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Dada, toujours terroriste ?

Publié le 19 mai 2009 par Perce-Neige
Dada, toujours terroriste ?
Bien sûr c'est la guerre, la grande, c'est de 14-18... On est en 1916, au Cabaret Voltaire. C'est la première lecture publique du manifeste Dada. Tristan Tzara écrit et proclame ceci : "Il nous faut des œuvres fortes, droites, précises et à jamais incomprises. La logique est une complication. La logique est toujours fausse. Elle tire les fils des notions, paroles, dans leur extérieur formel, vers des bouts, des centres illusoires. Ses chaînes tuent, myriapode énorme asphyxiant l'indépendance. Marié à la logique, l'art vivrait dans l'inceste, engloutissant, avalant sa propre queue toujours son corps, se forniquant en lui-même et le tempérament deviendrait un cauchemar goudronné de protestantisme, un monument, un tas d'intestins grisâtres et lourds." On a compris. En bref, il faut chercher. Libérer le langage, et l'art en général. Savoir dire " n'importe quoi" quand ce "n'importe quoi" entre en vibration, soudain, avec quelque vérité entreposée quelque part au fond de l'univers... Plus loin, ceci : "Que chaque homme crie : il y a un grand travail destructif, négatif, à accomplir. Balayer, nettoyer. La propreté de l'individu s'affirme après l'état de folie, de folie agressive, complète, d'un monde laissé entre les mains des bandits qui déchirent et détruisent les siècles. Sans but ni dessein, sans organisation : la folie indomptable, la décomposition. Les forts par la parole ou par la force survivront, car ils sont vifs dans la défense, l'agilité des membres et des sentiments flambe sur leurs flancs facettés." Et pour finir,une apothéose : "Tout produit du dégoût susceptible de devenir une négation de la famille, est dada; protestation aux poings de tout son être en action destructive : DADA; connaissance de tous les moyens rejetés jusqu'à présent par le sexe publique du compromis commode et de la politesse : DADA; abolition de la logique, danse des impuissants de la création : DADA; de toute hiérarchie et équation sociale installée pour les valeurs par nos valets : DADA; chaque objet, tous les objets, les sentiments et les obscurités, les apparitions et le choc précis des lignes parallèles, sont des moyens pour le combat : DADA ; abolition de la mémoire : DADA; abolition de l'archéologie : DADA; abolition des prophètes : DADA; abolition du futur : DADA; croyance absolue indiscutable dans chaque dieu produit immédiat de la spontanéité : DADA; saut élégant et sans préjudice d'une harmonie à l'autre sphère; trajectoire d'une parole jetée comme un disque sonore cri; respecter toutes les individualités dans leur folie du moment : sérieuse, craintive, timide, ardente, vigoureuse, décidée, enthousiaste; peler son église du tout accessoire inutile et lourd; cracher comme une cascade lumineuse la pensé désobligeante ou amoureuse, ou la choyer — avec la vive satisfaction que c'est tout à fait égal — avec la même intensité dans le buisson, pur d'insectes pour le sang bien né, et doré de corps d'archanges, de son âme. Liberté : DADA DADA DADA, hurlement des douleurs crispées, entrelacement des contraires et de toutes les contradictions, des grotesques, des inconséquences : LA VIE." Naturellement, tout cela est très inactuel, n'est ce pas ? La grande guerre, le dégoût, la nécessité de crier et ce besoin, vital, d’œuvres " fortes, droites, précises et à jamais incomprises".

 [illustration disponible sur le site propriétaire de l'image]


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