"Née en 1892, vendue à l'âge de huit ans, Kinu Yamaguchi fera l'apprentissage du dur métier de geisha. C'est
un peu l'envers du décor qu'elle raconte : avant de porter le kimono de soie, il lui faudra vivre un apprentissage rigoureux, étudier tous les arts du divertissement et endurer pour cela
privations, exercices physiques traumatisants, soumission aux coups sous les ordres de Mère et des grandes soeurs. Après son initiation sexuelle, elle s'enfuira, puis reviendra vivre dans le
quartier réservé avant de devenir elle-même patronne d'une maison de geishas.
Récit bouleversant, description édifiante de la vie de tous les jours dans l'intimité d'une okiya, avec ses cérémonies, ses coutumes, ses fêtes et ses jeux. On y entend des histoires de
plaisirs, de chagrins, de courage aussi, qui éclairent sous un jour nouveau ce monde fermé sur lequel l'occident ne cesse de s'illusionner".
280 pages - 8,50 Euros.
Mon avis :
Comme beaucoup de lecteurs, je recommande de ne pas confondre le roman de Yuki INOUE avec le roman homonyne d'Arthur Golden. A noter également que les geishas ont inspiré Rob Marshall en 2006 mais si le romanesque et l'émotion étaient présents dans l'oeuvre cinématographique, le roman de Inoué laisse place à la véracité, aux faits et à l'histoire (au sens propre du terme).
La trame de l'histoire est citée ci-dessus dans la quatrième de couverture, je ne m'y attarde donc pas.
Yuki Inoué a recueilli le témoignage de Kinu qui avait 84 ans. C'est donc au début du XIXème siècle que débute le récit de cette gamine qui, dès l'âge de huit ans, va apprendre pendant de nombreuses années le dur métier de geisha. Histoire bouleversante et fidèle au témoignage de Kinu, elle est en outre très riche d'informations : le parcours des geishas y est décrit sans fioriture, sans mélo, le tout sur un fond historique et sur l'évolution de ce métier qui perd peu à peu de son "prestige". Instructif, courage, révolte et résignation sont les adjectifs que j'utilise pour décrire ce roman.
Geisha ou Geiko signifie "quelqu'un qui pratique ou vit par le gei (l'art)", ou plutôt les arts. Les arts musicaux : le jeu du shamisien (instruments à corde), du tambour, de la danse et du chant traditionnel et les autres : la cérémonie du thé, de la calligraphie et de la conversation.
Dans les Okiyas, régentés par les Okamisan (mère qui tient la maison), vivent les geishas, les maikos (titre attribué à partir de 17 ans) et les tamagos (jeunes filles en apprentissage). Le roman de Inoué nous apprend que l'habillage, le maquillage, la manière dont sont attachés les cheveux ont leur importance, tout est codifié.
Les maikos, généralement vendues par leurs parents, sont toujours endettées et elles mettentdes années à rembourser : Coût des leçons, de l'apprentissage des arts, des kimonos... d'où le travail de servitude auquel devra se plier pendant de nombreuses années la future geisha afin d'acquitter sa dette. La plupart d'entre elles espérait rencontrer leur dana, leur protecteur : un homme qui leur fournirait kimono et argent, parfois même le remboursement de leur créance, en échange de faveurs sexuelles. Il est dit que les geishas ne sont pas des prostitués bien que leur virginité se négociait et s'achetait à prix d'or selon la beauté de la jeune fille, on appelle cela le mizuage mais l'histoire de Kinu semble nous indiquer le contraire. La différence étant que les geishas, outre des objets de plaisirs, étaient des artistes accomplissant leurs arts avec perfection, à l'inverse des prostituées qui ne sont là que pour... je ne vous fais pas un dessin.
Ces mémoires qui nous livrées par l'intermédiaire de Yuki Inoué retranscrivent simplement une condition, une vie, des faits.
Je vous encourage vivement à lire cette oeuvre mais si vous souhaitez du romanesque, passez votre chemin et choisissez plutôt le roman de Golden. Moi, j'ai de loin, de très très loin, préféré celui-ci.