J'ai
de la chance: j'appartiens à deux cantons qui s'arrangent pour être
alternativement la risée de la Suisse. Pas besoin d'aller chercher bien
loin des sujets de conversation, il suffit de citer leur nom pour
qu'aussitôt, vos interlocuteurs se pâment et s'épanouissent comme des
citrouilles.
Il
y a quelques années, c'était le Valais. Vous vous souvenez probablement
de cette période, avec les promoteurs immobiliers, le Parti Unique
majoritaire, le gypaète, les écologistes tabassés par des commandos...
C'était une époque où je ne pouvais pas apparaître dans une réunion
sans qu'on m'interpelle en rigolant: « Mais qu'est-ce que vous
avez encore fait, les Valaisans? » On rappelait les événements, on
ironisait, on proposait les solutions les plus habiles: créer une
fédération entre le Valais et la Corse, par exemple, ou décerner des
appellations AOC pour que des comportements si pittoresques ne changent
pas.
Puis
ça s'est déplacé. Qu'on le regrette ou non, le Valais s'est normalisé
et a trouvé une manière de fonctionner moins folklorique. Vous vous
rendez compte qu'une première femme y a même été élue Conseillère
d'Etat? En 2009? Décidément...
Heureusement, c'est Genève qui a repris le flambeau, et désormais, la rigolade a changé de camp: « Mais qu'est-ce que vous avez encore fait, les Genevois? »
Il
s'agit, je cite un peu au hasard, du stade de la Praille, de la
votation annulée sur le cycle d'orientation, ou, pompom et feuilleton
qui fait crouler de rire nos voisins, de la fumée dans les lieux
publics, dont le dernier épisode rajoute une nouvelle touche de
grotesque à une affaire qui n'en avait pas besoin.
En
effet, étant donné que l'interdiction de fumer est inéluctable, que
seules quelques modalités sont encore à discuter, on peut se demander
ce que cherchent les opposants. Une seule chose manifestement: à
enfumer pendant quelques mois encore les bistrots, à coups d'effets
suspensifs, pour satisfaire leur égoïsme, leur petit confort et leur
mentalité de gamins qui font la nique aux adultes.
Ce
qui serait simplement grotesque si, comme on ne peut manquer de le
rappeler, 50 à 60 personnes ne mourraient pas chaque année à Genève à
cause de la fumée passive.
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