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Le printemps des poètes / 10

Par Pmalgachie @pmalgachie
Jean-Joseph Rabearivelo
(1901-1937)
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Ne faites pas de bruit, ne parlez pas :
vont explorer une forêt les yeux, le cœur,
l’esprit, les songes…
Forêt secrète bien que palpable :
forêt.
Forêt bruissant de silence,
Forêt où s’est évadé l’oiseau à prendre au piège,
l’oiseau à prendre au piège qu’on fera chanter
ou qu’on fera pleurer.
À qui l’on fera chanter, à qui l’on fera pleurer
le lieu de son éclosion.
Forêt. Oiseau.
Forêt secrète, oiseau caché
dans vos mains.

Les trois oiseaux
L’oiseau de fer, l’oiseau d’acier,
après avoir lacéré les nuages du matin
et voulu picorer des étoiles
au-delà du jour,
descend comme à regret
dans une grotte artificielle.
L’oiseau de chair, l’oiseau de plumes
qui creuse un tunnel dans le vent
pour parvenir jusqu’à la lune qu’il a vue en rêve
dans les branches,
tombe en même temps que le soir
dans un dédale de feuillage.
Celui qui est immatériel, lui,
charme le gardien du crâne
avec son chant balbutiant,
puis ouvre des ailes résonnantes
et va pacifier l’espace
pour n’en revenir qu’une fois éternel.

Naissance du jour
Avez-vous déjà vu l’aube aller en maraude
au verger de la nuit ?
La voici qui en revient
par les sentes de l’Est
envahies des glaïeuls en fleurs :
elle est toute entière maculée de lait
comme ces enfants élevés jadis par des génisses ;
ses mains qui portent une torche
sont noires et bleues comme des lèvres de fille
mâchant des mûres.
S’échappent un à un et la précèdent
les oiseaux qu’elle a pris au piège.
(Extrait de Presque-Songes, édition Bibliothèque malgache.)

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