenance de l’Union européenne), un fourre-tout destiné à faire plaisir à tout le monde, y compris aux plus extrémistes.

Ce document qui devait être négocié chapitre par chapitre a posé problème sur quatre thèmes au moins :

- la liberté d’expression ;

- le Moyen Orient ;

- le passé colonial et la traite négrière

- les politiques migratoires.

L’UE a refusé des accords partiels (sectoriels), demandant un texte global équilibré. Le PrepCom a décidé d’une « réorganisation du travail » et d’une méthode nouvelle : Un

« facilitateur unique » : un facilitateur russe a été nommé en novembre 2008. Sa première tache a été de compiler un texte et d’en faire un document de travail. Le document fait maintenant 38 pages, réparti selon les 5 catégories décidées lors de la dernière session de travail.

Mais :

  - Le texte est très anti-occidental, il donne l’impression que c’est la seule région au monde ou il y aurait du racisme.

  - Les thèmes problématiques sont toujours présents même si le langage est souvent plus subtil :

  - 7 articles parlent de la question de la diffamation de la religion (art. 5, 26, 53, 117, 159, 216, 220)

  - Un article qui appelle à la censure et à museler la liberté d’expression (art 160)

  - 2 articles qui critiquent les mesures et la lutte contre le terrorisme comme étant racistes (art. 22 et 158), sans, bien sûr, aucune mention d’incitation à la haine par les terroristes eux-mêmes.

- 2 articles qui mentionnent l’esclavage transatlantique uniquement. (art. 156 et 226)

 - Articles critiquant ouvertement nos sociétés libérales : art 8 contre l’intégration, art 10 sociétés libérales sont davantage racistes et art 13, un échec de la conférence augmentera le racisme.

  - 5 articles sur Israël (art. 30, 31, 32, 33, 34) : raciste envers les palestiniens, droit à l’autodétermination, l’occupation est raciste.

Les négociations sur le projet de document final se poursuivent. Le dernier cycle des négociations informelles tenues par le Groupe de travail chargé de négocier le document final s’est achevé le 19 février, à Genève. Les réunions du Groupe de travail étaient présidées par la Fédération de Russie. Pour la première fois, les États-Unis et l’Australie ont activement participé aux discussions.

À ce stade, 35 paragraphes sur un total de 250 ont fait l’objet d’un accord, et ont été adoptés par le Groupe de travail qui doit tenir d’autres sessions à Genève, fin février.

d. Genève Avril 2009

Toutes les ONG qui avaient été accréditées en 2001 se voient automatiquement reconduites. Les autres doivent présenter un dossier au Comité préparatoire chargé d’étudier leur demande. Comme en 2001, l’Inde ne souhaite pas la présence d’organisations représentant les droits des Dalits et l’OCI fait obstacle aux associations luttant contre les discriminations liées à l’orientation sexuelle. Quant à l’Iran, elle a refusé l’accréditation de l'ONG Canadienne The Canadian Council for Israel and Jewish Advocacy prétextant que celle-ci cachait des intérêts privés. En revanche, le Palestinian Grassroots Anti-Apartheid Wall Campaign (PGAAWC) n’a eu aucun problème pour obtenir une accréditation.

4. Les lignes rouges ont-elles été franchies ?

Cette formule de ligne rouge a été utilisée pour la première fois par le Président Sarkozy lors du dîner annuel du CRIF le 13 février 2008, formule reprise par la Secrétaire d’Etat aux droits de l’homme à plusieurs reprises.

Certains pays se sont néanmoins déjà prononcé sur ce point et ont décidé de se retirer du processus tels le Canada en janvier 2008 et Israël en novembre 2008. Les Etats-Unis n’ont participé à aucune réunion préparatoire jusqu’en février 2009. La nouvelle administration du président Obama a décidé de participer à la réunion informelle se tenant du 16 au 19 février sans pour autant prendre de décision sur sa venue lors de la conférence d’avril. Elle a, cependant, tracé trois lignes rouges, à savoir : ne pas distinguer Israël, ne pas porter atteinte à la liberté d’expression et ne pas aborder la question des réparations pour les descendants de l’esclavage. L’Australie, les Pays Bas et le Royaume Uni, ainsi que le Danemark, ont menacé de se retirer dans le cas où le langage de haine était introduit ou si la notion de diffamation des religions et la limitation de la liberté d’expression demeuraient un enjeu central.

Les pays de l’Union européenne ne semblent pas unanimes sur la définition de ces fameuses lignes rouges qui bougent au gré de l’avancement des négociations.

Aujourd’hui, la question de l’esclavage, notamment l’élargissement de la condamnation à d’autres traites que la traite transatlantique demeure un enjeu central.

Il apparaît déjà clairement que les Dalits, les Tibétains et autres peuples discriminés dans le monde seront des thèmes tabous, comme en 2001.

L’avenir de la majorité des victimes du racisme et des discriminations de par le monde risque d’être sacrifié une fois encore sur l’autel du consensus, au profit d’idéologies qui ont peu à voir avec les aspirations démocratiques, les libertés individuelles, la justice et l’égalité.
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