La revue Siècle 21, dont le numéro 14 vient de paraître, publie une traduction par Auxeméry de l’intégralité de l’un des trois grands poèmes qui composent Trilogy.
[4]
Il existe, par exemple, une formule
en chaque coquillage :
la mer pousse, continuelle,
et ne peut rien contre corail,
os, pierre, marbre
taraudés du dedans par cet artisan,
l’hôte de la coque :
huître, palourde, mollusque,
c’est un maître-maçon qui façonne
la merveille de pierre :
oui, cet ermite amorphe, flasque
là-dedans, comme la planète
pressent le fini,
il limite l’orbite
de son être, sa maison,
temple, sanctuaire, lieu saint :
il délivre les portails
à intervalles fixes :
tiraillé par la faim,
il s’ouvre au flux de la marée :
mais l’infini ? non,
de rien-de-trop :
je ressens ma propre limite,
les mâchoires de ma coque claquent
et refusent l’invasion du sans-limite,
le poids de l’océan ; l’infinité de l’eau
ne peut me briser, moi œuf dans ma coquille ;
cercle clos, immortel, complète
plénitude, je sais la force
de la marée, et la bonace
tout autant que la lune ;
le poulpe et son obscurité
sont sans pouvoir contre
sa froide immortalité ;
de même moi à ma façon, je sais
que la baleine
ne peut me digérer :
tiens bon dans ton orbite limitée, statique,
toute petite, et les mâchoires de requin
de ce qui dehors t’entoure
te recracheront :
sois indigeste, dur, sans cœur,
et ainsi vivant en dedans,
engendre-toi, toi-même de toi-même,
et sans toi,
cette perle-de-grand-prix.
H.D. (Hilda Doolitle), extrait de « Les Murs ne
croulent pas / The walls do not fall », Trilogy, traduction inédite d’Auxeméry, Revue Siècle 21 n° 14, printemps-été 2009, p. 92. (version originale en
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There is a
spell, for instance,
in every sea-shell:
continuous,
the sea-thrust
is powerless against coral,
bone,
stone, marble
hewn from within by that craftsman,
the
shell-fish:
oyster, clam, mollusc
is
master-mason planning
the stone marvel:
yet that
flabby, amorphous hermit
within, like the planet
senses the
finite,
it limits its orbit
of being,
its house,
temple, fane, shrine:
it unlocks
the portals
at stated intervals:
prompted by
hunger,
it opens to the tide-flow:
but
infinity? no,
of nothing-too-much:
I sense my
own limit,
my shell-jaws snap shut
at invasion
of the limitless,
ocean-weight; infinite water
can not
crack me, egg in egg-shell;
closed in, complete, immortal
full-circle,
I know the pull
of the tide, the lull
as well as
the moon;
the octopus-darkness
is
powerless against
her cold immortality;
so I in my
own way know
that the whale
can not
digest me:
be firm in your own small, static, limited
orbit and
the shark-jaws
of outer circumstance
will spit
you forth :
be indigestible, hard, ungiving.
so that,
living within,
you beget, self-out-of-self,
selfless,
that pearl-of-great-price.