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Bob Dylan - Highway 61 Revisited (1965)

Publié le 23 avril 2009 par Eddie

Highway 61 Revisited (1965)Highway 61 Revisited

par Bob Dylan

Album 5 étoiles

Année : 1965
Label : Columbia
Stéréotypes : Rock, Folk, Blues
Liens : Paroles en français - Spotify - Deezer
Ce disque représente mon second gros choc musical. Vous avez “Stairway to Heaven” un soir de réveillon 1999 et Highway 61 Revisited lors de l’été 2006. D’ailleurs ça doit être les deux seules oeuvres musicales pour lesquelles je me souviens la date à laquelle elles ont heurté mes cages à miel. En plus tout ça coïncide à chaque fois avec des trucs personnels qui en rajoute encore à toute la cultitude qui entoure certaines chansons ou albums. Des fois ça tombe sur du Ophélie Winter et des fois ça tombe sur Bob Dylan, que voulez-vous, c’est comme ça.

Comme tout un tas d’albums “cultes”, je n’y ai pas compris grand-chose à la première écoute. J’avais déjà entendu “Like a Rolling Stone”, “Desolation Row” et une bonne moitié du disque en fait, avant cet été 2006. Mais même en sachant que ces chansons “représentaient” déjà quelque chose, ça m’en touchait l’une sans faire bouger l’autre. Cette métaphore me semble aussi bizarre dans ma bouche qu’elle le semble sous vos yeux, ne vous en faites pas. L’explication est simple : il me fallait connaître le contexte, il me fallait connaître d’autres disques, il me fallait avoir un peu plus de maturité, bref, il fallait que je vieillisse. D’ailleurs je pense que dans quinze ans je vais re-découvrir ce disque et qu’il va encore me servir à avancer, que je vais le “comprendre” d’une nouvelle façon. C’est en partie pour ce genre réflexions que je suis “musicophage” : je ne veux pas restée bloquée sur un disque, avec un seul angle de vue sur lui, je veux en profiter, le quitter très vite, le tromper, l’oublier, le re-découvrir et reprendre plaisir.

An de grâce 2006, 17 ans, des centaines de disques et une biographie plus tard, un contexte personnel merdique à souhait, un semblant de prise de conscience politique au loin, je suis prête, et ça va pas louper : l’album se retrouve pas du tout par hasard dans l’iPod et vous narrer plus précisément le contexte fait beaucoup trop désespérément cliché pour mériter que je vous le décrive plus longuement. Toujours est-il qu’on ne peut pas imaginer meilleures conditions pour se prendre ce disque révolutionnaire, énervé et génial de plein fouet, et pour qu’il vous laisse une trace indélébile.

Dylan avait eu la confirmation avec Bringing It All Back Home que sa folk rock (entendez par là folk électrique, supposément opposée à la folk traditionnelle) avait trouvé son public. Il est en effet accompagné sur la face A de ce disque d’un groupe de rock dans les règles de l’art, ce qui avait mis en rogne une partie de son public et suscité une certaine polémique (“Judas !”). Difficile de savoir si ça l’a contrarié ou encouragé dans sa démarche et à vrai dire, ça n’a pas vraiment d’intérêt. Bringing It All Back Home connaît un grand succès aux Etats-Unis et en Angleterre, et Dylan va logiquement continuer dans la voix folk rock qu’il vient d’ouvrir, sans contraintes de la part de producteurs ennuyeux, en toute liberté (la Highway 61 étant d’ailleurs une célèbre route passant par Duluth, sa ville natale, et symbôle de liberté). Il va concentrer sa rage, son ironie acerbe, son humour cynique et son imagination fertile dans la rédaction d’histoires à l’imagerie surréaliste et sombre, notamment pour “Ballad of a Thin Man”, et avec plus de violence pour “Highway 61 Revisited”.

Dans ce disque Dylan se détache de l’image de revendicateur ou de protestateur qu’il traîne depuis “Blowin’ in the Wind” (écrite à 20 ans, j’vous le rappelle - d’ailleurs il n’a que 24 ans quand sort Highway 61). Les paroles sont plus étranges, pleines de références littéraires, pleines d’un cynisme froid, de métaphores hilarantes. Il y a bien sûr des chansons moins “politiquement sensibles” si on peut dire, et donc un peu moins éclatantes, inspirantes et jouissives que les autres, mais toujours très belles et inspirées. “Queen Jane Approximately” et “Just Like Thumb’s Blues”, dont j’ai commencé à comprendre le sens qu’en allant lire des bouquins de décortiquage de paroles. Pour comprendre précisément ce que veut dire Bob Dylan dans ses paroles, c’est un sacré boulot. Il y a toujours des références que je ne comprends pas, et c’est pas faute d’avoir essayé.

Musicalement… “Like a Rolling Stone” a tout changé. Avec ce titre, un folkeux devient une star gigantesque, une icôn populaire gigantesque. Avec ce titre de plus de 6 minutes, Dylan explose le format “moins de 3 minutes” des singles. Ce titre est une claque monstrueuse dans la tronche de tout le monde. Pendant 6 minutes l’intensité ne descend pas d’un chouïa, avec un Dylan plus brutal et urgent que jamais. L’enregistrement de la chanson en lui-même était, selon les mots d’Al Kooper, organiste pour l’occasion (il ne savait quasiment pas en jouer et s’est retrouvé là par hasard), “complètement désorganisé, complètement punk”. Aucune note n’était écrite, “c’est juste arrivé”.

Et puis il y a “Tombstone Blues”, un morceau blues-rock aux paroles complètement dingues : “The Commander-in-Chief answers him while chasing a fly / Saying, ‘Death to all those who would whimper and cry’ / And dropping a barbell he points to the sky / Saying, ‘The sun’s not yellow / it’s chicken’”, le tout propulsé par le jeu de guitare génialissime de Mike Bloomfield, tout comme sur “Highway 61 Revisited”.

Brutal, garage, complexe, faussement poétique, Highway 61 Revisited redéfinit les codes de la musique populaire, met au point le folk-rock, explose les conventions et instaure Bob Dylan comme l’une des plus grandes stars de la musique, à seulement 24 ans. C’est le chef-d’oeuvre du bonhomme et mon album préféré. Comme dit Al Kooper, “c’est juste arrivé” et ça a tout changé.

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