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La guerre des agences de notation

Publié le 06 mai 2009 par Infoguerre

La crise économique actuelle a mis sur le devant de la scène une problématique inédite de « re-moralisation » d’une vie financière marquée par des affaires retentissantes qu’il s’agisse de J. Kerviel ou de B. Madoff. Au banc des accusés de ces dérives on trouve notamment les agences de notation, accusées de couvrir voire d’encourager les manipulations et autres montages opaques.

Jusqu’ici le marché des agences de notation était particulièrement restreint puisque principalement partagé en deux grosses agences anglo-saxonnes : Standard & Poor’s et Moody’s. Elles sont largement pointées du doigt aujourd’hui, notamment à cause des subprimes américaines. En effet, les agences de notation anglo-saxonnes, en accordant des notes élevées à des produits financiers que l’on sait aujourd’hui “toxiques”, se sont rendues complices d’un système plus que trouble.

Aujourd’hui que ces collusions entre banques et agences de notation sont connues, ces dernières se voient attaquer de toutes parts, leur rôle même de “garants de la bonne santé financière” se retrouvant remis en cause. Que ce soit outre-Atlantique ou en Europe, Standard and Poor’s et Moody’s sont sur la sellette. Les députés européens viennent même de décider la mise sous surveillance de ces entreprises chargées en théorie de minimiser les risques des investisseurs.

Ce climat de suspicion généralisé est une aubaine pour certains qui profitent de la crise pour tenter d’instrumentaliser le désir de redéfinition des règles financières internationales. Plusieurs pays envisagent ainsi la création d’une agence de notation nationale qui pourra, à terme, contester le monopole anglo-saxon dans le domaine, de plus en plus désigné comme une des origines de la crise.

Ce positionnement est d’autant plus pertinent que, depuis quelques années, les agences de notation, en plus de leur rôle traditionnel de notation des entreprises, ont commencé une activité de notation des pays. De fait, elles ont acquis un rôle géoéconomique important puisqu’une trop mauvaise note attribuée à un pays peut en détourner les investissements étrangers.

De plus, l’impact de ces notes pour les pays s’étend aussi à la facilité d’accès au crédit puisqu’un pays mal noté verra le prix de ses crédits augmenter et son accès aux financements compliqué voire verrouillé. Jusqu’à présent, avec le quasi-monopole de Standard and Poor’s et Moody’s, les Etats-Unis disposent d’un formidable outil de pression financière sur l’ensemble des pays de la planète. 

Bien évidemment les puissances émergentes se jettent dans la bataille de la communication autour de cette problématique. La Russie qui par la voix de Vladimir Poutine a déclaré au début de l’année que la Russie se devait d’avoir son agence de notation, a été le premier Etat à se positionner aussi clairement. Sous couvert de la spécificité du marché russe, c’est bien un instrument de pouvoir que se propose de créer le Premier Ministre russe.

C’est aussi le cas de la France qui tente de saisir une opportunité qui lui permettrait d’accroître sa puissance dans la sphère financière en devant productrice de normes. Ainsi, la COFACE va demander son agrément comme agence de notation en Europe, ce qui à terme pourrait positionner la France comme un pays qui compte dans la sphère économique internationale. 

Nicolas Mazzucchi 


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