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Babyji d'Abha Dawesar

Par Sylvie

Babyji
Editions Héloïse d’Ormesson, 2007

Voici le roman qui a fait soufflé un vent de modernité sur les lettres indiennes en 2007. L’auteur, jeune femme née en 1974, y dépeint la vie d’une jeune étudiante indienne, très studieuse, très mûre, qui découvre tout à coup son homosexualité. Ce sont trois femmes (rien que ça !) qui vont lui faire découvrir l’amour et la sensualité. Et pas n’importe quelle femme ! Puisque dans la société indienne très cloisonnée des castes, Babyji (un diminutif qui veut dire bébé) va se lier avec Rani, la bonne de la maison (alors qu’elle appartient à la caste des brahmanes), puis avec Linde, une femme mûre divorcée et enfin avec Sheela, une lycéenne amie. Le thème est bien sûr l’éveil de la sexualité mais pas seulement !

L’auteur va à contre courant de tous les principes fondamentaux qui régissent l’Inde : il est inacceptable de se lier à une bonne et d’entretenir des relations d’égales à égales avec ses aînées. Il s’agit donc bien d’un vibrant appel à la modernisation de la société indienne fermée dans ses carcans.

Evoquant explicitement la Lolita de Vladimir Nabokov, Babyji veut faire l’expérience de sa liberté dans sa sexualité, des relations et aussi dans son avenir : comme elle le dit, elle ne veut pas devenir une machine à laver humaine ! C'est une femme forte qui ne laisse personne lui dicter sa vie.

Il s’agit donc d’abord d’un récit d’initiation et d’émancipation aux forts accents subversifs. La constellation de personnages qui gravitent autour de la Lolita est très attachante : la domestique confidente et amante qui veut quitter son mari violent, Linde, la femme libre coupable de son amour pour Babyji, Sheela, la jeune fille fausse timide qui s’émancipera aux côté de sa camarade, et aussi trois figures masculines intéressantes : l’ami confident Vidur, incarnation de la sagesse, son père, le très subversif Adit, double de Humbert Humbert dans Lolita, qui lorgne de façon lubrique l’amie de son fils et enfin, le lycéen Chakra Dev, l’enfant terrible qui met des préservatifs sur le pupitre des filles…

Ce roman est vraiment le plus frais que j’ai lu depuis longtemps ! Il vous met un punch d’enfer ! Les personnages sont hauts en couleur, les dialogues sont drôles et percutants.

L’écriture originale, très métaphorique, reprend le champ lexical scientifique car Babyji adore la physique et la chimie et tente d’appliquer ses cours de physique quantique à la vie quotidienne et à ses relations amoureuses.

Ce roman va aussi à contre courant des préjugés et des idées toutes faites sur les castes. En effet, Abha Dawesar situe son roman dans un lycée des années 2000 touchée par la loi du Mandal, qui instaure une discrimination positive pour les castes inférieures à l’entrée à l’université. Si bien que l’élite des brahmanes se retrouve souvent sans poste et est obligée d’immigrer à l’étranger…Une alarme est donc pointée sur tout ce qui va à l’encontre du mérite…

Un roman foisonnant, revigorant qui détone vraiment. Ouvrez-le vite !!!

 

Quelques extraits :

« J’étais en train de lire un livre en vogue sur la théorie du chaos, d’après lequel le chiffre trois impliquait le chaos. Je désirais le chaos parce que grâce à lui je pourrais créer mon modèle personnel. Je regardais les beaux objets fractals illustrant le volume et voyais Sheela, Linde et Rani dans l’un d’eux, s’amenuisant au fur et à mesure, le motif se répétant à l’infini. Je refermai le livre, convaincue d’avoir bien choisi la façon de mener ma vie. Le chaos était la physique moderne, c’était la science d’aujourd’hui. »

« Je m’étais divisée, à la manière d’un atome, en une foule d’électrons et de neutrons. Chaque particule subatomique dansait avec une personne différente et vivait sa vie propre. Mais tout mon être, mon être tout entier, m’existait pour personne sinon moi. »


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