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Le 7ème Prix des lecteurs du Télégramme # 4

Par Lebibliomane

"Le Montespan" Jean Teulé. Roman. Editions Julliard, 2008.


Après une biographie de François Villon qui nous avait plongés dans un Moyen-Âge sordide et cruel, Jean Teulé revient cette fois-ci avec un roman de facture plus légère en nous relatant les déboires de l'un des cocus les plus célèbres de l'Histoire de France en la personne de Louis-Henri de Pardaillan de Gondrin, plus connu sous le nom de marquis de Montespan.
Le 28 janvier 1663, Louis-Henri de Pardaillan épouse à Paris Françoise de Rochechouart de Mortemart pour ce qu'il pense être le meilleur. Qui pourrait penser en effet que ce mariage sera cause de maints tourments à venir ? Son épouse est l'une des plus belles femmes du royaume, dotée qui plus est d'un esprit vif et prompt à la répartie et aux bons mots. Les deux époux semblent s'accorder à merveille et, fait rare à cette époque, un sentiment réciproque les a unis.
Seule ombre au tableau, les Montespan ne sont pas bien vus à la Cour du Roi Louis XIV, un oncle du marquis s'étant autrefois montré rebelle à la cause des Bourbons. Le couple Montespan se trouve donc fort désargenté, le marquis ne pouvant aucun tirer aucun subside d'une charge allouée par le monarque.
Croulant sous les dettes, Montespan décide de partir à la guerre afin de s'enrichir quelque peu et de redorer son blason auprès du roi. Mais ses expéditions en Lorraine et en Algérie s'avéreront moins que fructueuses et le coût de l'entretien de ses troupes lui vaudra de contracter de nouvelles créances. Afin qu'elle puisse se distraire pendant ses absences, Montespan propose à son épouse de se rendre à la Cour où, espère t-il, elle pourra faire de nombreuses connaissances et ainsi tromper son ennui. Très rapidement, la belle marquise est remarquée à la Cour et la danse des courtisans qui gravitent autour du Roi-Soleil dans son nouveau palais de Versailles ajoutent à son étourdissement.
La voilà promue dame d'honneur de la reine et le monarque, délaissant sa favorite, Mme de La Vallière, semble de plus en plus attiré par cette créature aussi belle que spirituelle qui dorénavant se fait appeler Athénaïs de Montespan.
L'ayant pourtant encouragée à se produire à la Cour, c'est avec consternation que, de retour d'une campagne militaire en Catalogne, le marquis de Montespan apprend que son épouse à supplanté Mme de La Vallière dans le cœur du roi. De plus, il retrouve son épouse enceinte alors qu'il est parti depuis onze mois. Il n'y a plus de doute, Athénaïs partage la couche royale.

Alors que d'autres s'accommoderaient sans scrupules de cette situation, Louis-Henri de Montespan voit d'un très mauvais œil la promotion de sa femme ainsi que son nouveau statut de cocu le plus célèbre du royaume de France. Aussi, lorsqu'il ose exprimer sa colère et son dépit d'être cocufié par le roi de France, personne autour de lui ne comprend la raison de sa désapprobation : être le mari de la favorite, lui dit-on, lui assurera honneurs et fortune et il serait stupide, aux yeux de ces courtisans, de cracher dans la soupe qui lui est offerte. Mais Monsieur de Montespan ne l'entend pas de cette oreille et ne souhaite qu'une chose : récupérer sa femme. Malheureusement pour lui, celle-ci semble plus à l'aise sous les dorures du château de Versailles que dans leur modeste appartement parisien de la rue Taranne. Montespan s'emporte et ne veut pas s'avouer vaincu. Le voilà qui ajoute à son carrosse et à ses armoiries des bois de cerf, symboles de son état de cocu. Mieux encore, c'est symboliquement qu'il défie le roi en personne en clamant sa colère à qui veut l'entendre.
C'en est trop pour le monarque, habitué à ce que rien ni personne ne lui résiste. Montespan va donc connaître la prison, les humiliations, la disgrâce et l'exil. Mais rien n'y fera, le gentilhomme gascon ne cèdera jamais et toute sa vie mènera un combat acharné afin de reconquérir sa belle.


Bien que prenant de nombreuses libertés avec l'histoire officielle, Jean Teulé nous offre avec « Le Montespan » un récit jubilatoire et décapant, une comédie douce-amère riche en rebondissements et en scènes truculentes et scabreuses. On ne s'ennuie pas un seul instant à lire l'étonnante histoire de cet homme que l'auteur a su nous rendre si attachant dans son désespoir, sa détermination et son insoumission. On rit, on s'attendrit, on a parfois le cœur au bord des lèvres à la lecture de certaines scènes peu ragoûtantes, mais c'est toujours avec un grand plaisir que l'on suit pas à pas le destin de Louis-Henri de Montespan , cet homme injustement oublié par l'Histoire au profit de sa femme.


En mettant en scène ce personnage, Jean Teulé rend indirectement hommage à tous les cocus de la Création et nous apprend que, dans ce type de situation, les personnages les plus ridicules et les plus pathétiques ne sont pas forcément ceux que l'on pourrait imaginer.


Portrait de Mme de Montespan



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