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Le jour où j'ai tué mon père **/Mario Sabino

Par Essel
Le jour où j'ai tué mon père **/Mario Sabino Titre original : O dia em que matei meu pai

"Le jour où j'ai tué mon père était un jour clair, d'une clarté diffuse, sans ombre et sans relief. Ou peut-être était-il gris. De cette grisaille qui teinte jusqu'aux âmes les moins enclines à la mélancolie." (incipit)


Il a tué son père... et puis appelé la police, et tout raconté au psychiatre : ses motifs, sa haine, son enfance, son histoire, son roman inachevé, son amour, son complexe d'Oedipe et d'infériorité en face de ce séducteur richissime. 
 

"Je n'avais jamais vu mes parents s'embrasser. Ni même s'enlacer. A l'adolescence, j'ai appris qu'ils s'étaient un peu éloignés l'un de l'autre après ma naissance. Personne ne connaissait la raison de cet éloignement, mais dans la mythologie familiale il y avait plusieurs versions : ma mère était devenue frigide, mon père s'était trouvé une maîtresse, l'extrême dévouement de sa femme pour son enfant le rendait jaloux et il se sentait comme un intrus, il avait souffert d'une profonde dépression à la suite de sa paternité. Que croire ? Il est possible que chacune de ces versions soit un fragment de vérité. Il n'existe peut-être même pas une vérité intégrale, solide, correspondant à la réalité. Il se peut aussi que la vérité ne soit rien d'autre qu'un amoncellement désordonné de demi-vérités." (p. 15)
Etrange premier roman que voici, où le narrateur joue avec son lecteur et lui dévoile ses pensées et secrets, son enfance troublée, au moyen de la fiction, de la littérature, de la psychologie, du freudisme, de la philosophie. Noir, il l'est, assurément, mais pas comme on l'entend d'ordinaire, pas comme genre. Noir comme l'âme humaine qui vacille entre le Bien et le Mal, intelligente, machiavélique. Un auteur à découvrir et à suivre !   "(...) tu ne comprends donc pas que le Moi est en grande partie une construction faite à partir de l'Autre. Que le Moi n'existe pas seulement en soi, mais qu'il se construit aussi en fonction du regard extérieur. Comme j'ai fait et je fais encore partie de ton existence, ton Moi est incrusté dans mon Moi, et tu ne te libéreras jamais de cela. On ne peut jamais annuler cela. C'est l'enfer de tout le monde." (p. 79)

"Combien de questions inutiles nous posons-nous tout au long de notre vie... Serait-ce la mesure de notre nullité ? Il faut peut-être s'agrafer les doigts de la main, comme Hemistiquio, pour au moins sentir de la douleur, dans l'espoir que l'attente de la fin de la douleur ne donne un sens, même éphémère, à un minuscule segment de l'existence. Le sens de la vie : que de plaisanteries ont été faites sur cette sottise. Est-ce vraiment une sottise... Il faut peut-être avoir un enfant (Bernadete en aurait bien un, non ?) pour ressusciter une émotion quelconque." (p. 91)


SABINO, Mario. – Le jour où j'ai tué mon père / trad. du portugais (Brésil) par Béatrice de Chavagnac. - Métailié, 2009. – 157 p.. – (Bibliothèque brésilienne). - ISBN 978-2-86424-681-7 : 17 €.
relation parent-enfant - complexe d'Oedipe.

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