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Les enjeux de l’Arctique russe

Publié le 31 mars 2009 par Infoguerre

« A quelque chose malheur est bon », le vieux proverbe parait s’appliquer aujourd’hui avec une certaine acuité en ce qui concerne le réchauffement climatique. En effet, si la fonte des glaces représente pour l’ensemble de l’humanité un problème quasi insoluble, certains semblent en mesure de réussir à en tirer avantage.

Le passage du nord-est, vieux rêve du commerce maritime international, est devenu une réalité une partie de l’année. Les navires peuvent maintenant circuler de la Mer du Nord au Pacifique en longeant les côtes russes, autrefois prises dans les glaces. La Fédération de Russie a bien compris les avantages substantiels qu’elle pouvait tirer de l’ouverture d’une route maritime majeure le long de ses côtes et construit activement les infrastructures nécessaires à un important passage de navires.

Cependant, l’Arctique russe offre d’autres possibilités que la simple route maritime. En effet les richesses naturelles de la région se dévoilent progressivement. Pétrole, gaz (gisements de Iambourg et Ourengoï) et minerais métallifères (Kola, Norilsk) abondent dans le Grand Nord. Cette région délaissée au tournant des années 1990-2000 à cause des coûts d’exploitation induits par le climat hostile redevient attractive, tant par le réchauffement que par les cours actuels des matières premières. L’exploitation, débutée à la fin des années 1930 grâce aux prisonniers du goulag reprend donc aujourd’hui sous la conduite des géants russes des matières premières, activement soutenus par l’Etat central.

Mais l’appétit de Moscou ne s’arrête pas là puisque les relevés géologiques, notamment ceux de l’USGS, montrent que les réserves en hydrocarbures du Cercle Polaire sont sans doute parmi les plus importantes de la planète, peut être 25 % des réserves mondiales. Ainsi le gouvernement russe entend se positionner pour obtenir la part qu’il estime lui revenir de droit.

A cette fin, le Conseil de Sécurité Russe vient de décréter le déploiement de troupes en Arctique afin d’y assurer « la sécurité militaire ». Même si la présence de troupes russes à l’intérieur du Cercle Polaire n’est pas une nouveauté, la base de sous-marins nucléaires de la Péninsule de Kola ainsi que les nombreux aérodromes militaires le long des côtes nord en témoignent, le renforcement militaire de la zone est un signal fort adressé aux pays riverains du Pôle (Danemark, Canada, Etats-Unis). La Russie entend faire reconnaître ses revendications sur les limites du plateau continental russe de l’Arctique, ce qui changerait profondément les limites de sa souveraineté territoriale.

Par la menace de la militarisation de l’Arctique, Moscou montre, comme Pékin avec l’archipel des Spratleys, qu’elle n’est pas disposée à se laisser imposer passivement des limites géographiques sans son consentement. Il semble aujourd’hui loin le temps où le Grand Nord russe n’était qu’une terre désolée, une prison à ciel ouvert où ceux qui déplaisaient au régime finissaient dans l’enfer de l’archipel des Solovki.

Nicolas Mazzucchi


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