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Amour de ma mère, à nul autre pareil III

Publié le 09 mai 2009 par Bonamangangu

9687100901.jpgAmour de ma mère, à nul autre pareil. Elle perdait tout jugement quand il s’agissait de son fils. Elle acceptait tout de moi, possédée du génie divin qui divinise l’aimé, le pauvre aimé si peu divin. Si, un soir, je lui proposais d’aller au cinéma, elle disait aussitôt oui, c’était une merveilleuse idée «  et parfaitement, que diable, il faut se divertir et jouissons de la vie tandis que nous sommes en vie et vraiment il est fou d’être sages et pourquoi resterions-nous calfeutrés à la maison, comme des vieux, et je suis prête, mon chéri, je n’ai que mon chapeau à mettre ».

( Elle n’avait jamais que son chapeau à mettre, même la nuit où, mélancolique à cause d’une blonde fée et infante, je la réveillai à minuit pour lui demander de sortir avec moi.)

Mais si je changeais malicieusement d’avis, parce que je savais ce qui allait se passer, et si je disais que je préférais en somme rester à la maison, immédiatement elle approuvait, non pour m’être agréable, mais par sincérité passionnée et tout explosive, toutes mes décisions étant remarquablement justes.

Elle approuvait, sans même savoir qu’elle se contredisait, et elle me disait que « parfaitement, ce sera si agréable de rester gentillement au chaud à la maison et de parler ensemble au lieu d’aller voir ces bêtises de cinéma où la femme est toujours tellement bien coiffée, même quand elle est malade, et d’ailleurs il fait mauvais dehors et puis ce sera fatiguant de rentrer tard à la maison et puis, la nuit, il y a des voleurs dans les rues, ces fils de Satan qui vous arrachent votre sac. »

 Ainsi, au sujet du cinéma, si je changeais malicieusement quatre fois d’avis, quatre fois elle changeait sérieusement d’avis, se contredisant avec la même foi…//…

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O toi, la seule, mère, ma mère, ma mère et de tous les hommes, mérites notre confiance et notre amour. Tout le reste, femmes, frères, sœurs, enfants, amis, tout le reste n’est que misère et feuille emportée par le vent.

Albert Cohen, op cit, pages 90-93. 102

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Enrique Granados, Danza triste


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