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supplique à une jeune passante

Par Zorglub

supplique à une jeune passantefille en short, qui ronges tes ongles en tortillant du cul,
les garçons te regardent -
   tu as plus d’importance, semble-t-il,
que Gauguin ou Brahma ou Balzac,
plus, en tout cas, que les crânes qui nagent à nos pieds,
ta démarche hautaine brise la tour Eiffel,
fait tourner les têtes des vieux vendeurs de journaux à la sexualité
éteinte depuis longtemps ;
tes bêtises réfrénées, ta danse de l’idiote,
tes grimaces délicieuses - ne lave jamais tes sous-vêtements
sales, ne chasse jamais tes actes d’amour
à travers les allées résidentielles -
ne nous gâche pas ça
en accumulant kilos et fatigue,
en acceptant la télévision et un mari gnangnan ;
n’abandonne jamais ce déhanchement maladroit et inepte
pour arroser la pelouse le samedi -
ne nous renvoie pas à Balzac ou à l’introspection
ou à Paris
ou au vin, ne nous renvoie pas
à l’incubation de nos doutes ou au souvenir
du frétillement de la mort, salope, affole-nous d’amour
et de faim, garde les requins, les requins sanglants
loin du cœur.

Charles Bukowski, Les jours s’en vont comme des chevaux sauvages dans les collines (The Days Run Away Like Wild Horses Over the Hills, 1969) ©Editions du Rocher pour la traduction française, 2008.


tags:Bukowski, Poème de Buk, Poésie

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